Immersion

Une porte  verte qui court  dans l'herbe et s'ouvre en écurie comme un corps séparé  de sa tête.

Sur le seuil déjà vous saluent les couleurs dans la pièce aux angles effacés,

où la douce chaleur du bois et des tissus invitent à l'abandon aussitôt arrivé.

Un puits de ciel perce le plafond blanc  et ruisselle ses belles ondes plein centre.

Plein cintre.

Grande respiration, aux fumets de cuisine, d'encens et d'essences précieuses.

J'ose faire un pas et voilà le regard arrêté sur les chats gargouilles, gardiens

du lit, le panier à confitures qui se balance aux désirs de la princesse, les bougies

brûlantes et  les mille petites légendes des objets qui racontent l'histoire du  monde,

celle de son monde, à lui.

Une maison à son image, pièce unique et multiple, cocon arc en ciel et recoins de pénombre.

Sur le tapis, au cœur de cette île, je palpe la  tendresse qui flotte.

Un tour de vie dans trente mètres carrés plutôt  ovales : instruments du chemin passé, dans le sillage de la mer, autels aux sacrés dédiés, les divins et les humains.

La musique et le lit imposants souverains, un refuge d'écritoire, une caméra pour demain, une table généreuse en bonne place, la cuisine parfumée d'épices...

Chaque espace bien dessiné par d'invisibles frontières en fondues enchainées.

 Celui qui croira à un joyeux bordel restera dans l'apparente imagerie.

Pressentir le chantier, l'esprit en construction, le mouvement…

Les meurtrières du mur sont des hublots et le ciel a percé le plafond.

 Il est là, le bateau, posé dans les herbes folles à flanc de colline.

L'air et l'eau, ses deux éléments à lui qui cherche racines pour s'amarrer enfin.