Jo

C'est un peu un marin Jo, mais son seul toit, son endroit tout chaud, c'est sa femme.

Il aime ça, partir, se bâfrer toute l'Europe, les sentiers et les boulevards qui scintillent pour ne jamais avoir le même goût dans la bouche, prendre l'air et en faire de petits tas pour les soirs sans étoiles. C'est un bancale, Jo, un mec un peu à côté qui s'écorche pour voir ce que ça fait, sa piaule toute grise il la garde pour les jours de pluie et encore, il préfère le bitume, sentir le pavé froid et bouffer de l'horizon. Quand il n'est pas barré je ne sais où, il est Parisien au jour le jour, les lèvres toujours percées d'un de ses sourires, un peu bohème et musicien, un enragé d'avenir quand moi je ne sais que me souvenir.

 Je l'ai toujours trouvé un peu fou d'aimer tant la vie Jo.

 Il fait un peu bellâtre comme ça à le croiser pour la première fois, c'est une gueule d'amour avec les traits encore douillets d'un gosse, du genre à faire saliver les connes rive gauche, mais il en a rien à foutre des jupes trop courtes et des jambes trop longues lui sa came c'est les nuages et enfouir sa tête bien dedans.

Deux fois par an il rentre de nulle part traînant encore cette odeur d'océan et de bière tiède.

Il a beau vivre la grande vie à Paname et vagabonder de quais en capitales, il est resté le mec que j'ai connu, il se pointe toujours avec l'air de ne nous avoir jamais quitté, un harmonica pendu au cou et une mélodie sous le coude. Quand il se met à jouer, il n'y a pas un centimètre de lui qui ne transpire pas ce qu'ont les plus tristes, c'est comme s'il te chialait la Seine, ses sourires s'effondrent sous ses doigts qui broient sa guitare pendant que ses silences résonnent à m'en fracasser le cœur.