Disparue (4)

Camille avait tout pour être heureuse, mais c'était vrai que sa vie sentimentale ne l'avait guère comblée... Héloïse s'était trouvée soulagée lorsqu'elle avait appris que sa fille était mutée en région parisienne. Pourtant cette dernière avait eu un coup de cœur pour cette petite ville de St-Palais, en Charente-Maritime. Elle aimait les longues promenades en bord de mer. Elle empruntait souvent ce chemin des douaniers si pittoresque, qui lui donnait parfois le frisson, avec ces murets de pierre, si peu hauts qui bordaient la falaise. Le regard tombait alors, à pic, sur les rochers torturés, déchiquetés, par la mer en furie, dès que la marée montait. Elle avait du respect, de l'admiration, pour ces arbres centenaires, dont les branches torturées s'accrochaient au sol, comme pour échapper à la furie des éléments. Et ces petits ponts de bois dont les lattes craquaient sous ses pas. Enthousiasmée par tant de beauté naturelle, elle y avait entraînée Héloïse et lui avait fait découvrir cette perle de petite plage, presque privée, que surplombait une villa aux volets bleus, dont la blancheur des murs tranchait sur le ciel d'azur.

-Dommage, tout de même, lui avait soufflé Héloïse, de quitter cette belle région.

-Mais, nous y retournerons ensemble, Maman, lui avait répondu Camille dans un grand éclat de rire, ce n'est pas le bout du monde ! Au contraire, ce sera même un enchantement, comme une redécouverte, il ne faut pas côtoyer trop ce que l'on aime, au risque de s'y habituer !

Camille avait donc quitté cette belle région, mais également Roman, son compagnon, avec qui elle ne se sentait plus en symbiose. Héloïse l'avait aidé à surmonter l'épreuve de cette séparation. Tout s'était bien passé, malgré tout, en bonne intelligence, mais les ruptures ne se font jamais sans que chaque partie y laisse quelques plumes. Mais, peu à peu, Camille avait retrouvé son dynamisme habituel. Elle s'était réhabituée à l'Ile de France où il fait souvent plus gris que soleil.

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Depuis une semaine, Héloïse traînait ses pas devant l'immeuble incendié. Tout le haut du bâtiment, aux fenêtres borgnes, était calciné, mais les flammes n'avaient pas eu le temps de descendre et de lécher le troisième étage. Héloïse put constater alors, avec un réel soulagement, que l'appartement où demeurait sa fille avait été miraculeusement épargné. Sentiment égoïste, certes, mais humain. Cependant, elle aurait préféré la retrouver blessée que d'être dans cette incertitude grandissante. Héloïse se fustigea d'avoir de telles pensées ! Mais comme ça "bouillonnait" dans sa pauvre tête, elle avait l'impression de devenir folle.

Elle se décida enfin à s'approcher de l'immeuble torturé, mais lorsqu'elle voulut en franchir l'accès, le gardien lui barra le passage.

-Bonjour, Madame fontaine, vous ne pouvez pas entrer, c'est trop dangereux !

-Mais...et vous ? lui rétorqua Héloïse

-Moi ! Je suis là pour regrouper quelques papiers importants ainsi que quelques vêtements. J'ai pu accéder à mon appartement en passant par ma loge. Mais voyez-vous même, ce cordon, à défaut de porte, en interdit l'entrée.

-Si vous me laissiez passer par votre loge, je pourrais accéder ainsi à l'appartement de ma fille. Ce n'est qu'au deuxième et apparemment cet étage est resté intact. Comprenez-moi, je n'ai aucune nouvelle d'elle depuis l'incendie !

L'homme sembla hésiter quelques instants puis se décidant brusquement :

-Bon, d'accord ! Mais je vous en prie, faites vite, je ne veux pas d'ennuis !

-Entendu, répondit Héloïse, je vous remercie !