Cure d'onanisme
ernestin-frenelius
Il y a juste un père avec ses deux jeunes gosses
Je les avais déjà vus sur le quai
Eux ils me semblent clairement typés indiens
Mais bon on ne sait jamais hein !
Maintenant ils sont installés loin
Deux rames plus loin
Et il y a bien sûr le chauffeur
Je n’y pense jamais au chauffeur
Où plutôt le conducteur
Il est installé dans mon dos
J’ai entendu le bip-bip qui annonce le départ
On est parti
Premier arrêt
Un jeune homme monte avec son téléphone
Un monsieur installé quelques mètres en face de moi se cure le nez
S’il savait que je l’écris
Ça commence bien
Relevons la tête
Deuxième arrêt
Seule une jeune fille est montée
Dans la rame derrière moi
Je me suis retourné mais l’ai à peine entrevue
Il faut que je fasse gaffe
Et que je ne prenne pas trop de risque
L’on risquerait de me décrypter
Troisième arrêt
Je crois qu’il y a juste une personne qui est descendue
Le type en face de moi ne se cure plus le nez
Ah si !
Je l’écris de nouveau sur le fait
La fille installée derrière moi m’intrigue
Mais que puis-je y faire
Même si je me retournais
Je ne la verrais
Maintenant le monsieur se gratte l’oreille
Nouvel arrêt
Monte un couple de blacks accompagné d’un ami noir aussi
Ils ont un bon accent et parle bien fort
J’aime
Ça égaye
Il y a de nouveau quelqu’un qui s’est carré pile en face de moi
Je ne peux plus voir si le monsieur se cure ou se gratte
Trouver autre chose à écrire
Une lectrice m’a demandé pourquoi il n’y avait que des filles qui tripotaient leur téléphone dans les trams que je prends quand j’écris des poèmes.
Ce n’est pas le cas
Un jeune homme assis à ma gauche tripote son téléphone
L’onanisme est offert à tous
C’est le forfait qu’il faut payer
Mais arrêtons de digresser
Le tram risquerait de dérailler
Les blacks égayent toujours la rame
Maintenant le jeune homme caresse son téléphone
C’est un modèle technologie tactile
Ça change
C’est marrant je vois les passagers installés dans un autre tram qui démarre à nos cotés
Mais je n’ai pas le temps de les écrire
Et toujours ce mec planté en face de moi
Il a un tatouage sur le bras et des anneaux en bois dans les lobes des oreilles
Super
Rien d’autre à écrire à ce propos
Les blacks sont un peu moins loquaces
Mais l’un d’eux ricane comme un vieux sorcier malgache
Ce qui ne gâche rien
Il y un mec qui vient de monter debout à mes cotés qui a l’air complètement pété
Il observe les blacks un bon moment avant de s’installer
Peut-être n’est-il pas méchant
Je ne sais pas
Je n’ai pas envie de l’observer
Ni de l’écrire
Ah mais par contre cette jeune fille
Dommage qu’elle s’apprête à s’en aller
Pendant un instant on s’est regardé dans les yeux
Mais je suis trop timide
Et comme un con j’ai baissé les yeux pour l’écrire
Maintenant je vais arriver
Sans doute que plus jamais je ne la reverrais me regarder pendant que je la regarderais
Et j’ai pas pu m’empêcher de l’écrire.
Tu devrais contacter la compagnie qui gère le tram et leur proposer tes textes sur le sujet, ce sont de véritables publicités vivantes pour le transport en commun... Continue en tout cas ;)
· Il y a plus de 12 ans ·jones
Toujours dans les transports, Ernestin !?!
· Il y a plus de 12 ans ·Pascal Germanaud
Bravo! le cirque du quotidien est remarquablement bien décrit. C'est vrai que pour l’œil du créateur il y a tant de choses à voir dans la plus modeste situation! J' adore.
· Il y a plus de 12 ans ·AMISDESMOTS
amisdesmots
Ernestin, il ne faut pas louper l’arrêt quand on a un ticket...
· Il y a plus de 12 ans ·lavadrouille
mais comment trouves tu le temps d'écrire dans le tram... rire, trop de bruit pour moi.... en tous cas, c'est si vivant ! ça me fait penser à ces petits croquis faits sur des calepins, ou ces aquarellistes reporters qui saisissent l'instant....
· Il y a plus de 12 ans ·bleuterre