Duo en ré mineur

Lutécia Cendrelle

« Le blanc a envahi mes cheveux, le mont de l'âge. Ma peau douce s'est ridée ; crevasses de ma beauté. Il y a si longtemps. Oui, il y a si longtemps que je t'aime. Le glacier de notre amour n'a jamais fondu. Le brasier sur nos corps ne s'est jamais éteint… »

 

Te souviens-tu ?

L'onde du jour sur mon ventre se posait. Un rendez-vous, un bouquet de frissons. Nue, je t'attendais.

Tu aimais tant me voir vêtir l'habit de l'amour. Alors je m'asseyais sur le bord du lit et j'attrapais les fourreaux noirs du désir.

Poussés par mes doigts agiles et lents, les vagues de satin avançaient sur ma jambe comme des lames iodées sur la jetée les soirs de houle. Tes yeux azur se noyaient dans l'écume noire qui sublimait le haut de ma cuisse comme un délice.

Puis l'autre jambe jouait de toi et le sourire naissait sur ton visage.

Je couvrais ma toison auburn, j'enfilais ma guêpière aux allures de Vénus, puis j'attachais avec soin le haut de mes bas, en riant de toi, pris dans l'essaim du désir.

Je t'offrais l'honneur d'emprisonner délicatement mes tiges de fleur dans leurs vases d'amour sur aiguilles-perce-cœur. Tu les cueillais, les respirais, les bisais. À genoux tu me regardais puis tes mains effleuraient mes jambes ensoiées.

Sur mes hauts talons je te dominais du regard, tu te laissais couler au pays des envies. Alors tes yeux brillaient dans la rue de l'amour, m'éclaboussaient de rais des encore.

Je luisais comme un bijou de valeur, à tes yeux, j'étais le bonheur.

Alors tu m'aidais à agrafer ma camisole d'amour, les rideaux laissaient passer les flèches du jour.

Je finissais ce strip-tease à l'envers, par un baiser, une étreinte sans retour.

Je te dénudais, envahi d'émoi, ma danse commençait, pour notre plaisir complice.

Puis heureux nous faisions l'amour, la tempête naissait à l'horizon, toutes voiles dehors, nous voguions sur la passion.

 

Te souviens-tu Rémi, mon amant, mon mari, du jour où je t'ai dit ? :

 

« L'école est finie depuis un moment, rentre chez tes parents mon enfant ! Aujourd'hui et pour toujours c'est gratuit… »

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