17 minutes, a mesure of life

petisaintleu

13h24 : Enfin ! Christophe humilié, Christophe martyrisé, mais Christophe libéré ! Après m'être assuré que tout le monde soit parti en pause déjeuner, je rampe jusqu'aux toilettes.

13h25 : Deux heures que je gigotais sur mon siège, paralysé par la pudeur. Je m'assois sur la lunette, un sourire béat m'envahit.

13h26 : Problème… Alors que mes nerfs se relâchent et qu'un son tout autant tonitruant qu'incongru résonne comme les trompettes de Jéricho, la porte des WC s'ouvre.

13h27 : La honte m'envahit. Une vague idée de me faire hara-kiri. Je me sens maudit jusqu'à la septième génération. Je suis certain que l'autre a deviné que c'était moi !

13h28 : Fausse alerte. Il n'a fait que se laver les mains. Avec la ruse de Sioux que j'ai employée, il n'a pas dû remarquer ma présence. À moins qu'il n'ait vu le témoin rouge qui indique que le trône est occupé. Oui, c'est cela, un vicelard !! J'imagine déjà un regard narquois se poser sur moi, me transperçant jusqu'à l'os.

13h32 : Quatre minutes. 240 secondes d'angoisse. Une petite mort. Mais, je reprends confiance. Il faudra que je pense à m'inscrire à un cours de yoga.

13h33 : La zénitude. Des rêves de toilettes japonaises m'envahissent. Le paradis des contrits de la grosse commission. Il paraît que ces petits génies de la retenue inondent les lieux d'aisances de bruits d'oiseaux pour tromper l'ennemi, de brumisateurs parfumés à la rose.

13h35 : La mauvaise fortune s'acharne ! Mais comment n'ai-je pas effectué les vérifications d'usage ! La check-list de survie, que même le moins aguerri des mortifiés ne saurait négliger ! May Day, May Day ! Il ne reste que cinq malheureuses feuilles avant le naufrage.

13h36: Connecte ton cerveau à ton cervelet ! Bon, en les pliant, cinq fois deux feront dix. En gérant, on devrait s'en sortir. Pour en rester à l'empire du soleil levant, j'ai entendu parler d'un guerrier nippon qui aurait survécu seul pendant près de quarante ans sur une île de l'archipel philippin. Il n'en est pas mort ! Il a survécu sans. Je ne parle pas du manque de nourriture, mais de survivre sans PQ !

13h37: Trop fier ! Nickel chrome. Ne reste plus qu'à tirer la chasse en croisant les doigts pour que l'esprit de l'étron flotteur ne vienne hanter la cuvette.

14h00: Tout le monde rejoint son poste de combat. A priori, j'ai déjoué tous les pièges. Je ne remarque que des visages placides, quelques-uns altérés par l'apéro de trop.

14h10: Mon boss entre dans mon bureau avec un tonitruant « Ça va, face de pet ? ». Va chier… Tu peux te les garder tes blagues de merde.

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