Changement à double tranchant (concours apocalypse)

Némri Axèn

1er décembre 2012

Qui aurait cru qu'une vie pouvait basculer en une visite? On ne voit habituellement ça que dans les livres ou les films! On ne pense pas une seconde que cela puisse se produire dans la réalité ou dans notre vie. D'ailleurs, avant cette journée je pensais la même chose! Mais voilà, ça n'a pas été le cas. Car les rumeurs et les actualités m'ont poussé à lui rendre visite et a ainsi, changer ma vie...

« Flash spécial.

Un tremblement de terre a frappé la Californie il y a quelques minutes, nous ne savons pas encore s'il y a des blessés, mais les dégâts parlent d'eux-mêmes. C'est une véritable hécatombe. Rappelons qu'en cette journée du premier décembre, c'est le troisième qui est recensé depuis quatre heure trente du matin. Un Tsunami a également touché Quanzhoua en Chine un peu plus tôt dans l'après-midi. Il n'y a eu, heureusement, aucun blessé.

Le nombre de catastrophes naturelles a augmenté de manière exponentielle depuis le mois de septembre, ce qui renforce l'idée d'une fin du monde prochaine à laquelle beaucoup de personnes croient. Le vingt-et-un décembre signerait-il notre fin? C'est une question que beaucoup se posent et qui reste, pour le moment, sans réponse. »

J'éteignis la télé, comme déprimé puis partis dans la salle de bain pour me nettoyer le visage et pourquoi pas, me laver le cerveau pour oublier. Bien que cette idée était inutile puisque je ne pouvais ignorer quelque chose que chaque jour on nous servait, toujours à la même sauce.

Ces rumeurs...de plus en plus nombreuses et terribles m'inquiétaient énormément. Ma superstition dont tout le monde se moquait m'a poussé à aller la voir. Cette voyante au prénom agréable avait un don inné pour prédire les événements. Son pouvoir était accompagné d'un regard troublant, qui semblait traverser notre enveloppe charnelle pour converser avec notre âme sans un mot. Elle arrivait, malgré un nombre exorbitant de visite, à me mettre mal à l'aise dès les premières minutes!

Si ces rumeurs n'avaient pas existé, je serais sans doute allé la voir pour en savoir un peu plus sur ma quête d'amour, mais là, le sujet méritait ma venue. Il ne me concernait pas seulement personnellement. Contrairement aux autres fois.

Malgré que Claire ait dû déménager à cause des visions qu'elle avait sans cesse et qui, par ce fait, ruinait sa vie à Orléans, cela ne m'empêchait pas de la consulter. Elle était la meilleure et tout le monde le savait. Peu m'importait le nombre de kilomètre à parcourir pour la voir.

« Les rumeurs circulent, de plus en plus nombreuses et tu en as peur. Tu voudrais donc que je voie les vingt prochains jours pour toi… N’est-ce pas, me demanda-t-elle après que je m‘eûs installé, ses yeux bleus braqués dans les miens, comme connectés via un fil invisible.

- Euh… Oui… Oui c’est bien ça, lui répondis-je, gêné d’être, encore une fois, si transparent.

- Très bien, tu connais la procédure, je m’isole et tu m’attends sagement ici. Compris?

- Oui, oui, pas de problème. »

Claire se leva dans un long grincement de chaise et marcha par la suite jusqu'à une petite salle cachée par un fin rideau de velours violet. Elle s'y nicha pour méditer silencieusement, en quête d'une vision. Je la regardais s'enfoncer dans l'obscurité tout en pensant à son regard : unique et terrifiant, mais tellement fascinant à la fois.

C'est lorsque le silence s'installa que je me mis à, une fois de plus, découvrir son habitat tellement stéréotypé : sur la table en bois en face de moi, une boule de cristal était posée sur une nappe noire. Au-dessus de chaque rideau, servant de porte, se trouvait un capteur de rêve indien alors que sur la porte d'entrée était cloué un fer à cheval. Une légère odeur d'encens flottait dans l'air et les bougies allumées sur le maigre mobilier nous plongeaient dans une ambiance mystérieuse. Ambiance dans laquelle on se sentait en sécurité, comme protégé par une magie bienfaisante. Je m'attardais sur le lustre en cristal au plafond dans lequel six chandelles illuminaient le centre du salon lorsque soudain un cri retentit à l'endroit où la voyante méditait. De nature réceptive, cela pouvait lui arriver, mais ce hurlement-là n’était pas comme les autres. C'est pourquoi je bondis hors de ma chaise et ne prêta guère attention à cette dernière qui heurta le sol. Ce cri ne mêlait pas uniquement de la surprise dû à sa vision, non, ce son contenait une grande part de peur... une peur indescriptible, mais très puissante. Alors que je courais la rejoindre, elle, elle sortit de la salle tremblante et fragile, les mains recouvrant son visage. Elle gémissait et je compris que ces rumeurs se confirmaient, commençant de la même manière à paniquer. Le peuple avait raison. Je la dévisageais, inquiet. Sa chevelure blonde était ébouriffée et sa longue toge pourpre toute plissée. C'était une femme maigre mais au corps gracieux, plutôt grande et assez jolie ma fois mais à cet instant, elle avait perdu tout son charme naturel. Je savais que ce qu'elle venait de vivre était bouleversant, on pouvait le ressentir à des kilomètres.

Les secondes se faisaient attendre, le bruit de la pendule les sonnant semblait comme ralenti à cet instant. Patientant, je passais les paumes de mes mains moites sur mon jean, priant pour que ce ne soit pas aussi grave que ça en avait l'air, mais au fond de moi, j'étais conscient que ça ne pouvait être que catastrophique.

Vingt-et-une heure sonna lorsqu'elle libéra doucement son visage, les yeux clos, décidés à ne pas s'ouvrir, comme pour se protéger de la réalité tandis que sur son front perlaient des gouttes de sueur. Quelques minutes après avoir dégager ses paupière, elle braqua son regard sur l'horloge. Claire tourna brusquement la tête de droite à gauche afin de remettre ses idées en place puis passa une main dans ses cheveux pour les repousser en arrière, les yeux exorbités. Sa bouche sèche finit par s'ouvrir pour dire :

« John, commença-t-elle douloureusement, toujours aussi tendue. Je... Par où commencer?

Ta venue aujourd'hui est synonyme de chance. Cette séance t'est offerte, car j'y ai découvert quelque chose de beaucoup trop important pour en tirer profit d'une quelconque manière. »

Ses propos étaient étranges et teintés d’effroi, elle bredouillait d'angoisse, je savais que ce que j'allais entendre allait être dur, mais je voulais savoir.

« Allez-y, vous pouvez tout dévoiler, je suis prêt, commencez par le début, lui dis-je sur un ton se voulant rassurant.

- Si tu veux tout savoir, les rumeurs disent vrai... Enfin pour les dates. A par ça, la théorie est fausse. La fin ne se produira pas comme ça. Mais il ne nous reste plus que vingt jours à compter de minuit avant que ce que l'on redoute arrive. »

Je me tournais et regardais la pendule en forme d'aigle, taillée dans du chêne, qui indiquait maintenant vingt-et-une heure douze. En revenant vers elle, je lui dis avec difficulté, inquiet :

« Donc... ils avaient raison... La... la fin du monde est là... et elle approche à grands pas...

- Malheureusement oui, mais ce ne sera pas cet enchaînement de catastrophes naturelles comme le prédisent certains, me répliqua-t-elle avec des tics nerveux tel que se gratter l'avant-bras. Non ça, ce n'est que de la paranoïa. Cette fin du monde sera causée par nous-mêmes. Jusqu'au vingt décembre, il y aura de petites catastrophes. De petites catastrophes qui provoqueront un grand bouleversement : la fin du monde... »

Je fis une pause pour me rendre compte de ce qu'elle disait, ne sachant quoi penser. Angoissé, ne me contrôlant qu'à peine, je passais mes mains sur mon visage, et demanda :

« Je… depuis quand ces catastrophes se produisent-elle ? osais-je enfin demander, les lèvres tremblantes, anéanti par cette nouvelle.

- Je ne pourrais te dire, mais sans nul doute depuis peu, car on a une chance.

- Hein ?! m’exclamais-je surpris.

- Eh bien, je connais ces dix-neuf futures catastrophes, seule la vingtième, qui se déroulera le vingt-et-un m'est inconnue. Mais si on empêche celles que l'on peut, alors il y a moyen pour que la fin du monde soit reportée ou même annulée!

- On pourrait alerter les médias et leur annoncer votre vision dans ce cas, proposais-je, reprenant un brin d'espoir.

- Qui croirait une voyante?

- Certes... Mais on n'a pas le choix!! Il faut alerter quelqu'un d'influent pour qu'il mette le peuple au courant!

- Je réitère ma question. Qui croirait une voyante ? reprit-elle doucement.

- Mais... mais ! »

Impuissant et à court d'idée, je me sentais inutile, mais Claire avait la solution, c'était une certitude et c'est pourquoi, sur un ton agacé je m’écriais :

« Alors que doit-on faire?!

- Simplement réagir par nous-mêmes. Empêcher les actions de se faire. Par exemple avec du sabotage ou par la provocation d'un accident. Et puis... je ne veux pas que tout cela s'ébruite, rien que la rumeur de fin du monde qui circule a fait augmenter la violence et déprimer plus d'une personne.

- Et que doit-on faire si jamais un des accidents se trouve par exemple en Amérique ? demandais-je sarcastique.

- Eh bien il y a deux possibilités : on pourrait voyager ou bien je peux contacter les médiums qui dans ce cas, auront la possibilité d'aider.

- Je n'ai pas les moyens de voyager, mais il y a beaucoup de charlatan, comment pourrez-vous savoir lequel des médiums est fiable?

- Ce sont mes affaires ça. »

Suite à ces derniers mots, prononcés sèchement, Claire partit dans la salle de méditation où elle s'y isola quelques instants, pour revenir plus tard avec un plateau dans les mains. Dessus étaient présentées deux tasses de thé fumant ainsi qu'un morceau de papier plié en deux. Une fois tous les deux assis, elle me prit les mains et me regarda d'une manière qui m'était, de sa part, inconnue. Un mélange d'angoisse et de contemplation, avec une légère lueur brillante dans ses yeux...

« Tu as une vie merveilleuse John. Je ne comprends pas tes consultations, tout te mène vers les réponses de tes questions pourtant.

- Comment?

- Tu viens souvent pour connaître des détails sur la femme de ta vie ou si tu vas réussir dans ton travail. Mais en réalité, sans même me consulter, tu le sais, même si tu dois attendre quelques mois, tu le constates par toi-même, répliqua-t-elle, le tout dans une gestuelle charmante.

- Heu... oui. Je suppose oui, commençais-je, mal à l'aise.

- Je te fais peur? Je suis plus différente qu'à l'accoutumé c'est ça?

- Heu... non, non... c'est cette histoire de fin du monde qui... »

Claire me lâchât et se mit à rire. A cet instant je souris, pensant que c'était un moyen de décompresser. Lorsqu'elle se calma, elle s’assit correctement, porta la tasse de thé à ses lèvres et but doucement une gorgée tout en me regardant.

« Tu es mignon quand tu es gêné comme ça, reprit-elle avec un sourire. »

Ne sachant que dire, je rougis et détournais le visage, toute sorte d'émotions s'entrechoquant dans ma tête. C'est dans ces circonstances que je commençais à m'intéresser à la petite feuille pliée. En conséquence de quoi elle reprit la parole, reprenant son sérieux, devançant ma question.

« Dedans, il y a demain. Dedans, il y a l’événement. Dedans... Il y a l'avenir également. Et... Ce n'est pas... tout blanc.

- Comment ça?

- Essayons de penser à autre chose. Vois-tu... aujourd'hui... c'est et ce sera la seule journée avant longtemps où... On a le pouvoir de rire... »

En plus de la difficulté de notre "mission", je compris que les choses allaient changer et que nous pourrions ne pas en sortir indemnes. Perdu dans mes pensées, je n'avais pas réalisé qu'elle était sortie dehors. Je la voyais de ma place, assise sur un rocher, regardant la lune, pensive. Un grand changement nous attendait, je le savais...mais une part de moi avait espoir... Et c'est celle-ci qu'il fallait garder.

J'hésitais, mais pris finalement la décision de la rejoindre. Une légère brise caressa mon visage et frissonnant, je posais une main sur son épaule. Elle tourna la tête et me regarda de haut en bas, les yeux humides. Je ne l'aurais pas fait normalement, mais cette fois...ce n'était pas pareil, ce n'était plus une voyante, mais une partenaire et avant tout : une amie. Un lien d'amitié s'était tissé entre nous. Mon nombre mirobolantes de visites chez elle nous avait liés d'une certaine façon, ce qui facilitait en cet instant ces prochaines paroles que je lui dis en me savant rassurant :

« On y arrivera! On peut le faire et on y mettra tous nos moyens. »

Elle ne répondit pas, mais elle sourit et je dois dire que c'était tout ce qu'il me fallait pour croire moi-même à mes propos.

Journal intime de Claire Taylia :

« Aujourd'hui j'ai compris que ma vie n'allait pas se résumer à prédire l'avenir des gens consentants.

J'ai aujourd'hui une mission et je compte bien la remplir, coûte que coûte. Elle paraît folle et je suis d'accord avec cet avis, mais John m'aidera et son aide pourrait bien changer la donne. Cet homme un peu naïf pourrait sauver ce monde d'une catastrophe humaine.

Demain... Demain notre destinée prend un tournant que nul ne peut imaginer et que personne ne connaîtra. Une fiction traitant de fin du monde est bien belle, mais la réalité elle, est terrifiante.

Le 21 décembre 2012 approche, mais nous ferons tout pour qu'il soit un jour comme les autres. Oui... nous ferons tout... »

2 Décembre 2012

Je repensais à cette journée et je dois dire que je n'en gardais pas un bon souvenir. En plus des rumeurs qui se colportaient sur la fin du monde, la société changeait de plus en plus. Les catastrophes naturelles, quasi inexistante aujourd'hui, passaient presque en second plan aux infos. Ces dernières parlant surtout de la montée de la violence et de tout autre délit. Des sectes commençaient même à naître et bien que les forces de l’ordre arrivaient encore à faire la loi, tout n'était qu'une question de jour avant que le pays ne tombe dans une société anarchique barbare. Cette fin du monde allait au-delà de la prédiction, elle était un prétexte pour les criminels de perpétrer leurs actes! Quoi qu'il en soit, je n'y pensais pas vraiment ce matin...

Claire m'avait invité à coucher chez elle. Sans nul doute pour qu'on ne se perde pas de vue et puisse se mettre au travail le plus tôt possible, sans avoir à parcourir un long trajet inutile. Bien entendu, je n'ai pu trouver le sommeil que tard dans la nuit. Cette fin du monde me tourmentait, l'idée d'avoir le pouvoir de l'éviter accentuait cette peur, car je ne savais pas à quoi m'attendre... Mais hier fut une soirée fort sympathique où j'appris à connaître cette femme très attachante, c'est d'ailleurs cela qui m'avait détendu.

Lorsque je me décidais à sortir du lit bien douillet, le souvenir du petit morceau de papier qu'elle gardait avec elle revint me hanter. Une fois hors de la petite chambre entièrement construite avec des matériaux naturels tels que le bois, comme toute sa demeure, je vis Claire préparer deux cafés qu'elle disposa ensuite sur un plateau. Lequel contenait la feuille de papier pliée de la veille. Elle me regarda ensuite droit dans les yeux en me demandant, souriante :

« Bonjour John, bien dormi ?

- Pas vraiment, mais suffisamment pour avoir récupéré! Et toi?
- De même. Mais ça, c'est une habitude! »

Elle rigola doucement en m'invitant à m'asseoir. Claire poussa alors la boule de cristal puis la rangea sur un meuble où reposait un panneau sur lequel des mots étaient inscrit : « Fermé pour une durée indéterminée »

Le déjeuner s'est passé en silence, il semblerait qu'elle, tout comme moi, n'aimait pas parler le matin! Cette idée me fit d'ailleurs sourire.

L'horloge en forme d'aigle sonna dix heure et c'est pourquoi Claire se leva, me tendit le fameux papier d'un air maussade et s'en alla se préparer. Je dépliais la feuille avec appréhension, découvrant ce sombre destin qui nous attendait :

« Catastrophe numéro une :

A 12h30 environ, un scientifique va faire tomber un réceptacle en verre dans lequel est contenu un gaz nocif. L'aération de la salle va permettre à ce dernier de s'échapper et d'atteindre les Cumulo-Nimbus. De par ce fait, une pluie acide va s'abattre sur la France pour une durée indéterminée quelques heures plus tard. Cette averse va toucher un corps inanimé qui permettra au meurtrier de sortir de son affaire sans peine, ce qui engendrera la catastrophe numéro deux.

Empêcher cette première étape a le pouvoir d'empêcher la fin du monde. Mais les prochains jours restes importants car ils pourraient s'avérer capital si un malheur arrivait! »

Je repliais le papier tout en fixant mes mains qui le tenaient, pensant aux innombrables scénarios possibles à partir de cette base. En entendant la jeune voyante arriver, je m'empressais d'aller la voir pour lui demander ce qui suivrait après, mais sa seule réponse fût déprimante :

« Je ne peux pas te dire quelque chose qui peut changer, à quoi bon t'inquiéter davantage ?

- Ça peut changer?! Même si on parvient empêcher la catastrophe?!

- Réfléchis, on change le cours de l'histoire, bien sûr que ça le peut, mais peut être que ça n'aura pas d'incidence sur la suite des événements. Ce que je pense fortement. Dans tous les cas tu seras prévenu.

- … D'accord.

- Enfin bon, il est temps de partir, reprit-elle progressivement. Je n'ai pas de permis, je n'en ai d'habitude pas besoin, tout est là à côté de chez-moi... On peut prendre ta voiture?

- Oui. Oui pas de problème. »

Lorsque nous sommes arrivés au laboratoire du scientifique, une heure après, nous avons pris le temps d'élaborer le plan qui nous permettrait d'empêcher le sombre événement. J'ai tout d'abord été bluffé par l'allure du bâtiment qui n'était en fait qu'une maison à deux étages comme les autres. C'est-à-dire bien entretenue avec un jardin orné de plante et d'arbre divers tel que le grand cerisier planté au milieu. Un mur couvert de crépis blanc, qu'on pourrait croire neuf à en voir la blancheur éclatante. La seule différence avec les autres maisons, c'était son emplacement, tout proche d'une immense forêt laissée à l'abandon. Sa demeure ne ressemblait en rien au laboratoire que je m'imaginais ou à l'immense structure que je pensais trouver. Ce détail avait éveillé en moi des soupçons que je n’ai pu approfondir en raison du temps qui passait. C'est pourquoi je me suis placé devant la petite fenêtre ouverte qui donnait une vue plongeante sur le sous-sol. Ce dernier était essentiellement composé de placards et de machines sophistiquées qui m'étaient inconnue. Le tout dans une salle sombre et peu soignée, si l'on en oublie les éléments importants qui eux, étaient choyés. Claire m'avait parlé d'une table calée en dessous de la fenêtre où je me trouvais. Une fois aperçue je repensais à son plan. Dessus allait être posé le tube à essai juste avant de casser en roulant sur cette dernière. Si jamais Claire n'arrivait pas à rencontrer l'homme et à empêcher le gaz de s'échapper, je devais attraper l’échantillon puis le poser dans le trou prévu à cet effet.

J'observais avec intérêt l'individu qui faisait couler différents liquides dans un même récipient, puis le secoua de haut en bas, transformant le fluide en un gaz transparent. Lorsque soudain la sonnette retentit, l'homme s'empressa de poser l’échantillon comme prévue et enleva sa blouse. Il partit par la suite se nettoyer afin d'ouvrir. Sachant qu'il s'agissait de Claire, j'attendis en fixant le tube à essai qui commençait à glisser le long de la table. D'ici je pouvais l'atteindre, mon bras était assez long pour pouvoir l'attraper, mais avant de faire quoi que ce soit, je devais attendre le signal de Claire. Commençant à stresser malgré moi au vus du temps qu'elle mettait ainsi que du mouvement de plus en plus rapide de l'objet, je passais une main sur mon front comme pour en nettoyer la sueur. Une pensée afflua en même temps que la peur de réagir trop tard : et si c'était nous qui provoquions les catastrophes en voulant les en empêcher?!

Mon cœur battait la chamade, je ne résistais que très peu à la tentation de prendre le récipient, mes mains en tremblaient d'impatience! Lorsque l'emprise fut finalement trop forte, je pris le tube juste avant qu'il ne tombe. Et tandis que je souriais à mon action, la porte s'ouvrit, découvrant deux silhouettes que j'identifiais comme étant Claire et le mystérieux scientifique, plus petit qu'elle.

Ma partenaire essaya tant bien que mal de lui expliquer que c'était pour en empêcher le gaz de s'échapper, il ne nous écouta pas, restant persuadé qu'on était des voleurs. Comment lui en vouloir, nous tombions dans une société de plus en plus dangereuse. Ainsi pour me faire fuir il lança une éprouvette, qu'il devait penser vide, en ma direction... mais cette dernière s'avéra être pleine du gaz tant redouté, transparent mais légèrement grisé. Alors que celui entre mes mains était plus coloré que celui décrit par Claire...le verre heurta le mur et roula sur la table, je ne pus réagir assez vite pour tout comprendre et regardais l'éprouvette se briser en touchant le sol. Je baissais la tête en tapant du poing, fermant les yeux, anéanti par ce premier échec... Notre chance d'empêcher la fin du monde venait d'être reculée.

Claire était venue me rejoindre en courant mais je n'y prêtais pas attention, seul sa main empoignant mon bras me fit prendre conscience que le gaz devait être toxique et qu'il allait engendrer une pluie acide en entrant en contact avec les énormes nuages noirs au-dessus de nous. Tout en courant, je jetais un dernier coup d’œil à la maison, voyant l'homme nous observer avec rage derrière sa porte d'entrée entrouverte, sa main gauche tenant un téléphone collé à son oreille. Criminel, nous étions peut être devenus des criminels si cet homme avait appelé la police...

Le trajet du retour se fit dans un silence gêné, nous avions échoué et ce n'était qu'une question de temps avant que la pluie acide ne fasse son entrée pour faire innocenter un meurtrier... C'est alors qu'une idée, que je m'empressais d'exprimer, vint heurter mon esprit :

« J'ai une idée! On peut retrouver le cadavre et le mettre à l’abri! Ainsi lorsque les policiers le trouveront, eh bien ils retrouveront la trace de l'assassin!

- Oui... Oui ça tient debout...à condition de savoir où il est...car moi je n'en ai aucune idée. Je ne voyais qu'une bien sombre ruelle dans un centre-ville. Et même si nous savions où c'était, la pluie tomberait avant que nous arrivions John... Nous avons échoué, mais il faut garder espoir, m'expliqua-t-elle tristement, n'osant à peine me regarder.

- Je suis désolé Claire...

- Tu ne pouvais pas savoir, je ne t'en veux pas et puis, le scientifique n'a fait que m'écouter sans me croire.

- Pourtant quand j'avais le mauvais récipient dans les mains...vous arriviez!

- Il avait entendu un bruit, je ne sais pas si c'est toi mais il a eu peur, donc il est partit et je l'ai suivi.

- Ooh... En fait, je n'aurais pas ramassé ce satané tube... »

Claire me fixait avec insistance, voyant la culpabilité me ronger. Son regard semblait me demander de me faire une raison, mais je ne pouvais pas, c'était tout bonnement impossible. Elle tourna peu après son visage vers la fenêtre où elle passa tout le reste du trajet à mirer les paysages défiler un à un. Tout en prêtant attention à la route, je ne pouvais m'empêcher de m'en vouloir, me dire que j'avais échoué et que quoi que je fasse, cet échec resterait gravé en moi. Tout aurait pu sans doute finir, mais j'avais échoué.

Plus tôt durant le voyage, je lui avais dit qu'à cause de la pluie, sa maisonnette pourrait ne pas tenir. C'est pourquoi nous avions décidé d'aller chez moi après une brève halte dans sa demeure pour qu'elle y prenne quelques affaires. Chose risquée puisque nous ne savions pas quand la pluie tomberait. Une fois devant ma maison, tandis que je sortais les clés pour ouvrir, comme si elle lisait encore dans mes pensées, elle dit :

« Ne commence pas à culpabiliser John. Ce n'est pas ta faute. Tu n'aurais pu savoir de toute manière.

- Oui mais j'aurais pu l'attraper...

- Relativise et puis tout n'est pas perdu! On a encore dix-neuf jours, tenta-t-elle d'affirmer pour me rassurer.

- Je sais bien...mais...

- Je comprends ce que tu ressens, mais il faut te relever. On a encore du pain sur la planche...

- Tu as raison, finis-je par admettre suite à une courte réflexion. »

Nous sommes entrés dans un long silence jusqu'à ce que je propose à Claire une visite de la maison. Elle était composée de cinq pièces dont deux chambres, un salon, une cuisine et une salle de bain. Un escalier menait au sous-sol pour tout ce qui concernait les affaires ménagères et de lessive. Une maison simple mais amplement suffisante pour quelqu'un comme moi. Nous avons naturellement commencé par le petit salon, muni d'une simple table en bois, située au centre de la salle, recouverte d'une nappe blanche légèrement plissée à certains endroits. Trois chaises étaient placées contre et elle était ornée d'un jolie bouquet mis en évidence qui m'avait été adressé par une ex avec laquelle j'avais gardé contact. Une télé à notre gauche était collée à un mur tandis qu'en face, un fauteuil en cuir marron était posé deux mètres plus loin. On pouvait également contempler les deux tableaux faits par une fan et les quatre photos de ma famille disposées sur un grand meuble style classique. Celui-ci renfermait toute la vaisselle et les couverts de la maison, suivi à sa droite par une porte menant à la cuisine. Une fois à l'intérieur, je me dirigeais vers le frigidaire d'où je proposais un rafraîchissement à Claire, qu'elle refusa aimablement.

Suite à ce bref instant, nous sommes partis dans la chambre d'ami où Claire allait s’installer. Un lit était calé dans un des angles de la salle, suivi d'une petite commode en bois style Louis X sur laquelle était posée une lampe de chevet récemment changée. Au-dessus de la couche était disposé un de mes tableaux représentant un voilier voguant dans une mer bien agitée. Une énorme vague d'ailleurs s'apprêtait à le détruire lorsqu'elle se rabattrait sur le petit bateau.

« Pourquoi as-tu peint ça ? me demanda-t-elle curieusement intriguée par la toile.

- Lorsque j'étais en couple, il y a cinq ans maintenant, eh bien je rêvais toujours de ce navire. C'était un cauchemar ignoble car je savais que je pouvais venir en aide au jeune vacancier dans le voilier, mais au lieu de ça, je laissais toujours le temps passer pour réfléchir. »

J'entendis la pluie tomber quelques secondes plus tard en conséquence de quoi je partis dans le salon, me mettre devant la fenêtre. La culpabilité refit vite surface lorsque je jetais un coup d’œil sur la bâche, qui abritait le bois pour l'hiver mais laquelle fondait peu à peu. Je plaçais mes mains sur le rebord de la fenêtre tout en regardant l'herbe se plier sous la pluie. J'étais déconfit, je n'en revenais toujours pas. Tout cela était de ma faute.

Ma partenaire me rejoignit silencieusement et se positionna à côté de moi, fixant tristement le paysage. Elle jeta ensuite un rapide coup d’œil en ma direction et me dit tout en retournant la tête vers l'extérieur :

« Ton cauchemar... Il vient de ton subconscient. Il te prévenait que quelque chose n'allait pas dans ton couple et que, si tu voulais de nouveau être heureux, il fallait rompre. Ce vacancier n'était autre que toi. Effectivement, tu pouvais te sauver, et par sauver en fait c'était le double sens de fuir. Il fallait que tu fuies la tempête. Tempête qui était ta petite amie de l'époque. »

La pluie s’estompait peu à peu et tandis que je réfléchissais aux dires de mon amie, elle rajouta, son attention portée sur moi cette fois :

« Ce genre de cauchemar est un don. C'est un savant mélange entre l'intuition et la connaissance, mêlé bien sûr à des vérités que l'on se cache. Il suffit de savoir les décoder pour comprendre de quoi l'on rêve réellement. Je pourrais t'aider, dis-moi si tu en fais qui se répètent. D'accord?

- Oui d'accord pas de problème. »

Et justement, elle ne croyait pas si bien dire...car cette nuit encore, un cauchemar d'une terrible violence avait fait son apparition...comme la veille.

« Journal intime de Claire Taylia,

Aujourd'hui, nous avons échoué.

Aujourd'hui, j'ai vu un John que je ne connaissais pas.

Aujourd'hui n'est pas qu'une mauvaise journée malgré notre premier échec.

Car je sens au plus profond de moi que John pourrait jouer un rôle très important sur l'issue finale de la fin du monde. On peut encore l'empêcher, d'ailleurs, nous devrions réussir demain à accomplir notre mission... Même si ça ne va pas être...facile à faire...

On peut empêcher l'apocalypse... Mais il faut que John y mette plus du sien et qu'il ne se laisse pas aussi facilement abattre. »

3 Décembre 2012

Si je savais maintenant qu'une simple visite pouvait changer une vie entière, je ne me doutais nullement que la société, voir le monde civilisé tout entier, pouvait changer d'un coup! Les rumeurs de fin du monde accompagnées par les catastrophes naturelles du samedi premier avait largement aidé les sectes et autres groupes opportunistes à avoir une certaine côte de popularité non négligeable. Les fidèles et autres superstitieux se jetaient à leurs pieds, mais il faut dire que c'était tentant au vu de leurs propos! La justice avait de jour en jour un peu plus de mal à gérer un peuple qui à chaque minute commettait un délit. C'est pourquoi le président des États-Unis, Barack Obama, après une consultation avec les autres puissances mondiales, a décidé pour y remédier, de voter d'ici quelques jours une loi de sécurité qui changera du tout au tout. « Une méthode radicale qui fera ses preuves et qui marchera sans aucun problème ». S'il n'en a pas dit plus, l'on peut s'attendre au pire. Mais à vrai dire, ce serait la loi de la dernière chance, pas vraiment de choix disponible. L'Homme n'avait pas encore perdu toute humanité, en effet, les pays ayant subi les catastrophes naturelles étaient aidés et ceux qui commençaient à tomber sous la violence étaient désormais dotés d'une unité militaire en soutien. En pensant à la guerre que menaient ces militaires, je me rappelais ma journée.

En sursaut, je sortais de mon lit, transpirant comme jamais pour un cauchemar. Il faut dire qu'il n'avait rien de bon, d'autant plus s'il s'agissait d'une potentielle vérité comme me l'avait expliqué hier la voyante! Je m'empressais de m'habiller pour ensuite passer prendre une bonne douche, histoire de tenter en vain d'oublier cet horrible cauchemar! Une fois devant le miroir, j'entendis une explosion retentir et c'est alors que je passais à la fenêtre du salon. Quel grossière erreur, ce que je vis n'était rien d'autre qu'une centrale nucléaire cédant sous la violence d'un groupe extrémiste! La foudre s’abattait de partout tandis qu'un tremblement de terre secoua, avec une violence jamais vue, la Terre! Terre trempée par une pluie diluvienne mêlée aux grêlons, aussi gros qu'un poing. Sans vraiment résister, je m'écroulais sur le plancher, espérant m'en sortir...

Mes yeux s'ouvrirent brutalement, je n'eus à peine le temps de me rendre compte de ce qui se passait que la voyante toqua à ma porte en me demandant si tout allait bien. Inquiète à cause de mes hurlements. A cet instant, je ne savais même plus ce qui se passait, je ne savais même plus où j'étais, traumatisé par le rêve dans mon cauchemar. Je passais une main tremblante sur mon front tout en rassurant Claire. Je me dégageais ensuite du lit en respirant fortement, trempé de sueur, totalement perdu. Lorsque je sortis de la chambre en direction de la salle de bain pour me laver, je ne pus m'empêcher de regarder par la fenêtre pour voir si tout allait bien. Et ce fût le cas, hormis le coup de feu que j'entendis quelques secondes après et qui me fit sursauter.

Dès que j’eus finis de me nettoyer le corps et l'esprit, je partis dans la cuisine prendre un verre quant au même moment, j'entendis la télé s'allumée passer sur la chaîne des infos :

« La cause de la pluie acide du dimanche deux décembre n'a pas encore été identifiée, mais il semblerait qu'elle n'est pas due à une cause naturelle. En effet les scientifiques insistent sur le fait que ce genre de pluie est produit par l'effet d'une réaction de nature chimique.

Une enquête a donc été ouverte afin de déceler quel produit pourrait provoquer une telle chose.

Le corps de Phillips Codéloro a été retrouvé à Clermont-Ferrand ce matin aux alentours de neuf heures par son jeune fils. La cause du décès reste pour le moment un mystère mais les policiers savent que ce n'est pas dû à la pluie acide. Cependant aucune preuve n'a pour le moment été retrouvée en raison de ce phénomène qui les aurait brûlées. Ce riche et généreux jeune homme en peinera plus d'un, c'était en effet une personne très apprécier de tout le monde.

Question Fin du monde à présent. La récente vague de violence a créé diverses sectes et organisations qui clament haut et fort qu'elles possèdent la solution pour vivre au-delà du vingt-et-un décembre. Ces beaux discours ont fait des centaines de fidèles. Une secte en particulier appelée FiDuCaMa, Fin Du Calendrier Maya, a quant à elle plus de dix mille aspirants. Son pouvoir en perpétuelle évolution reste dangereux ; en effet, cette dernière attire des fidèles par n'importe quel moyen et le chef est toujours en cavale. Nous vous conseillons donc de rester prudent lorsque vous sortez! »

Claire éteignit la télé à cet instant et me regarda droit dans les yeux pour me dire :

« C'est lui qu'on doit avoir aujourd'hui.

- Quoi ? repris-je, à peine conscient.

- Le chef de la secte. Si on le trouve et...le met dans un état entre la vie et la mort, nous empêcherons le second chaînon de se produire.

- Chaînons?

- Tout se fait par chaînon, les catastrophes. Il y a quatre chaînons essentiels à empêcher.

- Je ne suis pas sûr de bien te suivre là.

- Bon. Toutes ces catastrophes sont reliées entre elles. Une catastrophe en provoque une autre qui en provoque elle-même une autre et cetera. Ça s'appelle un chaînon. Chaque chaînon amplifie notre apocalypse. Tu comprends?

- Oui à peu près oui.

- Hier, nous avons essayé d'empêcher le chaînon numéro un et aujourd'hui on s'occupe du numéro trois.

- Euh... D'accord. »

Elle me regarda quelques secondes avant de me tendre une tasse de café. Je la prenais avec plaisir et bus jusqu'à plus soif, posant le verre vide, précédemment pris dans la cuisine, sur la table. Claire se leva et partit vers la fenêtre où elle plaqua la paume de sa main dessus. Avec l'autre, elle pointa le centre-ville au loin et dit :

« Il est là-bas, c'est notre mission.

- Et...que doit-on faire exactement?

- Le mettre hors d'état de nuire.

- Rien que ça ?! m'écriais-je.

- Oui, le mieux serait de le...tuer, finit-elle par dire avec difficulté, serrant les poings. »

Je posais la tasse et courus la rejoindre, la pris par les épaules et allais lui exprimer mon point de vue, extrêmement surpris par ces propos, mais elle me coupa en posant son index sur mes lèvres.

« - Non je ne suis pas folle et non je n’ai pas bu. Rien à part du café.

- Mais enfin! Tu te rends compte de ce que tu dis ?! lui hurlais-je dessus.

- Oui. Je le sais, mais si on veut empêcher deux chaînons de commencer d'ici la fin de la journée, on doit faire le maximum. Et tu m'as dit qu'on ferait tout ce qu'on pourrait.

- Je ne peux pas tuer un homme Claire!!! Ni le tabasser jusqu'à ce qu'il se noie dans sa propre flaque de sang!!!

- C'est lui ou nous John. Puisque tu insistes, viens avec moi, je vais te faire voir les événements qui vont se produire. »

Je la suivais du regard et me décida à la rejoindre. Lorsque j'arrivais devant la porte de sa chambre, je la vis avancer vers moi, une feuille à la main.

« Tu vas voir tout ce que je sais qui va se produire. »

Suite à ces propos, elle déplia la feuille qui était beaucoup plus grande que ce que j'imaginais et elle la fixa au mur à l'aide d'une punaise.

Je m'approchais doucement et vis une bien sombre destinée que je ne saurais bien décrire. En résumé :

Chaînon numéro un :

Flacon plein de gaz nocif; Pluie acide; Assassin non trouvé; La France croit à une attaque terroriste; Guerre entre ces deux pays.

Chaînon numéro deux :

Renforcement de la sécurité avec une loi barbare; Violence gratuite de la part des «justiciers»; Rébellion générale; Guerre civile.

Chaînon numéro trois :

FiDuCaMa devient une secte majoritaire et obtient un pouvoir énorme; Augmentation des meurtres et des fidèles; Création d'un nouveau gouvernement par cette dite secte; Réduction de la France à l'esclavage; Dictature et Rébellion qui échoue.

Chaînon numéro quatre :

Tension et Entraide entre les pays; Pays dits pauvres et irréparables abandonné par les pays; Alliance entre les pays délaissés; Grande guerre mondiale avec utilisation de la bombe nucléaire.

Je reculais de deux pas, passant mes mains dans mes cheveux, effrayé. Claire rajouta doucement que cela n'était que les événements et non nos «missions». Elle savait qu'elle n'aurait pas dû me montrer tout cela et c'était de ma faute. Ma curiosité m'aura poussé à voir la vérité que je ne voulais pas connaître. J'aurais dû avoir pleinement confiance en elle...

Depuis ce moment, des heures se sont écoulées et des disputes se sont enchaînées. Je me savais incapable de tuer ou de tabasser à mort. Mais j'avais fini par admettre que le choix ne m'appartenait pas. Claire voulait même y allait seule en remarquant ma réaction, mais je ne pouvais me résoudre à la laisser faire cela.

C'est pourquoi nous sommes allés tous les deux, lentement et difficilement jusqu'au centre-ville, à Saint-Quentin, en Picardie, non loin de chez Claire, pour rencontrer ce mystérieux chef de bande. Rencontrer étant bien sûr...un bien faible mot. Notre relation amicale était devenue des plus tendus à cause de cette mission. Elle m'avait dit qu'il séjournait pour un jour dans un hôtel, l’Ibis Saint-Quentin Basilique situé dans la zone commerciale de la ville afin d'augmenter le nombre d'adepte ici.

Une fois sur place, j'ai arrêté la voiture et ai eu du mal à décrocher mes mains du volant. Malgré que Claire ait fait son possible pour me détendre et me dire que c'était pour le bien de tous, je ne pouvais m'empêcher de me dire qu'on allait tuer un homme. Et même si son plan tenait la route, notre acte en sera à jamais gravé dans ma mémoire. Elle posa sa main sur mon épaule, me sourit de façon rassurante et compatissante, avant de sortir se dégourdir les jambes. Il faut dire que la route était longue d'Orléans jusqu'ici.

Je me décidais enfin à sortir, peinant à respirer normalement, les yeux fermés et les mains sur la portière encore ouverte de la voiture. Je savais qu'une fois qu'elle serait claquée contre la carrosserie, ce serait le début du tourment.

Claire avait pris le soin de mettre un couteau dans sa botte au cas où nous serions suspects ou fouillés. Une arme que je n'utilisais d’habitude que pour couper du pain. Il est évident que je ne pourrais le garder à l'avenir.

Nous sommes entrés dans l'hôtel sans grande assurance et avons franchi tous les couloirs nécessaires afin de trouver la chambre de l'homme. Heureusement pour nous que l’hôtelier était occupé avec le téléphone et n'a pas prêté attention à notre arrivée. Après avoir toqué et être entrés, nous nous sommes installés sur le lit blanc et défait de sa niche, ne le quittant pas des yeux.

« Nous sommes ici pour vous monsieur, commença Claire, souriante.

- Que voulez-vous jeune disciple?

- Nous pensons que vous allez créer une dictature à vous seul grâce à votre soi-disant secte se battant pour «survivre». Notre source est des plus fiables.

- Ah oui, demanda l'homme en ricanant. Et quelle est-elle?

- Claire est une médium de renom très réputée pour ses visions disant la vérité, lui répondis-je immédiatement, agacé par son assurance naturelle.

- Alors si madame le dit c'est que c'est vrai! »

Il nous tourna le dos et se dirigea vers la salle de bain à notre gauche tout en riant à gorge déployé. Mais avant d’entrer, il nous regarda et demanda :

« Dites-moi, vous savez au moins qui je suis? »

Cette question m’intéressait car moi-même je n'en avais aucune idée.

« Oui, tu es Ronand Calvel. Un homme assez riche ma fois, mais qui en veut toujours plus.

- C'est qu'elle est bien renseignée la p'tite, reprit-il avec sérieux. Tu oublis également que je suis...

- Influent, le coupa-t-elle sur un ton interrogatif. »

Je retrouvais ce regard perçant que Claire avait toujours eu avec moi par le passé. Ronand était mal à l'aise, d'une part parce que nous savions ses projets, ou du moins, ce qu'il voulait faire sans avoir réfléchi aux conséquences et de l'autre car elle connaissait toutes ses pensées d'un simple regard.

Il se retourna de nouveau tandis que Claire me regardait dans les yeux avec angoisse. Elle sortit la lame doucement sans un son et expira longuement. Elle ne put, avant de se lever, s'empêcher de baisser les yeux et les fermer, comme pour prier. Elle ne voulait pas le faire, mais elle se sentait obligée. J'aurais aimé lui retiré cette tâche et la faire moi-même, mais rien que cette idée me tétanisait...

Avec maladresse elle se leva du lit et marcha lentement jusqu'à lui. Elle posa une main sur son épaule, ferma les yeux tout en baissant la tête et planta, une fois qu'il fut face à elle, son couteau dans le ventre du vieil homme barbu. Lorsqu'elle le retira, elle fondit en larme et nous partîmes en courant jusqu'à la voiture. Je n'avais à ce moment pas eu le temps de vraiment réagir, la montée d’adrénaline m'ayant aidé à nous hisser jusqu'au véhicule. Une fois les mains posées sur le volant, tout devint clair dans ma tête. C'est à cet instant que je regardais Claire, recroquevillée sur elle-même, anéantie et sanglotant. Je ne pus retenir mes larmes de monter, mais commença à conduire pour penser à autre chose.

Le temps passait lentement depuis notre retour à la maison. D'autant plus que nous avions appris que la maison de Claire s'était effondrée. Tout le reste de la soirée se passa dans un profond silence et aucun de nous n'osait le troubler. Par moment, j'entendais mon amie glousser, je savais qu'elle n'allait pas tout de suite s'en remettre et je ne pouvais pas l'en blâmer. Cette expérience allait nous traumatiser ; pour ma part, je revoyais le sang maculait le couteau et le carrelage de la salle de bain... Et Ronand, s'accrochant avec ses dernières forces à Claire, ne comprenant pas ce geste... Non je ne pourrais oublier et bien que l'on ait réussi cette mission, je crois que je n'aurais jamais voulu en arriver là. J'aurais dû renoncer dès le début...mais il était trop tard à présent.

« On ne change pas l'histoire... C'est l'histoire qui nous change »

Je me réveillais en sursaut, effrayer par cette atroce cauchemar et décida d'aller voir Claire pour lui en parler. Je ne sais pas vraiment si elle serait capable de réfléchir après ce qu'elle a fait aujourd'hui, mais il était urgent que je lui parle de ce cauchemar. Je n'avais même pas prit la peine de regarder l'heure que je toquais à sa porte, attendant son habituel « entrer ». Une fois obtenu, je l'ai regardé avec la plus grande inquiétude et elle comprit que le malheur n'était pas fini.

« Avant de tout me dire, à la fin, y-avait-il un mot, une lettre ou quelque chose qui était écrit dans ton cauchemar?

- Oui, il y avait marqué: « On ne change pas l'histoire... C'est l'histoire qui nous change »

- Oh mon dieu... »

Elle fit les cent pas, les mains sur le visage et fondit en larme en quelques secondes. Elle pleurait et gémissait fortement, comme si elle devenait folle. J'avais de plus en plus peur, tellement que je reculais en affichant un air décomposé. La voir ainsi était la goutte d'eau qui faisait déborder le vase, je n'en pouvais plus de tout cela.

« Raconte-moi ton cauchemar, qu'on y découvre encore une catastrophe... »

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