Happy Thanksgiving... miss Marny
Pierre Scanzano
Inspecteur... inspecteur Masterson, tenez...
- Qu'y a-t-il Sam,
- Un appel urgent pour vous, c'est l'agent... Rod...
- Rodriguez ? Passez-le-moi vite - Oui j'écoute...
(une petite espèce de flottement général... n'empêcha pas miss Marny, au timing huilé, de lui apporter une tasse de café ristretto).
- Posez-la-moi sur ce coin, merci miss Marny, chuchota l'inspecteur tenant le combiné noir en équilibre entre, l'oreille et l'épaule gauche.
- C'est Paco chef, Paco Rodriguez..., heu!... j'ai trois cadavres sur les bras... encore chauds. Mon collègue et moi avons été dépêchés par un appel radio du district de Manhattan. Nous sommes dans un appartement très cossu, au coin des rues Chambers et Hudson.
-Quoi ? Nom d'une pipe ! Soit sérieux Rodriguez, por favor...
- Ce soir c'est Thanksgiving, Pacooo !
- Ne le suis-je pas encore chef ? Bien, il s'agit d'un homme et d'une femme âgés. Un couple sans doute. Et ce n'est pas fini, chef. Un petit garçon de trois, ou quatre ans, fait partie du lot des victimes. Ils baignent dans une mare de sang épouvantable. Lardés de coups dans tout le corps
A-t-on une idée de quand, ont été perpétrés ces crimes odieux,
hein, Paco ?
(silence feutré...)
-Non, pas la moindre idée. La police scientifique n'est sur le pont que depuis un petit quart d'heure. J'ai comme la nette impression que l'assassin ou les assassins, ont élaboré une véritable mise en scène macabre, afin de nous compliquer l'enquête.
-D'après votre expérience dans ce domaine, selon vous, s'agit-il d'un crime aux caractéristiques d'un sérial killer ? Avec des obsessions du genre, sexuelle, satanique ou autre pulsion gratuite ?
-Du calme papillon ! Malgré mon oeil avisé, à ce stade de l'enquête il m'est difficile d'émettre une quelconque théorie. Ce serait un prédateur solitaire. Un inhibé, qui veut se faire remarquer par de la violence aveugle. Un fou furieux.
- Parfait... dis-moi, que sait-on d'eux ?
-Pas grand chose pour l'instant, je le saurais d'ici quelques instants.
-Eh! Masterson, je n'ai jamais vu un crime exécuté avec autant de sadisme. C'est un carnage chirurgical. Tu sais, moi j'ai cinq enfants... Maria, Dolores, Carm...en,
-Tout doux... Paco, je sais, je sais, et Carmencita, puis Manuel , n'est-ce pas ? (petit rire nerveux...)
-Bon, revenons à notre affaire de meurtre...
-Nos meurtres ? Je dirais une bou-che-rie...
-Bon, j'ai quelques éclaircissements concernant l'identité des victimes.
- Il s'agissait de Pat et Rose Fitzpatrick, et d'après le voisin et ami, ils étaient mariés depuis plus de trente ans. Le petit garçon était, Dany Fitzpatrick fils de John. John leur fils unique, tué pendant la guerre du golfe.
- C'est pas vrais, dis... de la Fitzpatrick & Fenton Company ?
-Oui, un des gros bonnets de la finance, qui ont pignon sur rue à Wall Street. Dont les milliards les gênent tellement qu'ils ne marchent pas droit !
- La presse ne tardera pas à s'emparer de l'affaire, Paco, ça fera un grabuge planétaire. Nom de dieu... je vois déjà les unes du Financial times & friends du même bord.
-Ce n'est pas tout Bill, t'es assis dans ton fauteuil râpé ?
-Oui,
Les trois Fitzpatrick ont été ficelés avec du fil électrique. Assis sur des chaises à cinq cent cent dollars pièce. La bouche ouverte et bâillonnés. Apparemment, le sadique les a torturés lentement, très lentement. J'ai bon avoir un estomac d'acier. J'en ai vomi tout mon chili de midi.
-Assez, n'en rajoute pas des tonnes Paco, fais-moi un rapport détaillé que je puisse m'y plonger sérieusement, demain matin, ok ?
-Sais-tu chef que ce salaud, ce soir, sera comme nous, devant la dinde de Thanksgiving. Peut être, avec ses gosses et sa femme - , ça j'ai du mal à l'encaisser !
-On aura ce salaud !
-Si, Bill Masterson, je l'aurais !
-Marny vous partez ? Oui. Vous restez ? Non, mais je pars dans dix minutes.
Alors, Happy Thanksgiving... miss Marny - A vous de même Bill...
Bill Masterson lui lâcha un sourire doux, carnassier. Marny le considéra avec tendresse, et ferma délicatement la porte vitrée. Plus tard, Masterson dévala les marches quatre à quatre. Haussa les épaules devant la sortie, rentra le cou puis, remonta le col de son trench-coat froissé. Huma l'air. Et d'un sautillement léger engagea sa haute stature sur le trottoir visqueux de lumières jaunes, bleues, vertes, rouges. Héla un taxi, et disparurent par mimétisme vers Broadway, dans la cohue du trafic et des touristes. Bill avait dans sa tête, la mélodie de Miles Davis, composée pour le film: Ascenseur pour l'échafaud, de Louis Malle.
merci, Marilyse...
· Il y a environ 11 ans ·Pierre Scanzano
Ça se lit tout seul !
· Il y a environ 11 ans ·Marilyse Leroux