Conclusion

     "Dessine-moi un mouton"  l'autre répétait avec insistance, j'en ferais quoi moi? Dessine-moi une histoire, plutôt, dans laquelle je puisse me voir. Un miroir. Dessine-moi de A à Z le B.A. BA de mon état. Raconte tout, raconte-moi, tout. Un roman d'aventure, une épopée, une romance à l'eau de rose, un roman noir, de gare, un polar, une tragédie... dessine-moi tel que je suis, mes creux mes bosses mes fautes et mes ratures. Réinvente-moi s'il le faut, sous ta plume rends-moi plus laid, rends-moi plus beau, travestis-moi, déguise-moi à ton image dans un costume ponctué de jeux de mots. Prends la parole, la mienne je te la donne, parle à ma place et fais-moi dire ce qui te plait, ce qui t'arrange. Un monologue étrange. Joue de tes mots, jouis de ta langue, comme bon te semble. Fais-moi marcher aussi, empare toi de ce corps dont je ne sais quoi faire, fais-moi courir, vagabonder entre les pages sans parvenir à m'en sortir. Un avant goût de liberté avant de m'assouvir. Raconte-moi des histoires à dormir debout, le grand méchant loup, je veux y croire, je veux le voir. Donne-moi une reliure, une quatrième de couverture, une préface et un sommaire pour mieux pouvoir m'y retrouver. Emprisonne-moi dans ton récit, donne-moi la vie, les péripéties, et pour finir un épilogue en guise d'épitaphe. Ma conclusion. 

- Extrait de Interrup(m)eu(r)t, roman d'auto-fiction en cours d'écriture.