Colère noire

Tel un étalon trop fougueux
Il rugit en ses antres
Ecorche le rocher
De ses coups de boutoir

Malheur à celui
Qui entrave sa vague
Même les troncs si lourds
Des arbres suppliciés
Deviennent fétus de paille

Comme l'enfant rebelle
Il balance ses quilles
Enfantine colère...

Colère de l'amant
Délaissé par sa belle
Son rayon de soleil
Jetant à tout venant
Tout ce qui lui rappelle
La vilaine traîtresse
Ayant osé
Pour quelques temps
Quelques temps seulement...
Le laisser pantelant

En cette heure qui se lève
Crevant les lourds nuages
Un timide rayon
En vain
Flatte sa croupe hurlante

Menotte bien dérisoire
Qui implore pardon
Mais l'Océan fumant
D'une écume rageuse
Préfère s'allier au vent
Son fidèle complice
Et le souffle mutant
Se déchaîne, cruel
Sur le sable innocent

Etourdissant ballet
De fureur décuplée

Tout là-haut, sur la grève
Des bambous égarés
Frémissent, sans comprendre
Les oiseaux se sont tus
Seule la mouette bravache
Affronte le courroux
De ce grand manitou
Ce maître incontesté

Comme l'enfant rebelle
Il balance ses quilles
Enfantine colère
Mai qui, sans crier gare
Au sourire bien trop bleu
A la caresse chaude
Se calmera pourtant...