Deux brèves

Hervé Lénervé

Brève bête, va !

***

- Moi, j'me parfume plus depuis qu'on n'peut plus embrasser les femmes.

- Mais tu viens de m'embrasser, là ?

- Oui, mais toi, c'n'est pas pareil, c'est la famille ! Je parlais des femmes qui passent dans la rue, les passantes, quoi, à cause du virus c'est interdit, maintenant.

***

C'est chiant d'être esthète ! Moi, avant, j'étais esthète. J'aimais bien les beaux meubles, les beaux tapis, les beaux intérieurs, les belles demeures, les belles voitures... bon, on a compris. Et bien, j'étais maniaque au possible, esclave de ces putains d'objets qui devaient rester propres comme un œuf, sans un sou.

Maintenant je suis fonctionnel. Une maison doit être au service de celui qui l'habite et non l'inverse. Putain, la belle demeure, elle a morflé grave. Il fait froid dehors. J'ai un méchoui, pour trente personnes, à faire. J'allume un feu de camp au milieu du salon, en ouvrant deux fenêtres opposées pour évacuer  la fumée, ça marche ! Seul le plafond est tout noir et le parquet en pointe de Hongrie cramé.

Mes voitures de luxe je les conduis avec mes bottes de jardin pleines de boue.

Mon bateau, j'en ai marre de glisser sur le pont en teck, je chausse des crampons d'alpinisme et finis les glissades.

Je me demande, si je ne serais pas un peu partial en me vengeant de toutes ces années passées sous le joug de l'esthétisme.

***

Signaler ce texte