Fricassée de museau

Un truc dont j’ai horreur, c’est qu’on me la joue viande qui pleurniche. C’est vrai, ça veut apitoyer : ça énerve. Seulement c’est ça, les poules de luxe, Ruscoffs de surcroît, ça a beau être emperlouzé jusqu’au chignon, foulardé Hermès, maintien thé-biscuits, à la première mandale c’est les grandes eaux.

Pourtant, j’y avais été mollo ; la beigne aimable, juste pour le principe, respect à l’homme. Pas de quoi y aller au cri, répliquer à l’anathème.  Si encore je l’avais bourrée d’horions vilains, obligée qu’elle aurait été de se maquiller comme une caisse volée pour camoufler les séquelles…

Quand je pense que je m’étais pointé aimable. Un pot de guzmanias dans la pogne, et dans la glaude de mon lardeuss deux billets pour l’Olympia, où que se donnait justement Ray Ventura, son petit favori. Moi je préfère Mireille et Jean Sablons, alors c’était vraiment pour la mettre jouace…

A peine entré, pas bonjour ni rien, la voilà qui me dégringole sur le dôme. Que j’aurais monté un chanstique avec sa joncaille, remplacé les diams par des quartz bidons. Elle avait fait expertiser ! Des breloques de famille, qu’elle tenait de sa grande-daronne ! Une honte ! Lui faire ça, à elle ! Moi ! A califourchon sur ses grands gails, elle était montée. Moi, passée l’incompréhension, il a fallu que je calme le jeu, que je lui rentre sa poussée d’hormones à coups de mornifles. Parce que là, y’avait maldonne. Roulotter les bergères à la sournoise, c’est pas le style de la taule. Et puis quoi, encore ? Lui barboter sa Hotchkiss pour m’attriquer mes clopes ? Faudrait voir à pas confondre voyou et demi-sel, et phosphorer deux secondes avant de jaspiner. Les gonzesses, ça. Tout dans la jactance, rien dans la gamberge. Mon idée, c’était plutôt que l’aïeule aurait glissé dans la dèche entre Pétersbourg et Paname, et qu’elle aurait empégalé les brillants à ce moment-là, sans parfumer les héritiers de la chose. Un oubli bête… Faut dire aussi que dans ces cas-là, on n’envoie pas le duce à plein tambour. C’est que la mémé, elle avait fait une trotte, pour fuir leur révolution ! J’ai maté dans l’atlas : pas la porte à côté, son bled. Forcément, ça engage des frais…

Et voilà que la bonniche s’était radinée, guidée au barouf ! Elle avait commencé à y aller de sa gueulante, comme quoi je respectais pas la féminité de Madame, des conneries du même… Bon, si elle voulait participer à la veillée des chaumières… Moi, ça tombait bien, j’avais du bourre-pif de reste. Gentiment, je lui ai expliqué qu’il fallait toujours bien soupeser le pour et le contre avant de quitter une neutralité bienveillante qu’on pourrait regretter par la suite. Ensuite, une bonne tisane pour digérer ses incongruités… Et puis j’ai trissé, laissant ces dames se tamponner le tarbouif au merchurochrome.

Quand j’ai regagné ma 15, j’avais un peu mal aux phalanges. Qu’est ce que j’allais faire de ma sorgue, moi, du coup ? Bah… Une bonne soirée en célibataire de temps à autre, ça peut pas faire de mal.