La femelle du 16ème

Cathy Galliègue

Ce quartier du 16ème arrondissement était peuplé d'animaux étranges, essentiellement des femelles à poils longs et à peaux lisses.

Le mâle peu visible de jour, était occupé à rapporter à sa femelle son butin quotidien. Tendus comme des arbalètes, les visages sans expressions affichaient une moue boudeuse imposée par le repulpage massif des babines.

Le tout était crayonné, badigeonné et mis en lumière par les plus grandes marques. La crinière se voulait résolument balayée, ni trop courte ni trop longue dans un mouvement souple et faussement décontracté. Le chic absolu du coiffé-décoiffé sans avoir l'air mais en ayant l'air un peu quand même… Tout un art.

Ça regardait le reste du monde de haut. Ou plutôt non, ça ne le regardait pas. Ça le survolait. Ça surnageait au-dessus de la populace, interpelait le petit commerçant par son prénom avec une condescendance poisseuse, ça comptait ses sourires artificiels, les distillait à doses homéopathiques et à qui de droit.

Ça s'écoutait parler. C'était ridicule mais ça ne le savait pas…. ça ne l'envisageait même pas !

Pour rien au monde je n'aurais échangé ma vie contre la leur. Je leur laissais leurs appartements de standing, leurs maris très riches et très absents, leurs chiwawas, leurs chirurgiens esthétiques, leurs carrés Hermès et leurs cœurs tout secs.

Peu m'importait la faune environnante, j'avais déjà vu pire.

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