A Poil !

D'abord, en haut, car c'est peu commun, de le mettre en bas, le ciel, bleu azur sans l'ombre menaçante d'un nuage noir de mauvais présages.

En dessous, car c'est peu commun de la... etc., la mer, bleu aussi, avec des vagues précises de dentelles blanche sous un trait de bleu outremer profond pour souligner le contraste entre l'écume aérienne de l'esprit et le tréfonds abyssaux de l'âme.

Puis une plage de sable blanc, mais en jaune, car c'est mieux pour l'harmonie picturale (et que je n'ai plus de blanc). En premier plan, une cabine aux couleurs vives sonnantes et trébuchantes avec l'inscription « PLAGE NATURISTE » au-dessus de la porte, car c'est peu commode de la mettre en barre de seuil, la pancarte.

Le tout dans une facture hyperréaliste naïve à la détrempe mayonnaise.

La cabine est à simple fond, mais à double portes, on y entre d'un côté, on en sort de l'autre.

La porte de sortie libère une nuée de donzelles vêtues « avec moins que rien de costume* » qui s'éparpille sur le sable blanc, mais en jaune, en gesticulant et en criant d'allégresse. Les cris sont subjectifs en peinture à moins d'avoir sonorisé le tableau par des effets spéciaux high-tech.

Cette évocation désordonnée illustre la joie de vivre et d'exister, « l'insoutenable légèreté de l'être. » dirait Kundera en pyjama au saut du lit.

Côté porte d'entrée, une file d'attente disciplinée en un long cordon noir de femmes voilées intégrales en habit de grand deuil, encadrées par la surveillance vigilante de barbus armés jusqu'au poil.

Finalement, cela ressemble plus à un dessin de presse à emmerdes. Je vais peindre une corbeille de fruits, plutôt, comme d'hab.

* « Et quand prenant ma butte en guise d'oreiller

Une ondine viendra gentiment sommeiller

Avec moins que rien de costume

J'en demande pardon par avance à Jésus

Si l'ombre de sa croix s'y couche un peu dessus

Pour un petit bonheur posthume. »

Supplique pour être enterré à la plage de Sète. G. Brassens.