Chirurgie

Hervé Lénervé

Bigoudi, infirmière ! Oui, bistouri si vous préférez, vous êtes une sacrée chipoteuse, vous ! Vous venez prendre un verre, après ? Vous avez raison, allons-y maintenant, lui, on le finira plus tard.

Hôpital, chambre 203, une patiente est alitée dans l'attente de son opération prévue pour le lendemain. Quand la porte s'ouvre !

 

-         Vous auriez pu frapper ?

-         Pourquoi donc, ma petite dame ? Vous ne m'avez rien fait !

L'homme est petit dans sa blouse blanche, son visage buriné est celui d'un aventurier.

-         Bonjour madame, madame… Cabrol ! C'est moi qui vais vous opérer demain. Comment vous sentez vous ?

-         Nerveuse ! les opérations me rendent toujours nerveuse.

-         C'est bien naturel, ma petite dame, mais ne vous inquiétez pas vous êtes entre de bonnes mains… les meilleurs… les miennes, ha, ha ! Des mains solides qui ont porté des tonnes de parpaings, regardez comme elles sont râpées par la pierre.

-          Oui ! Mais vous avez été formé par mon mari ?

-         Quel mari, pardi, ha, ha !

-          Le professeur Christian Cabrol, voyons !

-         Ah, oui ! Je me disais bien, que votre nom, me disait quelque chose aussi, bien sûr le professeur Cabrol ! Oui, un bon chirurgien, m'a-t-on dit, vous lui donnerez le bonjour de ma part, Hervé Lénervé.

-         Il est mort le 16 juin 2017.

-         Attendez, je regarde mon agenda… le 16 juin 2017… non… je n'étais pas à l'hôpital, j'étais encore dans le BTP, un chantier difficile, ça ne peut pas être moi.

-         Vous ?

-         Qui l'a opéré, pardé ! Je suis clean !

-         Il a été écrasé par un bus.

-         Merde, personnellement, je prends le taxi, c'est plus sûr.

-         Oui, ok, mais dans quelle faculté avez-vous fait vos études.

-         Aucune école, madame Cabriole, je suis chirurgien autodidacte ! J'ai la fierté de mettre fait tout seul à la maison ! Je suis un one-man-man !

-         Un  self-made-man, peut-être ?

-         C'est pareil ! Ne chipotons pas sur les termes, seul le résultat compte et me voilà.

-         Vous m'inquiétez un peu, docteur !

-         Oh, restez simple avec moi, vous pouvez m'appeler Hervé. De toute façon je n'ai aucun diplôme, je ne voudrais pas usurper le titre de Docteur, c'est un délit répréhensible par la loi et puni d'une peine pouvant aller jusqu'à quatre ans d'emprisonnement sans sortie. Il ne faut pas plaisanter avec la santé ou on s'y retrouve à la Santé, ha, ha !

-         Mais à quel titre exercez-vous, alors ?

-         Au titre auto-proclamé de meilleur chirurgien de Sarcelles-Lochères. Je suis le chirurgien de l'ombre, j'opérais, à la lumière d'une bougie, dans les caves des bars de HLM. J'ai tout appris sur le tas.

-         Mais de quel tas, me parlez-vous, à la fin ?

-         Le tas,  de tous ces cowboys qui voulurent me donner une chance de réussir dans la vie au péril de la leurs. Je ne les ai pas déçus… tous morts !

-         Des cowboys ? Des cobayes, peut-être ?

-         Oh ! Vous êtes une sacrée chipoteuse, vous ! Madame Carriole. Allez, reposez-vous bien, demain est un grand jour, pour vous surtout, car pour moi, ce n'est qu'une opération de routine, du tout-venant, du tout cuit ! J'ouvre, je retire, je referme et le tour est joué.

-         Mais enfin, qu'allez-vous me retirer, c'est un problème cardiaque.

-         Attendez… cardiaque… oui, ça me dit quelque chose ! J'ai déjà opéré un cousin qui avait, lui aussi, un problème cardiaque à la cuisse. Figurez-vous qu'il est mort du cœur, quelle misère quand même, on rentre pour un corps au pied et on sort les pieds devant. Ah, quel malheur ! Voilà, voilà, on papote, on papote et pendant ce temps-là, le temps passe, je vous laisse, madame Gondole, allez on prend rendez-vous pour demain, soyez à l'heure sans faute où je commence sans vous.

-         Mais…mais…mais…

-         Y'a pas de bée… on fait comme ça ! Je m'évapore, car j'ai une soirée avec des vieux potes du BTP, ça ne va pas être triste, je vous l'assure ! Au revoir, madame Carmagnole, je vous dis adieu tout de suite, car avec l'asphyxie vous ne me verrez même pas.

-         L'anesthésie, peut-être ?

Ha, ha, sacrée chipoteuse, vous faites, madame Carambole !

  • LOL ! Les mots sont dangereux lorsqu'ils sont approximatifs surtout dans certaines situations :o)

    · Il y a plus de 5 ans ·
    Gaston

    daniel-m

    • J’ai connu un chirurgien qui confondait anesthésie avec autopsie. Aussi avec tous leurs mots en « sie » dans le domaine médical. :o))

      · Il y a plus de 5 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

  • Celui-là, ce n'est même pas la peine qu'il essaie de m'approcher, cela risquerait d'être du brutal...comme disait un certain cinéaste :)

    · Il y a plus de 5 ans ·
    W

    marielesmots

    • Mais non, tu seras anesthésiée avant le charcutage. Tu ne sentiras rien du tout sur le coup, c'est après que ça fait mal ! Aie, aie aie ! :o))

      · Il y a plus de 5 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

  • Ah, ah, ah ! Je ne me suis jamais fait encore opérer, mais sûr Hervé que je retiens déjà ma place !!

    · Il y a plus de 5 ans ·
    Louve blanche

    Louve

    • Moi, je me suis fait tant opérer qu’ils ont fini par me donner le titre de docteur honoris causa ! :o))

      · Il y a plus de 5 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

  • Pour amputer un menuisier doit être certainement à l'aise, pour les artères un plombier ne doit pas être perdu et peut y voir un débouché, et pour les membres cassés le plâtrier serait tout à fait à sa place.

    · Il y a plus de 5 ans ·
    30ansagathe orig

    yl5

    • Docteur es plomberie, docteur es menuiserie, docteur es enduits… on s’y perd avec toutes ces spécialités en médecine ! :o))

      · Il y a plus de 5 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

  • Bonjour!

    · Il y a plus de 5 ans ·
    1338191980

    unrienlabime

  • Super drooole!

    · Il y a plus de 5 ans ·
    1338191980

    unrienlabime

Signaler ce texte