Irezumi (2)
christinej
Cela fait deux semaines maintenant que j’ai rencontré Maitre Hori. C’est aujourd’hui que je dois le retrouver pour ma première séance, enfin selon lui, ca sera ma première et ma dernière.
Je dois rester chez lui 3 jours pour commencer, ensuite je viendrais le voir une fois par semaine.
Il m’a installé dans une chambre minuscule, sans décoration, avec juste un lit, une chaise et comme seul source de lumière une fenêtre de la taille d’un hublot.
Je n’ose pas bouger. Assis sur le lit, dur comme une pierre, j’attends.
Apres je ne sais pas combien d’heures ou je suis resté a ruminer, ma porte s’est enfin entrouverte.
La petite vieille, toujours aussi mecontente, apparut dans l’entrebâillement.
Elle me dit quelque chose dans une langue que je connais pas, enfin j’imagine qu’elle m’a parlé car honnêtement, ca ressemble plus a un grognement qu’a autre chose.
Et la, façon toupie, elle tourne les talons et s’en va me laissant un tantinet ahuri, la bouche ouverte prêt a gober des mouches.
Bon je crois qu’il faut que la suive.
Décidément ils aiment la pénombre dans cette baraque, le couloir dans lequel je m’avance est étroit et si peu éclairé que j’ai du mal a voir mes pieds. Je distingue la silhouette de la petite vieille qui trottine devant moi. Je la vois qui tourne sur la droite.
Arrivé a l’endroit de sa disparition, il y a des escaliers qui s’engouffrent dans une noirceur épaisse et inconfortable.
J’imagine que je dois descendre.
Ma salive se fait rare, j’ai la bouche sèche et les mains moites. J’ai les nerfs tellement tendus que chaque mouvement est une torture.
La première marche est la plus dure, car c’est la que l’on décide d’y aller, ensuite j’ai arrêté tout simplement de respirer, comme si la noirceur qui allait m’envelopper, était liquide et corrosive.
L’escalier en lui-même n’est pas très long, mais pour moi ca a duré une éternité, hésitant a chaque pas.
Je n’ai pas a avoir peur je sais ce qui m’attend.
Déglutir m’est impossible, je passe sur mes lèvres craquelées une langue rêche et dure.
Bon sang qu’Est-ce qui m’arrive a la fin?
Comme une réponse a cette dernière pensée, quelqu’un eut la bonne idée d’allumer ce sous-sol franchement lugubre, pour me détendre un peu.
Maitre Hori, allongé a même le sol, une longue pipe a la main, lance des volutes de fumée bleutées.
La salle ressemble a un atelier de bricolage. Des pots, des tiges et toutes sortes d’instruments dont j’ignore l’origine et surtout l’utilisation encombrent une table poussée dans un coin. Il y a également une chaise qui ressemble a celle d’un dentiste. Sur le sol un tapis usé est recouvert de coussins en tout genre. Un tabouret rouge trône au milieu, comme le roi des lieux. Sur une étagère des livres sont entassés et tout un tas de feuilles ou je peux deviner des dessins, des notes, des couleurs…
Cela fait maintenant quelques minutes que je suis la et je commence juste a sentir l’odeur qui règne ici. Une odeur indescriptible de sueur, de charbon, de peur et d’un tas de fragrances qui me piquent le nez.
“ Assis toi petit!”
Je regarde désespérément autour de moi pour me trouver un siège autre que le tabouret et la chaise de dentiste.
D’un geste sec il me désigne le sol. Il ne me reste plus qu’a obéir.
Je croise maladroitement mes jambes rouillées et essaie de trouver une position confortable ou tout du moins acceptable.
“ Alors petit, raconte moi ton histoire pour que je puisse commencer le Tebori.”
“ OH! Ok. Par ou commencer. Je ne vais pas vous ennuyer avec mon enfance, cela n’a rien de passionnant. Je vais commencer par, il y a 5 ans de cela. J’avais une sœur, une gentille sœur toujours souriante, aimable, un ange. Et….un jour…un individu l’a agressé. Violée, battue…enfin vous voyez. Elle était a peine en vie quand il l’a laissé dans la ruelle.
Elle est restée 3 mois a l’hôpital. Elle ne voulait pas porter plainte car elle n’arrêtait pas de dire qu’elle avait honte, qu’elle se sentait sale. Ma famille et moi on a essayé de la soutenir du mieux que l’on pouvait mais elle s’effaçait chaque jour un peu plus….elle a finit par se suicider….”
La peine, la brulure, l’impuissance de ce moment brule en moi encore aujourd’hui, c’est tellement dur de parler d’elle sans pleurer ou hurler.
“ A ce moment j’ai perdu les pédales. Je me suis mis a boire plus que de raison. La vodka était mon poison. Je suis devenu fou, fou de douleur, fou de rage. Je voulais m’arracher le cœur pour ne plus avoir mal. Mais une autre idée a fleuri dans mon esprit. La vengeance.
J’ai cherché, creusé, j’ai suivi toutes les pistes possibles et inimaginables. Et je l’ai enfin trouvé. Cette raclure, son tortionnaire, son meurtrier.”
Maitre Hori me regarde sans broncher, sans laisser apparaitre la moindre émotion. J’ai commencé, je ne peux plus faire demi-tour.
Je prends un grande inspiration et je continue mon récit, sans oublier de ravaler au passage mes larmes et ma rage.
“ Je suis rentré dans son univers, on est devenu des “potes”. buvant la nuit, draguant comme des malpropres, des parasites inséparables l’un de l’autre. J’étais méconnaissable, je me dégoutais pour dire la vérité. Et un jour après bien des verres il s'est mis a parler de cette nuit avec ma sœur. Il en bavait encore excitation, il m’a raconté en détail comment il avait jouit en elle, comment elle avait essayé au début de se défendre mais après trois coups de poings elle était devenue coopérative, docile, tellement douce. La je ne sais pas exactement ce qui s’est passé tout est devenu blanc, confus, froid. Quand j’ai repris connaissance, j’étais allongé dans une marre de sang et dans ma main je tenais quelque chose de mou. Je lui avais arraché le cœur. Il ne ressemblait plus a être humain, plus a un tas de chair passé au mixeur. Je ne suis pas senti mieux, je n’avais pas de regret ni même une once de pitié pour ce dégénéré.”
Mon souffle est hachuré, tranchant. Je baisse la tête je ne veux pas croiser son regard. Je dois continuer.
“ Les jours, les mois sont passés avec l’illusion que tout allait bien. Que j’allais bien. Mais j’avais tord bien sur. Ce que j’avais fait me rongeait de l’intérieur comme une bactérie mangeuse de chair. J’étais entrain de me perdre, je voulais rejoindre ma sœur. Trouver enfin la paix. Et elle est rentrée dans ma vie, comme un papillon délicat, comme un rayon de soleil…”
“ OK petit ca suffit pour aujourd’hui. Un repas t’attend dans ta chambre. Mange, repose toi et demain on commencera le Sujibori.”
“ Mais je….”
Mais il me tourne le dos pour mettre un terme a cette conversation. Je ne sais plus quoi penser.
Toutes ces émotions que j’ai fait resurgir me font tourner la tête. Mon cœur bat si fort qu’il me fait mal.
Comme un somnambule je retourne dans ma chambre. Sur la chaise est posé un plateau avec des choses qui ressemblent a de la nourriture. Tout est trouble, brumeux.
Je chute, je sais, je le sens mais je ne contrôle plus mon corps….
Tebori : tatouage a la main
Sujibori : tracer le contour du tatouage
Tu vas un peu vite en besogne dans le déroulement, et ton tatoueur ressemble un peu à Onizuka, la vieille à yubaba dans chihiro, le magasin à celui de yuko dans xxx holic... MAIS... ok l'histoire m'intéresse. Je pense que tu as peu d'expérience de l'écriture et que tu t'es exercé dans des role play. J'ai presque envie de jouer avec toi... je vais voir la suite. Si tu veux quelques conseils sans prétention je suis là, n'oublies pas que tu dois mettre un côté très théâtrale dans le déroulement, et marque bien des pauses d'actions pour soutenir les tensions. Tu sais qu'un japonais exprimme la force des choses plus avec des attitudes codées qu'avec des mots.
· Il y a plus de 11 ans ·jone-kenzo
Très bonne histoire. Tu m'as emporté dans les méandres d'un cerveau douloureux de souvenirs enfouis. Tes personnages sonnent juste.
· Il y a plus de 11 ans ·Françoise Grenier Droesch
C'est excellent ! Je n'ai rien à dire si ce n'est que je suis impatiente de savoir ce qu'il va se passer ensuite ! Ce maître Hori est franchement intriguant. J'adore !
· Il y a plus de 11 ans ·octobell
Quelle merveille ! Les personnages criants de vérité, le décor japonais entre délicatesse, noirceur et élévation ! Magnifique ! CDC et la suiite !
· Il y a plus de 11 ans ·matt-anasazi
Waow... mais quelle histoire ! ta descriptions des lieux est tellement précise qu'on s'y croirait, et puis j'aime beaucoup tes images, comme "la noirceur liquide et corrosive".
· Il y a plus de 11 ans ·Sinon c'est super d'en apprendre plus sur sa vie, sur le pourquoi de comment il en est arrivé là.
Enfin voilà, j'adore cet univers ! Bravo !
rafistoleuse