We can make the world stop (Defi 12 club jetez l'encre)

cecileboiscourbeau

« ça commence à être pas mal… » marmonna Jonathan. Voilà presque 2 heures qu’il travaillait son dernier morceau sur son synthé.  Ca lui était venu comme ça, en plein milieu de la nuit, comme une étoile filante dans l’obscurité. Il en avait l’habitude, de ces pointes de génie et d’imagination qui sortaient d’on ne sait où. Et il n’en avait retenu qu’une chose : surtout ne pas les laisser filer ! Car ça repartait aussi vite que c’était venu et s’il n’y prêtait pas attention, au matin il ne lui en restait rien. Alors, il s’était levé, en essayant de ne pas réveiller Emilie qui elle, dormait à poings fermés, ne connaissant pas les réveils nocturnes cérébraux des musiciens, et s’était dirigé vers son « atelier ». L’atelier en question étant chichement constitué d’un PC et d’un synthé posés sur une table à tréteaux, à moitié coincé entre les poutres apparentes de la sous-pente et le canapé du salon. Il avait alors commencé à retranscrire la musique qui lui trottait dans la tête et l’avait obligé à jouer les insomniaques. Cette semaine avait été un peu…disons compliquée, et surtout pesante. Il avait besoin de s’évader, de trouver une échappatoire, ça en devenait vital. Et en bonne amie qu’elle était, la musique lui avait fourni ce qu’il demandait, à sa manière. Une sorte de Dieu vivant, qui au moins, avait le mérite de répondre à ses appels. Il avait fini le morceau assez vite, déversant ainsi toute l’énergie qu’il n’était pas arrivé à trouver durant toute cette semaine.  Mais il manquait encore un titre à ce morceau. C’est presque ce qui lui prenait le plus de temps, trouver un titre. Les mots, c’était pas son truc. Surtout quand il fallait mettre un mot précis sur ses émotions, comme on met une étiquette sur un classeur. Il sursauta soudain, sentant un bruit derrière lui. C’était Emilie, les cheveux en bataille, fantôme titubant dans sa chemise de nuit blanche, qui le regardait appuyée contre la poutre, mi-amusée, mi-endormie. Il retira son casque. « Excuse-moi, je t’ai réveillée… » Emilie ne dit rien, vint s’installer sur ses genoux et lui caressa les cheveux.  « Tu n’arrivais pas à dormir, c’est ça ? C’est à cause de ce qui s’est passé hier ? »  Il se frotta les yeux, comme si cette fois c’était sa fatigue qui lui retombait dessus sans crier gare, et soupira : « Je ne sais pas, peut-être… C’est pas ma fête en ce moment… Parfois j’aimerais que le monde s’arrête que je puisse souffler un peu. » Emilie lui entoura le cou de ses bras, et en guise de consolation, l’embrassa tendrement.  Elle lui susurra à l’oreille : « we can make the world stop »…

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