Gare du Nord
vividecateri
Arthur pense qu'il est temps de dîner, s'il veut prendre le train de 9h30 à la gare du Nord.
A travers l'étoffe de son blouson, il tâte son portefeuille. Il ne lui reste plus grand chose. Il n'a pas les moyens de s'offrir un grand restaurant.
Pourtant, il s'imagine, en regardant la grande brasserie, qu'il peut y entrer pour s'y attabler tel un prince, avec les deux jolies filles qu'il voit par la vitre.
Et commander, pour elles, un menu de milliardaire…
Arthur ose, il entre dans l'établissement.
Fier comme un paon, il se dirige vers les quelques tables qui sont libres, non loin des filles.
Elles le regardent et lui offrent un joli sourire. Arthur est beau garçon…
Quand soudain, un serveur l'arrête
- C'est réservé jeune-homme, désolé.
Arthur s'éloigne en feignant l'indifférence…
Il s'installe au fond de la salle.
De sa place, il peut tout contempler. Il observe un maître d'hôtel, robuste, carré d'épaules qui gouverne avec énergie sa troupe de serveurs.
Il lance aux garçons des commandements secs, presque militaires.
Dans le brouhaha du fracas des assiettes, des couverts, des énoncés des menus, des plats et des boissons, les garçons répondent illico aux ordres autoritaires du chef.
Mais voilà, qu'il s'approche d'Arthur.
Le jeune-homme est terrorisé.
Avec angoisse, il se demande comment résister aux suggestions du chef de salle. Arthur pense qu'il pourrait invoquer un régime, pour éviter un plat trop onéreux. Mais il n'a pas l'air assez malade…
Arthur prend la carte tendue, il fait semblant d'étudier, de méditer sur les entrées, de faire des combinaisons avec les plats principaux…
- Une douzaine d'huîtres pour commencer?
Demande impérieusement le maître d'hôtel.
Arthur pince les lèvres et prend l'air agacé du gars qui serait saturé d'huîtres pendant toute la saison.
En fait, il n'en a mangé qu'une fois, le jour de l'an, chez sa grand-mère.
Arthur consulte rapidement la carte et désigne la crème de potimarron dont le nom amusant, ne l'intimide pas.
Le maître d'hôtel, en soupirant, change ses positions et renouvelle l'attaque par une fusillade ininterrompue.
- Alors, un poisson?... Une sole meunière?... Un dos de cabillaud à la Catalane?... Des crustacés?... Des queues de langoustes flambées au cognac?...Des moules Valentine?...
Arthur est abasourdi.
Pour ne pas vexer et infliger à ce savant de la restauration, l'affront du désintéressement.
Arthur demande:
- Qu'est - ce que, les moules Valentine?
- Des moules revenues dans du beurre, avec du persil, des oignons hachés finement, cuites dans du vin blanc et de la crème fraîche, servies saupoudrées de persil, accompagnées de pommes de terre grenailles.
Les moules inspirent à Arthur de la méfiance, elles lui donnent de l'urticaire.
Mais comment se dérober après tant d'explications?
Soudain, le voilà sauvé par l'apparition d'un couple, sûrement bien connu du maître d'hôtel, car subitement, celui-ci tourne ses canons, abandonnant d'un geste négligent, aux bons offices d'un jeune apprenti, ce modeste client trop indécis.
Ouf! Arthur se dépêche de commander un steak tartare avec des frites et une crème brûlée en affichant devant le jeune garçon timide et inexpérimenté, un air de compétence, pour racheter à ses propres yeux, son stupide désarroi.
Mais voilà qu'arrive, le sommelier, dont le tablier vert bouteille fait paraître encore plus livide le teint couleur champignon, de cet homme des caves.
Arthur refuse la carte, il désire une carafe d'eau.
Le sommelier se dirige lentement vers le bar et demande de l'eau en chuchotant, moqueur…"Pour la grenouille du fond"
Après le repas,
Arthur se lève, enfile son blouson en répondant au salut du jeune serveur.
Il ignore le maître d'hôtel, lance un clin d'œil aux jeunes filles, dit bonsoir au garçon qui lui ouvre la porte avec désinvolture.
Dehors, Arthur file tout droit vers la gare, repu et bien lesté de son repas, il affiche une béatitude supérieure à tout ce qu'il a connu depuis longtemps.
Dans la brasserie bondée, nul ne l'a remarqué.
Arthur est parti sans payer.
Bonne histoire, mais, quitte à partir sans payer, il aurait du commander le plus cher...la timidité certainement...
· Il y a plus de 10 ans ·arthur-roubignolle
Oui je sais mais au début du texte il ne savait pas encore qu'il n'allait pas payer...concours de circonstances... Et puis c'est de la faute du maître d'hôtel! Na!
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
Wahou ! je ne trouve pas les mots mais tenterais peut être un jour une fuite à la manière de ton personnage! Félicitation pour le rythme !
· Il y a plus de 10 ans ·Kiss Ali :)
Iris Mink
Faut pas!!! c'est vilain...;oD
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
Mais bien tentant!! tout comme les mets que tu décris ! alala ...
· Il y a plus de 10 ans ·Iris Mink
Princesse gourmande!!! humhum!!!
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
je plaide coupable !
· Il y a plus de 10 ans ·Iris Mink
C'est bien, je te pardonne...
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
ça c'est bon ! j'aime ! :-)
· Il y a plus de 10 ans ·Marc Menu
Merci marc, cela me rend heureuse quand tu aimes!
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
ravi de te rendre heureuse à si peu de frais, Viviane !
· Il y a plus de 10 ans ·Marc Menu
Si peu de frais! Serais-tu radin? De compliments...;oD Tu peux m'appeler Vivi comme les zamis. kiss
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
Ouah! merci! Kissous!!!!
· Il y a plus de 10 ans ·vividecateri
ah, la chute! quelle claque. C'est très bien vivi, et kiss pour cette fois de moi. Une écriture aérée, à la fois détaillée et suggestive, qui se met à très bonne distance pour respecter le lecteur qui prend le temps de regarder la scène.
· Il y a plus de 10 ans ·elisabetha