La terre peut s'écrouler.(1)

Les murs de la maison tremblaient fort depuis ce matin. Comme selon les recommandations des spots info-alerte- magnitude-7 de la bande FM, l'on s'était mis sous la table de la cuisine pour ne pas prendre une tuile de plus sur la gueule.

Cela faisait bientôt 3 heures que le toit nous tombait dessus. Betty avait les dents qui finissaient par grincer :

- T'as peur ? lui demandais-je accroupi.

- Devine ? Et encore, t'as pas vu toute ma culotte !

Betty mouillait facilement de celle-ci dans une angoisse. Son généraliste avait traduit cette petite incontinence urinaire par une sorte de 'pipi de souris à l'approche du matou'.

Betty se laissait facilement convaincre par la Science. Elle disait des médecins qu'ils l'avaient infuse, et que moi, pas.

Hier, au contrôle technique de ma voiture, et en attendant le résultat de son diagnostic mécanique, j'avais eu la même sensation d'eau tiède sur le haut de mes cuisses. Avais-je moi aussi choppé la pissette du Mickey ? Moi qui connaît mieux mon corps que n'importe qui d'autre, j'avais traduit ce relâchement pisseux, par un laisser-aller quant au manque d'entretien de ma Mercedes (42 ans d'âge). Je ne la bichonnais plus depuis un certain temps et je savais qu'une fuite sous moteur ne validerait pas son aptitude à rouler encore, alors que si j'avais eu un peu de bon sens avant de l'emmener au diagnostic, un simple essuyage au chiffon doux, aurait suffit a éponger l'affaire. Quelle ne fut pas ma surprise quand 45 minutes plus tard, l'homme qui s'était occupé d'elle pour en ausculter toutes ses parties intimes, m'annonça :

-  C'est tout bon !

La Merco rempilait pour deux ans ! J'allais pouvoir fleurter de nouveau avec elle, rouler le coude par sa fenêtre ouverte, éteindre mes cigarettes dans son cendrier inox et faire ronronner ses 6 cylindres aux feux rouges. J'étais l'homme le plus heureux de ma génération, j'avais acquis un nouveau supplément d'âme.

La terre pouvait bien s'écrouler.

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