Voyage improvisé

Elle rentrait. Fenêtres ouvertes, chantant à tue-tête au volant de sa voiture.

Elle sentait la douceur de son foulard le long de son bras. Comme une caresse.

Elle avait passé une bonne journée.

Elle se dit avec gratitude que les vacances étaient délicieuses. Qu'il était bon de rester quand tous sont absents ! Comme pour constater du calme absolu qui règne, quand tout le monde, dans un même élan va bonder une plage, emplir un château, saturer une autoroute du Soleil.

Etre là. Simplement là.

Posée sur sa terrasse, une tasse de thé à la main. Elle admirait. Elle s'imaginait qu'au bout de son jardin, elle pouvait emprunter un chemin de sable qui mènerait à la mer... Ou à la montagne... Elle rêvait. Elle s'y croyait. Et pourtant tout était calme, statique. Comme tu par la chaleur du coeur de l'été.

Paisiblement, elle continuait à s'adonner à quelques rêveries.

Son coeur demandait à battre la chamade, à brûler d'amour pour un homme, à se consumer avec passion mais parcimonie - afin de ne pas mourir trop vite.

Elle avait envie de jouer avec le feu, de découvrir un corps fait d'os, de sang, de chair, de muscles, d'eau, de poils... Elle voulait hanter l'esprit de quelqu'un et que quelqu'un hante son esprit.

Elle espérait tantôt un baiser en sortant de la douche, tantôt une main virile sur sa hanche. Elle voulait sentir le désir et l'excitation grimper en elle, monter en lui.

Et en fin de compte, la seule chose qu'elle voulait, sentant cet air de pré-rentrée, c'était un petit mot posé à côté de sa tasse de thé un beau matin.

Sur un papier blanc anodin, le coupable aurait écrit "je t'aime" et tracé un coeur à l'encre rouge.

Son coeur, à la lecture, palpiterait.

L'élevage de papillons dans son ventre chercherait son envol.

Elle s'imaginait secrètement vivre ces histoires d'amour. Parfois avec un Jules d'un soir, parfois avec un prince charmant pour toute sa vie.

Comme si elle attendait la tornade : cet homme qui balaierait tout d'un revers de la main. Qui lui ferait oublier une par une les cicatrices de son coeur, les souffrances inutiles, les doutes remplis d'incertitude, et qui lui ferait vivre un amour sur-mesure, franc, honnête et loyal, fait de dévotion réciproque, d'admiration sans borne, de respect informel, de gazouillis éternels, de contes de fées, de jeux enfantins, de complicité maligne, de sourires séducteurs...

Elle se plaisait à s'évader ainsi dans ses songes, en attendant qu'ils deviennent réalité.