Calypso la sorcière (conte pour adultes)

Intrigante

Je m’appelle Calypso, je suis une princesse, mais ne vous imaginez pas une princesse de conte de fées, car je suis la fille de Cyriaque et Elopha, les deux sorciers les plus puissants de l’univers. Puissants, ils le sont, craints encore plus, à mon grand désespoir. Pour eux être mauvais et détesté de tous est une satisfaction, pour moi c’est un enfer. Je suis l’héritière d’une grande lignée, ma tante est où devrais je dire « était » Grimhilde, femme jalouse et perfide, toujours obnubilée par sa beauté, elle en a fait voir à Blanche neige, pour finalement finir dans un fossé. Une autre de mes tantes, Maléfique a complètement perdu la raison lorsqu’elle s’est transformée en dragon avec l’intention de tuer le fiancé de la très ennuyeuse Aurore, qui passe la moitié de sa vie à dormir. Il y a tante Ursula (encore une) qui passe sa vie en pleine mer, toujours à chercher des poux à Ariel, qu’elle idée de perdre son temps avec une femme à moitié poisson. J’aime tante Mim, toujours derrière son Merlin,  ce magicien vieux et décrépit que j’aime un peu moins. Je me demande si une romance n’est pas en train de se créer entre ces deux-là, sorcière et magicien, drôle de mélange. Elle vient souvent me rendre visite, lorsqu’elle ne tombe pas malencontreusement dans la chambre de mes parents. La pauvre, ses pouvoirs commencent à s’amenuiser. Cruella est une cousine éloignée, et a très souvent fait parler d’elle, elle a la phobie les chiens, mais n’a jamais montrer de talents pour la sorcellerie, ce qui me fait me demander si elle fait vraiment partie de notre illustre famille. Et puis il y a Jafar le demi-frère de mon père, qui n’a jamais accepté de se faire rejeter par Yasmine, et qui finalement se retrouve coincé dans une lampe. Personne ne sait ce qu’elle est devenue, personne sauf moi, mon père a été la récupérer au fin fond du désert, elle trône actuellement sur le chambranle de cheminée de la salle des banquets. Je pense que mon père regrette amèrement ce geste, surtout depuis qu’il doit supporter les sempiternelles plaintes de celui-ci, qui exige de sortir de cet endroit réduit. Malheureusement, on ne mélange pas sorcellerie et pouvoir de génie, il doit avant tout respecter les règles et rester un bon nombre d’années dans cette lampe, avant que quelqu’un le libère, ce que fera mon père en temps voulu. Si je fais le bilan de tout cela… je me rends compte que notre famille ne brille pas par ses réussites, mais plutôt par ses échecs, ce qui ne me rassure pas sur mon avenir de sorcière. Un sorcier n’est plus en sécurité dans le monde des humains. En temps normal, nous ne périssons que par les flammes, seulement dans l’autre monde, c’est différent, nous devenons aussi fragiles que ces gens, même si en âge, nous vivons plus longtemps. D’après mon père, il n’est jamais bon d’approcher les vivants, je vais finir par le croire, pourtant la curiosité me titille, cet intérêt grandissant, de découvrir toutes ces beautés cachées…

Contrairement à mes parents, je n’ai pas un fond mauvais, malgré une apparence sombre, je suis plutôt douce au grand désespoir de ceux-là. Voilà pourquoi, alors que j’approche de ma dix septième années, ils souhaitent me marier au sorcier Dargor, aussi démoniaque et malsain que l’était le seigneur des ténèbres (oncle de papa) avec Taram qui n’allait nulle part sans son chaudron magique. À l’inverse de mes parents, qui eux s’amusent de sortilèges, certes parfois déroutants, lui aime faire le mal et y prend plaisir, violent, méprisable et affreux serait les trois mots phares résumant sa personne. Mes parents pensent qu’en me mariant à cet horrible personnage je serais enfin digne de la lignée. Je sais qu’ils m’aiment à leur façon, j’ai eu l’amour d’une mère affectueuse et la protection d’un père, mais est-ce ma faute si ce côté maléfique ne m’attire pas plus que ça. Chacun à sa place, voilà les paroles de mon père, tu es une sorcière et tu dois rester parmi les tiens. Au plus profond des entrailles de la Terre, là où tout est sombre et lugubre se dresse notre royaume, et moi je rêve de voir le ciel bleu, les nuages et la lumière, toutes ces couleurs réservées aux humains. Mes pouvoirs sont immenses, sortilèges et magies noires font partie de mon quotidien, mais je me sens dépérir et mourir à petit feu. Ce jour-là, je décide de prendre mon destin en mains, me marier, oui, j’y suis obligée, mais pas avant d’avoir découvert ce monde qui m’est interdit. Comment passer inaperçue aux yeux des gardes ? Après m’être enfermée dans la salle des ensorcellements, je m’entoure de potions, et récite incantations et formules. Ma peau se recouvre alors de plumes fuligineuses, mon corps prend l’apparence d’un oiseau digne et puissant, je m’envole enfin par une des lucarnes sous les traits d’un corbeau aussi noir et funeste que les entrailles de mon royaume. Je vole, je vole vers le ciel, me gorgeant des odeurs environnantes, l’air doux qui me frôle, me caresse, m’emprisonne pour finir par envahir mes sens. Je suis si heureuse, peut-être pourrais-je rester ainsi le restant de mes jours, j’aime le croire, le visualiser, même si je sais que ce n’est qu’un rêve. Ne m’imaginant pas bonne, j’espère malgré tout avoir un peu d’humanité au fond de moi, un reste de bonté, même si encore une fois je me forge de vaines chimères.

Ce jour-là, j’ai découvert celui qui aurait pu être, si j’avais eu le choix, l’homme de mes rêves, le prince de mon cœur. Cet être que j’observais se baigner, nu comme un ver, était magnifique. Perchée sur une des branches d’un arbre voisin, je l’observais, me délectant de chaque partie de son corps qui sortait de l’eau. Seul témoin de cette scène délectable, un petit écureuil qui piaillait pour me faire déguerpir de son territoire.  Cet adonis ne ressemblait pas au prince charmant proprement parlé. Il avait la peau de la couleur du pain d’épice, lisse et tendue, ses yeux verts m’impressionnaient, aussi limpides que les profondeurs du lac dans lequel il s’immergeait. Chez nous, tous avaient les yeux aussi noirs que l’enfer, sauf moi, mes parents aimaient à dire qu’ils avaient la couleur de l’or en fusion. Même ses cheveux pourtant noirs me paraissaient encore différents des miens, si brillants, qui avec les rayons du soleil prenaient des reflets bleutés. Pour épicer le tout, ce spécimen de la perfection avait également un corps mince et musclé, qui donnait envie de toucher chaque partie de son anatomie.

Qui était-il ? Je décidais d’en avoir le cœur net !

Je récitais l’incantation à l’envers pour rompre le charme, sans réfléchir un instant de l’endroit où je me trouvais, en l’occurrence sur une branche. Je me retrouvais donc nue et déstabilisée, n’ayant jamais fait preuve de talent manifeste pour l’harmonie de mouvement, je sentais la chute imminente. Je perdais l’équilibre pour tomber au sol dans un enchevêtrement de membres et de cheveux, sans oublier le cri fort peu féminin qui accompagnait le tout.

- Qui est là ?

Comment me sortir de ce pétrin ? J’étais tellement paniquée et gênée qu'aucune formule de secours ne me vînt. Je volais donc l’idée de la petite sirène et décidais de ne plus parler. L’homme jailli de l’eau, dans son simple appareil, s’approcha pour s’accroupir devant moi, un petit sourire admiratif étirait ses lèvres sensuelles. Je changeais de couleur pour devenir cramoisie, toujours muette. Il faut savoir que les règles chez les sorciers sont différentes. Une sorcière peut, si elle le désire, succomber à toutes les tentations, c’est même recommandé, surtout les tentations sexuelles. Lorsqu’elle prend mari, elle doit être expérimentée pour séduire l’homme qui partagerait sa vie, jusqu’à le rendre fou de désir et d’amour, d’où l’importance d’une maturité sexuelle. Pourtant, j’étais encore vierge, même si ma mère pensait le contraire. Tous mes récits sur mes rencontres d’un soir étaient bien évidemment inventés et fantasmés.

- Tiens ! Une apparition s’exclama-t-il en levant une mèche de mes cheveux qui cachait mon visage écarlate.

Mais qu’il était beau, comment un simple mortel pouvait me mettre dans cet état ?

Je décidais de reprendre mes esprits et de me montrer digne de mon nom. Je sentais une légère perversion envahir mon corps, ce serait lui, le premier qui pourrait m’apprendre les joies du sexe. Comme s’il devinait mes pensées salaces, son regard se fit plus perçant, plus profond. Il ne devait pas être homme à se faire dominer.

Je me levais finalement, lui ne bougeait toujours pas, il se retrouva par la même occasion devant mon sexe impatient, à la hauteur de son nez. Quelques frissons se mirent à parcourir mon corps impatient, les battements de mon cœur s’accélérèrent, je me sentais déjà humide et chaude à l’intérieur. J’attendais qu’il se décide, qu’il prenne les rênes. Ses yeux fixèrent ma toison bouclée quelques secondes, il leva ensuite son regard pour le planter dans mes yeux. Toujours accroupi, il n’en restait pas moins majestueux, il donnait l’impression d’un fauve prêt à bondir sur sa proie, moi. Ses yeux se portèrent à nouveau vers ma villosité alléchante et lorsque je sentis ses mains attraper délicatement mes cuisses, les écartant légèrement pour lui faciliter le passage jusqu’à mon antre, mes lèvres ne purent s’empêcher de trembler, incontrôlables. Son visage se perdait entre mes jambes, sa langue chaude et impertinente fouillait mon sexe pour enfin trouver l’endroit le plus sensible de mon anatomie. Je m’appuyais contre l’arbre qui heureusement se trouvait juste derrière moi et me noyais dans cette euphorie voluptueuse. Les gémissements qui s’échappaient de ma bouche l’excitaient, le poussaient à approfondir ses caresses grisantes et enivrantes. Je baissais mon regard vers lui pour ne voir que ses cheveux d’ébène que je caressais, emmêlant ses mèches rebelles, pour finir par les tirer légèrement, lorsque je sentis l’orgasme prêt à jaillir. Il attrapa fermement mes cuisses laiteuses avec plus de frénésie, approfondissant ses attouchements, me plaquant avec force contre l’écorce rugueuse. Sa langue accélérait son mouvement et ce qui commençait par une douce valse romantique se termina par un tango endiablé.

 Mon cri passionné annonciateur de cet orgasme dévastateur me rendit fébrile et me laissa sans force. Il continuait ses douces caresses, toujours avec sa langue, passant de mon ventre frémissant, jusqu’à mes seins gonflés de désir qu’il mordillait, léchait, malaxait, m’offrant par la même occasion un nouvel orgasme qui m’acheva. Il était à présent debout devant moi, vigoureux et redoutable, son sexe érigé contre mon ventre, réclamant l’assouvissement d’un besoin passionné. Il effleurait ma joue de ses doigts longs, captura mon menton solidement pour ensuite m’embrasser fougueusement, je sentais l’odeur de mon sexe dans sa bouche qui m’excitait encore plus. Il attrapa mes fesses à pleine main, caressait leur bombé, laissant glisser ses doigts entre celles-ci, puis il suivit le chemin qui les mena à mes cuisses, qu’il empoigna pour me porter. Instinctivement je nouais mes jambes autour de son flanc. Il continuait ses baisers machiavéliques, dans mon cou, derrière l’oreille, à l’intérieur aussi, mimant une pénétration avec sa langue. Il me tenait en son pouvoir, c’est comme ça qu’il me pénétra, soumise et domptée. Son regard s’assombrit, sa tête partit en arrière, puis il me fixa à nouveau intensément.

- Tu es vierge ?

- Non, je ne le suis plus depuis une seconde.

- Tu parles finalement ?

- C’est la raison que j’ai perdue, pas ma voix.

Il me souriait, s’enfonçait un peu plus profondément, étouffant mes gémissements de ses lèvres troublantes puis commença un va-et-vient délicat. La douleur du début laissa bientôt place à un plaisir sans nom, indescriptible et nouveau. Il accélérait, chaque nouveau coup de reins me laissait un peu plus soumise à cette euphorie qui montait et montait, toujours plus puissante, me laissant dépendante de quelque chose de plus fort, de plus intense. Je me cambrais et me contractais lorsque finalement l’orgasme me dévasta, au même instant son grognement me fit réaliser qu’il jouissait en moi. Il envoya sa semence en moi tel le volcan qui éjecte sa lave en fusion, me laissant fiévreuse et ébranlée. Il haletait, la chaleur de son souffle humidifiait la vallée entre mes seins, là où reposait sa tête. Il me posa délicatement sur le sol, s’appuya contre mon corps, et me caressa à nouveau la joue.

- Je veux te revoir, laisse moi te raccompagner, il est tard.

Tard ! Tard ! Mince il me fallait partir,  le banquet des sorciers se déroulait le soir même et je devais d’être présente. Je le poussais presque brutalement et partis en courant.

- Hey ! Attends !

Je courais, cheveux au vent, ne prenant plus la peine de cacher ma véritable identité. Je récitais la formule et m’envolais sous les yeux de l’homme ébahi.

Demos observait l’oiseau qui s’éloignait au loin un sourire aux lèvres.

- Qui es-tu petite sorcière ? murmura-t-il.

Il se rhabilla prestement, tout en continuant à fixer l’horizon, lorsque son regard fut attiré par une plume au sol que l’oiseau funeste avait laissé sur son sillage. Il la ramassa, l’observa, la passa sous son nez pour la humer.

- Tiens tiens, je vais peut être découvrir ton identité ma beauté venue d’ailleurs.

Ailleurs, et il savait d’où, du royaume funeste, celui qu’il avait fui des années auparavant. Le territoire des sorciers, celui de Cyriaque et Elopha.

Il gardait de très mauvais souvenirs de cet endroit, de son père surtout qui le poussait à devenir aussi machiavélique que lui. Utilisant la souffrance des autres, en l’occurrence ceux du royaume voisin, les humains, pour se nourrir. Il ne supportait plus cette vie emplie de méchanceté, de haine et de douleur. Il se savait douer en sorcellerie, peut être même plus que son père et d’après Cyriaque qu’il avait rencontré une seule fois, ses pouvoirs pourraient avec le temps devenir bien plus puissant que les siens. Peut être aurait-il pu devenir son digne héritier, à l’époque le roi n’avait pas d’enfants. Tout cela était si loin, dix-sept ans qu’il était parti, qu’il s’était échappé, pour mener la vie simple d’un humain, se forçant même à travailler pour se fondre dans la masse. Entre temps, ses pouvoirs n’avaient fait que s’amplifier, il le savait, le sentait, même s’il s’interdisait de les utiliser. Un jour il lui faudrait partir loin d’ici, car contrairement aux humains, les sorciers avaient une espérance de vie beaucoup plus longue. Demos était parti du royaume le jour de ses dix-sept ans, renié par son père puisqu’il vivait en dehors du royaume, il abandonnait donc tous ses avantages et chose surprenante, maintenant qu’il y repensait, grâce à l’entrée en scène de cette jeune sorcière, il se rendait compte que cela faisait également dix-sept ans qu’il vivait parmi les humains. Il avait trente-quatre ans et savait qu’il vivrait six fois cet âge-là. Cette jeune femme dont il ne connaissait pas le nom, mais dont l’odeur le rendait fou devait être une sorcière puissante, malgré son jeune âge, sa transformation le prouvait. Certains sorciers essayaient des siècles avant de réussir pareil subterfuge.

Mais pour l’heure, il devait renouer avec ses pouvoirs, afin de connaitre l’identité de la jeune femme, il disparut dans un brouillard, heureux de ce petit, très petit défi, car il savait trouver rapidement les réponses à ses questions.

- Calypso ? Je te trouve plutôt absente ce soir ? N’aurais-tu pas quelque chose à m’avouer ?

- Pardon ? Euh, non.

Calypso évitait de regarder sa mère dans les yeux, car l’un des pouvoirs de celle-ci était de lire dans les pensées des autres, même si Calypso était devenue maitre en matière de camouflage. Sa mère très belle, avait des yeux aussi noirs que l’abime, une peau si blanche qu’elle en paraissait transparente et des lèvres aussi rouges que le sang. C’était une femme magnifique et son père avait succombé dès leur première rencontre. D’après ses dires, elle l’avait laissé miroiter des semaines avant de l’accepter dans sa couche, s’amusant à le rendre jaloux, n’hésitant pas à s’afficher avec tous les sorciers du royaume. Finalement, Cyriaque était entré de force dans sa chambre pour lui montrer que lui seul serait capable de la satisfaire… et cela avait marché. Elle ne savait pas ce que son père avait pu lui faire, plus que les autres dans cette chambre, toujours est-il que sa mère ne l’avait plus jamais quitté.

- Regarde ton père disait-elle, comme il est beau et vaillant, regarde le ma chérie et sois fière de lui et de l’homme qu’il t’a choisi, un sorcier puissant…

Calypso n’était pas vraiment convaincue.

Là où son père était fort et prestigieux, son fiancé était petit et décrépi…

Là où son père était beau et séduisant, son fiancé était aussi repoussant et laid qu’un crapaud bourré de verrue…

Là où sont père possédait prestance et magnétisme son fiancé n’avait que lourdeur et vulgarité…

Là où son père avait charisme, son malheureux fiance n’avait que répulsion…

Je jetais un coup d’œil de travers à ma mère.

- En êtes-vous sure mère ?

Devant la mine désabusée qu’affichait Elopha, elle sut que sa mère se rangeait du même avis qu’elle en ce qui concernait les avantages de son promis. Il n’avait qu’une chose à vrai dire de talentueux et de magnifique, ses pouvoirs gigantesques, encore qu’il était très loin d’égaler le roi en ce qui concernait la sorcellerie.

- Et bien…

- Oui mère, insistais-je ironique.

Sa mère secoua sa main fine, une étincelle flamboyante jaillit juste au-dessus de ses doigts lorsqu’elle les claqua.

- Allons ma chérie, rien ne t’empêche d’user de tes pouvoirs pour faire apparaitre l’image d’un bel étalon lorsque tu feras l’amour avec ton mari. J’avoue ne jamais avoir eu recours à ce stratagème avec ton père minauda-t-elle en dévorant son mari des yeux.

Comme attiré par une force invisible, celui-ci s’arrêta de parler et détourna son regard de l’assemblée pour le plonger dans celui de sa femme, brulant et passionné.

- J’aurais préféré ne pas user de mes pouvoirs lors de mes échanges amoureux.

- Pardon ? répondit sa mère qui continuait de dévorer son mari des yeux, allant même jusqu’à passer sa langue sur ses lèvres pulpeuses.

- Rien mère… rien ! Murmurais-je en levant les yeux au ciel.

 Je posais le coude sur la table, appuyant mon menton sur ma main et laissais s’échapper un souffle déprimant.

Ma mère abandonna finalement mon père quelques instants, pour enfin se concentrer sur moi à nouveau.

- Allons ma chérie, tu sais que nous t’aimons, et que nous faisons cela pour ton bien.

- Alors, laissez-moi choisir !

Justement, tu n’as pas à choisir hurla-t-elle, en se levant d’un bon, faisant tomber au passage tous les tableaux de la salle de banquet.

Mon père observait la scène qui se déroulait sous ses yeux, les sourcils froncés. Il n’aimait pas voir sa femme sous l’emprise de la rage, il connaissait ses colères démesurées. Elle pouvait en quelques secondes réduire à néant tout un royaume si elle le désirait.

- Tu es une sorcière et de ce fait tu dois rester une sorcière machiavélique et perfide. Si moi j’ai pu choisir mon mari, c’est uniquement parce que je me tenais à ce rôle, ce qui n’est évidemment pas ton cas, à mon grand désespoir. Je t’aime et je t’aimerais toujours déclara-t-elle presque gémissante, mais tu resteras parmi les tiens ! Suis-je assez claire ma fille ?

Changement de ton, de gémissante la voilà qui devenait autoritaire, presque tyrannique, pour preuves les chaises qui commençaient à trembler, les tables, ainsi que les murs. Ma mère contenait sa fureur. Je me sentis obligée d’approuver pour calmer sa rage grandissante.

- Oui mère dis-je en baissant la tête en un signe de soumission.

- Que se passe-t-il ma chérie, murmura mon père, en embrassant ma mère derrière l’oreille.

 Il savait comment la calmer, celle-ci s’apaisa en quelques secondes face au charme de son mari. Il était beau c’est vrai avec sa couronne qu’il portait fièrement, ses yeux étirés en amande et sa barbe sombre taillée avec classe. Il était grand et fort et contrairement à ma mère qui laissait ses humeurs prendre parfois le dessus, lui gardait toujours son calme, mais il n’en paraissait que plus impressionnant, car lorsqu’il perdait sa patience légendaire, il déclenchait des tempêtes et des cyclones, juste en clignant des yeux, quelle famille !

- Rien mon amour, c’est réglé, n’est-ce pas ma chérie ?

- Oui mère.

- Bien ! Tu peux annoncer les fiançailles maintenant…dit-elle avec entrain.

- Calypso ?

Il fixait mon regard avec insistance, il souhaitait que je confirme les dires de ma mère en acquiesçant, ce que je fis.

- Très bien.

Il prit place devant son siège royal fait du bois le plus noir, au grain uni, l ébène qui était aussi dur que la pierre. Un fauteuil très imposant, avec une énorme tête de taureau qui habillait le dossier, deux cornes de bouc se trouvaient au bout de chaque accoudoir. Le tout était incrusté de rubis et de diamant. Ce siège, où elle se blottissait enfant, lorsqu’elle s’éclipsait, n’hésitant pas à user de ses pouvoirs pour échapper à la surveillance des gardes et surtout de ces professeurs de sorcellerie trop ennuyeux. Elle se rappelait ces moments de tendresse, lorsque son père la prenait sur ses genoux, la laissant gouverner l’espace de quelques instants.

Elle fut sortie de ses visions utopiques par la voix grave de son père.

« Sorcières sorcier, j’ai l’immense honneur de vous annoncer les fiançailles de ma très chère fille Calypso avec notre puissant ami Dargor, en espérant que cette union puisse engendrer de nombreux héritiers plus redoutables que nous tous réunis, assurant ainsi la perpétuité de notre race »

Il y eu des « oh » et des « ah » puis des applaudissements, Dargor se dirigea vers moi et me tendit la main, que je pris avec dégoût. Puis devant toute l’assistance, nous fîmes une révérence.

Mon père continua son discours.

« Nous célébrerons le mariage, lors de notre prochaine messe noire, en l’honneur de notre Dieu cornu qui je l’espère portera chance à nos deux élus. Ce mariage sera donc solennisé au prochain sabbat, veille de la prochaine fête chrétienne. »

Des cris et des ricanements explosèrent dans la salle, tous se réjouissaient du prochain sabbat qui tombait au moment de l’équinoxe, tous appréhendaient cette fête, lieu de débauche, de banquets et surtout d’orgie.

C’en était trop pour elle, elle décida qu’elle en avait assez supporté, elle lâcha la main de son fiancé grabataire, se tourna pour partir, la tête haute. Tous s’écartèrent sur son passage, impressionnés et quelque peu effrayés devant son regard en flamme. Quiconque se permettrait une remarque serait brûlé sur place. Elle partit, sa cape noire volant derrière elle, sa robe fendue à l’avant par deux ouvertures, laissait entrevoir ses cuisses longues et fuselées. Ses cheveux lâches formaient une auréole tout autour d’elle, comme pour la protéger.

À cet instant, tous les sorciers se seraient agenouillés devant elle, hypnotisés par sa beauté machiavélique. Et celui qui se cachait derrière les lourdes tentures noires qui décoraient les fenêtres n’échappait pas à la règle.

- Je reconnais bien là ta fille légitime, ma chère.

Elopha se tourna vers son mari et sourit en coin.

- Ses pouvoirs grandissent de jour en jour. Elle essaie de les contenir, mais on ne change pas sa vraie nature.

- Très juste, laissons-la.

Demos n’en revenait pas de ce qu’il venait de voir. Cette femme excitante, aux allures de reine était-elle bien la jeune fille à qui il avait fait l’amour quelques heures plus tôt ?

Il n’avait effectivement pas mis longtemps à comprendre qui elle était, une des sorcières du royaume diabolique. Après avoir fait quelques recherches grâce à la plume qu’il avait récupérée, il pensait s’être trompé sur son identité et voulait en avoir le cœur net. Il avait découvert qu’elle était la fille de Cyriaque et Elopha, ce qui d’après lui était inconcevable. Il voyait là, une femme passionnée qui se laissait envahir par ses émotions, sensuelle et terriblement sexy, très loin de la jeune fille inexpérimentée du lac, pourtant, c’était bien elle et elle allait se marier avec Dargor ! Son père ! Quelle idée ! Son père était bien trop vieux pour cette jeune donzelle. Il devait la voir pour lui parler, mais surtout, il souhaitait lui faire l’amour, encore et encore. Elle était vierge lorsqu’elle s’était donnée à lui, et contrairement aux autres sorciers, il n’attendait pas de sa future femme une expérience sexuelle, il désirait apprendre lui-même à celle qu’il choisirait, les joies et les découvertes de l’amour, elle lui appartenait à présent. Caché derrière sa cape, il se dirigea vers les appartements de la très belle Calypso, tous étaient trop occupés à fêter les fiançailles de la fille du roi pour s’intéresser à lui, et heureusement d’ailleurs, car il savait ne pas être le bienvenu.

Calypso tournait et tournait dans sa chambre, des éclairs sortaient de ses yeux et foudroyaient tous sur leur passage, elle tendit ses bras de chaque côté de son corps et récita quelques formules pour se libérer de cette haine des traditions. Lit, table de chevet, miroirs, chaises, commodes, commencèrent à voler dans la pièce.

« Nojes crotevmas lumisa » tout commença à tourner dans la chambre, le vent jailli par une des fenêtres faisant tourbillonner ses cheveux. Elle n’arrivait plus à contenir cette rage qui était en elle.

- Ola ! Ola ! Hurla une voix.

Elle se tourna prête à tuer l’opportun qui osait l’interrompre.

C’était lui ! Tout s’arrêta d’un coup, les meubles tombèrent en un fracas assourdissant, Demos ferma la porte rapidement, priant pour que ce brouhaha n’ait pas alerté les gardes. Il colla son oreille à la porte, intimant à la jeune femme de se taire, ce qu’elle fit, trop surprise de voir ce jeune humain dans sa chambre, au royaume des sorciers. Aucun humain ne pouvait atteindre ce royaume caché de tous, sauf si l’humain en question était lui même…un sorcier !

Une fois le danger écarté, il se tourna vers la jeune fille qui avait repris une apparence presque angélique.

- Calypso ?

Il savait qui elle était !

- Si j’avais su, continua-t-il.

Comment ça « si il avait su » aurait-il ou n’aurait-il pas couché avec elle ?

- Qui êtes-vous ? Demandais-je.

- Demos.

Demos ! Elle n’avait jamais entendu parler d’un sorcier du nom de Demos.

- Comment êtes-vous arrivé jusqu’ici ?

- Tu connais la réponse.

- Bien sûr ! Vous êtes un sorcier !

- C’est exact ! dit-il tout sourire.

Et ça le faisait rire, de lui avoir menti ! Même si en y réfléchissant elle était elle aussi d’une sournoiserie évidente.

- Je connais tous les sorciers de ce royaume et tu n’en fais pas partie, je le saurais.

- Vraiment ! Dit-il en levant un sourcil interrogateur, et comment en es-tu si sure ?

Comment lui avouer que son regard, son corps et sa prestance ne pouvait pas passer inaperçue. Que si elle avait découvert son existence parmi les sorciers, elle se serait donnée à lui bien avant.

- Et bien…

Il éclata d’un rire sonore en s’approchant d’elle telle une panthère fondant sur sa proie.

- Moi je connais la réponse dit-il en effleurant sa bouche de son souffle. Si tu avais su qui j’étais, tu serais venue à moi, tu te serais donné bien plus tôt, n’est-ce pas ?

- Oui dit-elle conquise.

Il l’embrassa à pleine bouche, la laissant brûlante de désir. Il fit glisser sa robe, murmurant contre ses lèvres quelques paroles inintelligibles.

« Ares tenos deramis », sa voix virile qui prononçait ces paroles magiques l’ensorcelait. Il répéta encore une fois ces mêmes paroles et tout le mobilier reprit sa place, le lit également sur lequel il la poussa délicatement, s’appuyant de tout son poids sur elle, la dévorant de baisers, puis il descendit encore plus bas. Elle écarta tout naturellement les cuisses pour l’accueillir, il ne se fit pas prier et dévora son sexe palpitant, jouant avec son clitoris jusqu’à la voir se cambrer, crier, pour finalement s’envoler vers le septième ciel, si loin des profondeurs de son royaume. Il voulut la pénétrer, mais elle le poussa sur le dos, il se laissa faire, un sourire en coin. Elle goûta sa peau, se perdit dans la douceur des poils de son torse, descendit encore plus bas, là où cette pilosité ne ressemblait plus qu’à une simple ligne duveteuse, puis plus bas encore. Elle lécha son sexe érigé, suça son gland tendu, sa langue glissa le long de sa chair, caressa au passage ses bourses pleines, pour remonter encore le long de cette érection. Il respirait avec difficulté, se cambrait sous les assauts de sa langue de feu. Elle le prit finalement à pleine bouche et commença ses vas et viens obsédants. Doucement au début, elle accéléra rapidement. Il la poussa à arrêter cette douce torture de peur d’en finir avant l’heure. Il la tira par les cheveux, apprivoisant sa bouche inexpérimentée, mais tellement excitante. Elle se mit à califourchon sur lui et s’empala, poussant un gémissement de plaisir. Ils commencèrent cette danse de l’amour, avec douceur pour terminer avec acharnement, toujours plus fort, plus puissant, jusqu’à se noyer dans les vagues de la passion. Ils jouirent ensemble, dans cet imbroglio de sueurs, de cris et de douce euphorie.

Elle reposait maintenant sur lui, ses cheveux formaient une corole autour d’eux, comme un voile protecteur.

- C’est mon père que tu épouses.

- Quoi ! Mais Dargor n’a pas de fils, je le saurais.

-  Il m’a rejeté, enfin… je suis parti et de ce fait, je suis renié, cela fait dix-sept ans. Voilà pourquoi tu ne me connais pas, tu n’étais pas née.

- Mais je ne veux pas épouser ton père ! M’exclamais-je presque en pleurs.

- Je sais, enfin je m’en doute et tu ne peux fuir ce château, tu es l’héritière.

- Je ne suis pas comme eux, je n’ai pas ce côté maléfique.

- Vraiment ? demanda-t-il ironique, ce n’est pas l’impression que tu donnais lorsque je suis entré dans ta chambre.

- Et bien… j’étais très énervée.

Son sourire s’élargit, devant ce manque de bonne foi.

- Écoute-moi, je dois partir, mais ne t’inquiète pas, tu n’épouseras pas mon père, c’est une promesse.

- Les sorciers ne tiennent jamais leurs promesses marmonnais-je méfiante.

- Moi si ! répondit-il le regard impassible. Aie confiance en moi.

 Il se leva, s’habilla, sans la lâcher du regard, puis s’assit sur le bord du lit.

- Au prochain sabbat, tu seras à moi, il scella ce pacte d’un baiser, lui mordit la lèvre pour goûter son sang. A son tour il se fit une entaille au poignet qu’il lui fit lécher. Son sang était doux et chaud. Elle sentit comme une force intense envahir son corps.

- Nous sommes unis maintenant, tu m’appartiens, souviens-toi de ces paroles.

Puis il disparut en fumée, la laissant seule et désemparée.

Le lendemain, Calypso décida qu’elle souhaitait en savoir un peu plus sur Demos et chercha son père pour le questionner.

Il se trouvait dans un des grands bureaux, entourés de trois dogues aussi noirs que l’enfer, mais qui elle le savait avaient un cœur d’or. À son approche ils vinrent se coller à elle, réclamant quelques caresses.

- Père, je souhaiterais vous parler.

- Je suis toujours présent pour toi ma fille.

Les chiens qui ne lâchaient pas la jeune fille se firent arroser à coup de seaux d’eau, qui apparurent juste au-dessus de leur gueule.

Devant le rire de mon père, je sus qu’il n’était pas étranger à cette blague.

- Qui est Demos ?

- Demos ! hurla-t-il de sa voix de ténor. Demos est un paria, il ne voulait pas suivre les règles de la sorcellerie. C’est le fils de Dargor, il l’a humilié en prétendant ne pas faire partie de notre communauté.

Il se leva, marcha de long en large. Elle observait son père qui paraissait attristé. Il ne disait pas tout.

Il se laissa tomber sur son trône, exténué, il  paraissait porter tous les malheurs de l’univers sur ses épaules. Son père était épuisé.

- Viens près de moi Calypso.

Je me précipitais vers le siège à côté du sien, impatiente de connaitre l’histoire de mon amant.

- Demos est mon fils.

Tout tourna autour de moi, je m’attendais à tout, sauf à cet aveu. Mais comment était ce possible ? Il ne pouvait pas…

- Avant de connaitre ta mère, je me suis entiché d’une femme, une humaine, elle s’appelait Alliance, nous avons vécu une passion et Demos est né de cette liaison. Très tôt il a montré un certain talent pour la magie, ses pouvoirs étaient déjà énormes, malgré son sang mêlé. J’ai dû le prendre avec moi à la mort d’Alliance, il était trop dangereux de le laisser parmi les humains. Je l’ai confié à Coramis, une femme de qualité, sorcière, mais très aimante. Je ne pouvais pas en tant que roi mettre sur le trône un sang mêlé, sans connaitre l’étendue de ses pouvoirs. Tu comprends, seul un sorcier plus puissant que les autres est en droit d’accéder au trône après moi.

Il prit un moment de réflexion, effleurant sa barbe, pensif. Puis reprit son histoire en fermant les yeux.

- Entre temps Coramis s’est mariée avec Dargor, qui selon la loi des sorciers à deux choix lorsqu’il y a enfants, ou il l’accepte, ou il le tue. Il l’a gardé face à mon insistance, j’ai expliqué à Dargor que Demos avait des pouvoirs qui grandissaient chaque jour un peu plus, ce qui était vrai et que de ce fait il serait un allié de taille pour notre royaume.

Malheureusement Demos ne s’entendait pas avec son père et à l’âge de dix-sept ans il est parti. Il a toujours été attiré par les humains, très probablement à cause du sang de sa mère. Toujours est-il qu’il a disparu et que je n’ai plus jamais eu de nouvelles. Ensuite j’ai connu ta mère m'expliqua-t-il.

Il me prit le menton en un geste de tendresse

- Et depuis, aucune femme n’a été à sa hauteur dans mon cœur, tu es la preuve de notre amour.

- Et maman ? Est-elle au courant ?

- Non bien sûr que non, ta mère se serait vengée sur cette humaine.

- Mais elle est morte, tu me l’as dit.

- Oui, de maladie, mais je n’ai jamais osé lui dire que j’avais un fils, surtout un fils à moitié humain. Tu connais ses humeurs ? Et puis tout cela s’est passé bien avant elle, il y a si longtemps…

Je laissais mon père les larmes aux yeux, complètement replié sur lui-même. C’était la première fois que je le voyais si triste.

Je savais que le mariage entre frères et sœur chez les sorciers n’était pas interdit, donc il devait être possible entre demi-frères et demi-sœur. Mais il y avait un problème, Demos était moitié humain… était-il à la hauteur des pouvoirs de mon père ? Probablement que non. Mais alors comment pouvait-il prétendre empêcher ce mariage et par la même occasion monter sur le trône ?

Celui qui épouserait la fille du roi devait être de pouvoir équivalent ou surpasser ceux du roi lui-même. Je commençais à douter, puis finis par me remémorer les paroles de Demos « aie confiance en moi »

Le temps passait à une vitesse hallucinante et le jour de mes noces approchait à grands pas. Ma mère tournait en tout sens autour de moi, habillée de ma robe de marié, je la laissais papillonner et déballer son flot incessant de paroles que je n’écoutais pas. Les aiguilles travaillaient toutes seules, sous le regard aiguisé de la reine qui veillait à me rendre la plus belle possible. J’attendais debout, tendue, que ce moment ennuyeux se passe. Ma mère leva un doigt et ma robe glissa le long de mon corps, découvrant mes dessous. L’énervement me gagna et d’un claquement de doigts, je fis redescendre l’étoffe arachnéenne, des flammes dans les yeux.

- Du calme ma chérie, on dirait moi il y a dix-sept ans, le jour de mes noces avec ton père, excitée et tendue. Je souhaitais juste savoir avec quels artifices tu allais rendre fou ton mari et je ne suis pas déçue après ce que je viens d’apercevoir. Jarretelle en dentelle, bas noirs… j’imagine à quoi doit ressembler le haut dit-elle coquine.

- Maman ! Dis-je en gémissant, est-ce bientôt finit ?

Elle tourna autour de moi quelques secondes, un de ses doigts aux ongles longs carminés, posé sur ses lèvres purpurines.

- Il ne te manque plus que le voile, ma sorcière bien-aimée.

Elle fit apparaitre un miroir juste devant moi, et je me vis pour la première fois. Toute de noire vêtue, ma robe n’en était pas moins magnifique et osée. Une robe sirène ! Il ne manquait plus que ça, penser à Ariel le jour de mes noces. Cette œuvre, car c’en était une, moulait mon corps parfait, laissant entrevoir ma peau à travers la dentelle. Les dessous se voyaient, ce qui me rassurait finalement, cachant un peu mes formes aux regards concupiscents. Ma mère me fit une moue désabusée.

- Puis je me permettre une petite remarque ?

J’acquiesçais, trop pressée d’en finir.

- Sans les dessous, cela serait bien plus… excitant et cela mettrait en valeur cette robe

- Mère si j’enlève ces dessous, je n’ai plus qu’à me présenter nue à mon mariage.

- Quelle importance, les envieux seront vite écartés.

- Mais je ne veux pas ! Déclarais-je, énervée.

Et moi je te dis que tu m’écouteras, tu es encore sous ma responsabilité et en tant que digne fille de ta mère tu m’obéiras. Les fenêtres commençaient à trembler prémisse d’une colère imminente que je n’étais pas en état de dompter. Je décidais donc de calmer le jeu.

- Faite mère, faite comme il vous plaira…

Je n’eus pas le temps de terminer ma phrase que déjà mes dessous avaient disparu, je me retrouvais non pas en robe de marié avec dessous, mais en dessous sans robe de marié. La robe elle-même ressemblait à un déshabillé affriolant. Mais je du me ranger de l’avis de ma mère, c’était bien plus harmonieux.

Le sabbat battait son plein, et l’heure de la communion était proche, je cherchais du regard Demos qui brillait par son absence. « M’aurait-il abandonnée » après tout, il n’avait pas parlé d’amour.

Je me retrouvais donc près de Dargor qui paraissait idiot dans sa toge noire ridicule. Mon père face à nous commençait à réciter les paroles de sacrement. Lorsqu’un coup de vent alerta l’assemblé. Ma mère la première inspecta de son regard l’ensemble des invités, suspicieuse. Son regard stoppa devant l’énorme statue représentant notre Dieu crochu, prête à bondir.

- Là ! hurla-t-elle.

À ce moment, Demos sorti de l’ombre, un sourire aux lèvres, presque nonchalant.

Mon père s’approcha doucement.

- Demos ?

- Cyriaque, heureux de te revoir.

« Demos ! » Hurla une voix.

- Père, je ne pourrais pas en dire autant de vous.

- Que fais-tu là ? Je t’ai renié, tu mérites la mort pour avoir l’audace de te présenter devant moi et le jour de mes noces en plus.

- Justement père, il y a un léger problème, vous épousez ma future femme qui en passant est bien trop belle pour partager votre couche. Vous n’êtes pas à la hauteur pour succéder à Cyriaque.

Dargor faillit s’étrangler de rage.

- Tu te crois peut-être plus qualifié pour ce rôle ? Ingrat ! Cracha Dargor.

- Je me crois bien plus qualifier que vous dans tous les autres domaines, en plus de celui-ci répondit-il moqueur.

Les autres sorciers présents s’écartèrent, laissant place au combat qui se préparait sous leurs yeux.

Cyriaque se plaça entre les deux hommes et hurla.

- Il n’y aura pas de combat le jour du sabbat, je ne le permettrais pas !

Demos se tourna vers le roi, s’agenouilla et baissa sa tête en signe de respect.

- Cyriaque, je souhaite garder Calypso pour moi seul, je souhaite l’épouser, laissez-moi vous prouvez que je suis à la hauteur de votre fille.

Cyriaque fixa le jeune homme avec insistance, puis plongea son regard dans celui de sa fille.

- Calypso ?

- Je ne veux pas épouser Dargor.

- Tu le feras s’il gagne ce duel ? demanda-t-il.

Elle regarda à son tour Demos qui lui répéta en mimant cette phrase qu’elle connaissait par cœur.

« Aie confiance en moi »

Elle n’avait plus aucun doute, elle se savait amoureuse de lui. Les sorciers n’ont pas besoin, comme les humains de temps de réflexion, ils savent prendre les décisions rapidement, les bonnes décisions.

- Oui père !

- Très bien !

Il se dirigea au centre de la grande salle, puis de sa voix forte et puissante s’exclama :

- Que le combat commence !

Tous s’écartèrent, seule Elopha resta au centre fixant le jeune homme de ces yeux de lynx. Elle s’approcha du jeune homme. Elle était grande, habillée de noir, impressionnante malgré sa finesse. Elle caressa la joue du jeune homme.

- Vous ne lirez pas en moi Elopha.

- Je m’en rends compte.

Elle haussa les épaules et déclara en partant, un petit sourire vicieux aux lèvres.

- Vous êtes peut-être digne de ma fille finalement, et elle éclata d’un rire aigu.

Demos ne bougeait pas, il restait au centre de la pièce, les bras le long du corps, la tête baissée. De son côté Dargor trépignait, heureux de donner sa raclée à ce freluquet trop sur de lui. Il roulait des mécaniques, s’amusant de quelques tours, jetant de-ci de-là des boules de feu pour impressionner la galerie, il décida de sortir le grand jeu lorsque ses pieds commencèrent à quitter le sol. Calypso commençait à se demander quand Demos aller réagir. Toujours dans la même position, il murmurait quelques incantations. Il leva finalement sa tête, ses yeux habituellement si clairs et si verts ressemblaient à présent à deux puits sombres, des larmes de sang coulaient sur ses joues, il leva les bras toujours en récitant ses incantations de plus en plus fortes. Toutes les fenêtres volèrent en éclat, une tornade entra dans la salle, dévastant tout sur son passage.

Ça alors ! Il avait le pouvoir du temps ! C’était un pouvoir colossal que seul mon père détenait. Dargor essaya de répliquer en récitant une de ses formules, se protégeant d’un bouclier invisible que la tornade dévasta en quelque seconde. Une fois la tornade passée, Demos se concentra à nouveau pour faire tomber une pluie de grêlons sur Dargor qui utilisa la parade de ses boules de feu pour les transformer en eau. Demos souriait comme s’il s’attendait à ce genre de réplique. À ce moment-là, des trombes d’eau envahirent la pièce, une vague plus haute et plus forte que les autres plaqua Dargor contre le mur derrière lui, là où se trouvait les épées, qui se tournèrent toutes vers Dargor, il s’empala dessus et hurla de douleur, il se retrouva en croix contre le mur. Demos s’avança vers son père de substitution, tendit l’un de ses bras, paume en l’air et tourna son poignet vers le sol. Dargor se retrouva tête en bas, l’inverse du christ, en signe de respect pour Calypso. Il termina en jetant une boule de feu sur son père qui s’enflamma. Ses hurlements emplirent la salle devant l’assemblée hypnotisée.

Devant le silence presque gênant, on entendit quelqu’un frapper dans ses mains, Elopha souriait au jeune homme, qui reprit ses esprits. Elle s’approcha frappant toujours dans ses mains puis l’embrassa sur la bouche.

- La coutume veut que la mère de la mariée goûte les lèvres de son futur gendre. Ma fille t’appartient.

Cyriaque regarda le jeune homme, mi-fier, mi-admiratif, et posa sa main sur l’épaule du jeune homme.

- En épousant ma fille, tu deviens mon fils et de ce fait mon héritier, sois le bienvenu chez toi.

Cyriaque fixait intensément son fils retrouvé, puis observa sa fille. Il venait de lui parler par télépathie, ce secret resterait entre eux. Calypso sourit et acquiesçât, lui montrant par ce geste son approbation.

- Ce n’est pas bien de faire des messes basses, tu sais que nous sorciers détestons ça

- Pas lorsque je les fais avec mon père, chère mère.

- Hum…c’est acceptable, je vais devoir séduire mon mari pour qu’il m’avoue tout.

Calypso souriait, il était peu probable que sa mère apprenne la vérité, même si elle ne doutait pas des talents de persuasion de celle-ci

Le mariage se déroula à merveille, l’ambiance battait son plein lorsque Demos décida que cela avait assez duré. Il porta sa femme et s’éloigna sous les acclamations des autres sorciers.

- J’ai eu envie de te déchirer cette robe toute la soirée.

- Tu es plus fort que ne l’est mon père, tu en es conscient ? Tu détiens la force du temps, c’est énorme.

- Je détiens la femme de mon cœur, c’est bien plus colossal.

- Nous retournerons au royaume des humains ?

- Tout ce que tu voudras, Calypso. Je t’aime, je l’ai su à l’instant où je t’ai vu. Toi seule possèdes le pouvoir de me rendre fou d’amour, j’ai encore le goût de ton sexe dans ma bouche.

- Je t’aime aussi.

Ils s’éloignèrent et disparurent dans un nuage de fumée…

La jeune femme était sur son mari, nue et offerte prête, à goûter au plaisir que celui-ci s’amusait à retarder.

Il claqua des doigts, affichant ce sourire coquin qui la rendait folle.

- Qu’est ce que c’est ? Demandais-je.

Demos fit apparaitre un foulard qui entre ses mains se mit à s’allonger, de plus en plus long. Il fit tout d’abord le tour du cou de la jeune fille gracieusement, passa derrière le lit, monta le long des colonnes du baldaquin pour revenir se placer dans les mains du jeune homme.

Il pénétra la jeune femme tout en tirant sur les pans du foulard. Elle stoppa, sentant la respiration lui manquer.

- J’étouffe ! Dis-je haletante.

- Allons ma chérie, tu sais aussi bien que moi, que les sorciers ne périssent que dans les flammes.

- Je le sais, mais pourquoi m’arrêter ?

- Personne ne te le demande, continu dit-il la voix tremblante de désir contenu.

Ce que je fis, malgré l’étau du foulard qui me retenait. Inconsciemment, sans m’en rendre compte, je sentais plus de désir à chaque nouvelle friction, il augmentait pour atteindre le point de non-retour. Plus il m’étranglait et plus mon plaisir s’intensifiait jusqu’à ce que nous jouissions à l’unisson.

Épuisée, je reposais sur son torse, mais une question me taraudait.

- Pourquoi as-tu été jusqu’à tuer ton propre père ? Demandais-je mal à l aise.

- Parce qu’il n’était pas mon père. C’est Coramis qui me l’a dit avant de mourir, je n’étais d’ailleurs pas son fils à elle non plus. Elle m’a avoué que ma vraie mère était morte de maladie.

- Et tu sais qui est ton père ?

- Un sorcier évidemment, un sorcier que je tuerai.

 Les yeux de la jeune femme s’agrandirent dans le noir, il dut sentir les tremblements qui parcouraient mon corps.

- Ça va ?

- Oui juste un peu froid.

Il claqua des doigts et une flamme jaillit dans la cheminée. Une douce chaleur envahit la pièce.

Le jour où je découvrirai son identité, je le combattrai et je le tuerai pour nous avoir abandonnés ma mère et moi.

Calypso sentit tant de rage dans la voix de son mari qu’elle eut peur. Peur de devoir un jour choisir entre son père le roi et son mari. Jamais ce secret ne devrait être découvert, elle y veillerait.

Elle ne dormit pas cette nuit-là…

  • Je me suis laissée totalement embarqué par ton histoire qui m'a captivé du début à la fin.
    En bref; j'ai adoré !!!
    cdc

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Img 0285 300

    thalia

  • Calypso est un superbe texte ¨-¨

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Image

    sandrinerebelle

  • Merci, oui une suite me tente, mais je manque de temps en ce moment. Heureuse qu'il vous plaise. L’histoire est différente, ça me pousse à emprunter d'autres chemins, il faut se diversifier pour progresser, merci encore :)

    · Il y a plus de 11 ans ·
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    Intrigante

  • Voila, je me suis laissé embarquer, transporter, ce conte est écrit avec une rare originalité, on pourrait s'attendre à du "déjà lu" mais non, ça fourmille d'idées, le rythme est constant et les 28 pages se lisent avec un bonheur sans fin. Vous êtes, décidément, en train de devenir un auteur de talent, je vous lis avec un plaisir plus intense à chaque fois et, ce, dans quelque domaine que ce soit. Vous maîtrisez l'obscur, la grâce ou l'érotisme avec un style qui frôle la perfection. Une suite s'impose, bien entendu, je ne saurais que trop vous conseiller de vous y mettre. Vraiment Audrey, je suis bluffé de tant de talent, merci de m'avoir poussé, ne pas lire ce conte aurait été une erreur sans nom...

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Clown 4 92

    arkhaam

  • Merci ma p tite Reine...plus de profondeur ? oh oui, c'est très profond hahahha, merci de ton commentaire ma belle, toujours présente ma première fan :)

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Fb img 1499274464706

    Intrigante

  • Hello, je te reconnais bien là, mais avec plus de finesse et de profondeur oserais-je dire. Bravo, tu continues sur ta lancée et ce thème fantastique te sied à merveille. Bisous ma Blonde et félicitations.

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Coeur orig

    Danielle Guisiano

  • Merci de ce commentaire et surtout d'avoir lu jusqu'au bout. Heureuse de t'avoir fait passer un bon (beau) moment. Ça me motive à faire une suite ...

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Fb img 1499274464706

    Intrigante

  • Surprenant. Très surprenant.
    Même si le titre est explicite, tu devrais cocher la case "Contenu adulte" dans l'éditeur de texte...

    A part ça, une histoire parfaitement maîtrisée, comme ton écriture. Un style particulier (je parle du sujet traité) et peu commun dans lequel je me suis laissé embarqué en pensant fortement à R. Hobbs.
    En tout cas, ce texte a un énorme potentiel, c'est une évidence.
    J'ai vraiment passé un très bon et beau moment à le lire.
    Chapeau bas.

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Francois merlin   bob sinclar

    wen

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