Un lutin dans le placard

iris-le-menestrel

C'est une maison cossue des années cinquante. La vie s'y passe au premier étage. 

En entrant, à droite du couloir, on aperçoit la salle à manger puis le salon en enfilade. 

A gauche, on trouve la cuisine, en espace ouvert grâce à un bar. 

Cette pièce a une drôle d'allure. Les hauts murs laqués blancs et habillés de placards anciens, du sol au plafond, lui donnent des airs de cathédrale. 

Il y a tellement de placards qu'il a fallu les numéroter. Dans un angle, tout en haut, il s'en trouve un, très étroit et très long, presque invisible, il porte le numéro 5. C'est celui du lutin. 

On ne sait plus bien comment un pareil personnage a atterri ici. On sait seulement qu'il est là pour soutenir l'enfant de la famille dans son quotidien. 

Il lui offre des " tranches " d'imaginaire. 

Le lutin parcourt la Terre entière, depuis les fjords norvégiens jusqu'en Terre de Feu en passant par l'île de Délos et sa terrasse aux Lions.

Il lui raconte ses aventures sur une ardoise accrochée au bouton de la porte.

L'enfant s'est pris au jeu. Quotidiennement il lit ce courrier céleste et découvre ainsi le monde.

Le lutin fait régulièrement des fouilles archéologiques et rapporte des objets et des photos qu'il cache dans le n°5.

Ce compagnon est aussi d'un grand réconfort dans les moments difficiles. Le jour de la rentrée des classes, par exemple, il inscrit des paroles d'encouragement. 

L'enfant soutenu par cette créature de l'invisible part alors à l'école un peu plus en confiance avec le sentiment de ne pas être tout à fait seul.

Avant Noël, le lutin travaille plusieurs semaines au pôle Nord dans l'atelier de qui vous savez. Il tient un journal de l'avancement des travaux pour la plus grande joie de l'enfant. Ce sont ses moments préférés, car on le sait bien, la plus belle période de Noël, c'est l'Avent. 

Cela fait quelques années que cela dure maintenant...

Pourtant un soir, l'enfant arrive dans la cuisine, s'assied et l'air grave, lâche : 

" Maman c'est toi, le lutin ? "

Un silence effrayant s'ensuivit. La mère, la gorge nouée, sut en une fraction de seconde, que la réponse serait capitale, elle prit la décision de dire la vérité : 

" Ben, oui..."

L'enfant, les larmes dans les yeux, soulagé, répondit : " Ah bon ! Ouf... j'ai cru qu'il était mort."


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