Discussion conjugale.

Hervé Lénervé

Est-ce que tu pourrais…

-      Mon chéri, est-ce que tu…

-      NON !

-      Mais je n'ai encore rien dit.

-      Inutile, puisque tu as déjà la réponse.

-      Tu ne veux pas savoir ?

-    NON ! Tes phrases qui commencent par « Est-ce que... » se terminent toujours par un après-midi à tailler les thuyas ou une journée à repeindre la grille. Alors, c'est non, je ne tiens pas à savoir !

-   Mais pourquoi faut-il toujours parlementer avec toi, pendant des heures, pour le moindre petit truc, c'est fatiguant à la longue.

-  Il n'y a pas à parlementer du tout, puisque tout est dit et parler est moins fatigant que de faire.

-    Tu ne pourrais pas, une seule fois dans ta vie, m'écouter et ne pas dire systématiquement non, d'emblée.

-     Ecoute, si je te disais Oui d'entrée, que pourrais-je négocier par la suite ?

-    Voilà, justement, c'est ça, on va parler pendant des jours, puis tu finiras par le faire de toute façon, donc gagnons du temps.

-    Je n'ai pas envie de gagner du temps, ni quoi que ce soit, c'est pour cela que je ne joue jamais.

-     Dommage, si tu avais gagné au loto, tu aurais pu embaucher quelqu'un pour faire la chose à ta place.

-    Si j'avais gagné au loto je me serais acheté une voiture de sport rouge pour partir à la mer bleue avec une fille blonde qui ne demande pas de lui décrocher une Lune mauve.

-      Ça fait toujours plaisir à entendre.

-         De rien ! je n'ai pas gagné.

-         C'était de l'ironie.

-         J'avais compris, mais moi c'était du sérieux.

-         Il suffit que je te demande de planter un malheureux clou pour accrocher un tableau pour que tu veuilles me quitter avec une autre. On mesure là, tout l'attachement que tu as pour moi. Tu es un goujat !

-        Un goujat qui assume.

-    Un beau salaud, oui ! Goujat c'est pour les personnes instruites.

-      Je t'en prie, je connais encore mes tables de multiplication.

-     Houlà-là, la belle affaire, je ne savais pas que j'étais mariée avec un intellectuel.

-       Tu me fatigues !

-    Et toi tu m'épuises, du verbe épuiser la patience de son épouse !

-       Et puis merde ! arrêtes de me faire chier !

-      Ça y est ! On y est ! La grossièreté, à présent, finalement je me demande si ce n'est pas moi qui vais te quitter.

-      Bon débarras !

-      Goujat !

-     Tu l'as déjà dit, on peut tout reprendre à la réplique numéro vingt, si tu veux ?

-         Je veux que tu me plantes ce clou.

-      Voilà, ce n'est pas compliqué, il suffisait de le demander clairement, sans tourner autour du pot. Ah, les filles, comme vous pouvez être compliquées. A quelle hauteur le clou, mon chou ?

-        Là !

-        Enlève ton doigt, tu dirais que je l'ai fait exprès, après.

BANG !    

-         Et voilà le travail ! Pas compliqué.

-     Merci, mon chéri, tu es un ange. Est-ce que tu pourrais maintenant…

-        NON !

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