biographie sans anesthésie

Marie Laure Bousquet

                Plongée à vingt-cinq ans dans le monde sans âme des jeux de hasards j’ai déambulée longtemps sur les routes de bars en bars de bureaux de tabac sans fumée à des comptoirs de librairie aseptisés.

J’ai croisé pendant dix ans ; des alcooliques, des érudits, des menteurs, des malhonnêtes, des puristes, des adorables, des insupportables, des passionnés, des pathétiques, des sympathiques, des illusionnistes, des infréquentables, des clodos, des bourgeois, des aristocrates, des diabétiques, des séducteurs, des pervers, des imbéciles, des fourbes, des ouvriers, des paresseux, et des bienheureux.

Et moi dans tout cela j’étais pressée, aimable, charitable, endormie, énervée, dégoutée, peau de vache, à l’écoute, déprimée, convulsive, bronchique, contagieuse, déçue, charmée, étonnée, dépressive, fatiguée, en forme, sportive, mollassonne, spontanée, calculatrice, hypocrite, généreuse, querelleuse, pacifique.

                Une ligne de fond m’a entrainé vers le sous-sol ; pauvre petite sardine sèche glissant sur des parois grises d’inox froid. Heureusement un attrape-rêve en plume d’ange à piégé mes cauchemars.

 Alors j’ai pris la tangente pour un monde de silence comme la plongée sous-marine mais dans de l’air. J’ai respiré loin des Lotophages, j’ai débroussaillé  cette nuée confuse pour retrouver un moi tout cru.

                C’est du Yoga ! Ça sonne comme une friandise, un goût de pays chaud et suave.  J’ai gravie des échelles (il y en a là aussi) Je suis devenue une des leurs, je ne suis pas un gourou (vade retro satanas !) mais je transmets cette lumière comme je peux, pour rendre à l’ange son cadeau.

                Je suis retournée à l’école avec les grands enfants les miens n’en sont plus  elles ont désertés notre nid pour  faire le leur.

Je hante les universités, histoire de l’Art, Lettres j’y croise des regards étonnés réprobateurs et parfois amicaux, je m’en fiche ! Je m’envole !

                Et puis je cours, je nage, j’apnéïse c'est-à-dire que je retiens ma respiration et puis je créé de l’espace dans ma vie,  oui,  de l’espace jamais du vide.

La vie est multiple. J’écris ; des nouvelles, des romans, des poèmes, des lettres, des soupirs, des fous rire, en catimini, à la plage, en hiver, et les autres jours.

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