L'adieu à une fée

Natacha Karl

Photo : Bill Viola - Passage into the night

Je ne sais pas quand tu partiras. Je sais juste que c'est très bientôt. Les tiens t'accompagnent et se préparent. Très courageusement. On ne te laisse pas.

Tu pars devant. 

Où? On ne le sait pas. C'est juste trop tôt, beaucoup trop tôt et nous ne devons pas craquer, nous te devons ce courage, d'un même courage que celui dont tu as fait preuve. Pour que ton dernier souffle soit paisible. 

Tu pars. Tu es déjà sur l'autre rive, sans mots. Tu as tes yeux, tes oreilles, mais ton corps est si meurtri... Tu nous vois, nous entends. Nous te regardons dormir, nous attendons tes réveils. 

Moi je fais tout ceci en pensée car je ne peux pas aller te voir. Je suis avec toi autrement, avec mes pauvres forces. Te savoir entourée des tiens, savoir tes enfants soudés et merveilleux à ta ressemblance, c'est un réconfort, bouleversant. 

Je ne t'ai pas assez montré combien je t'aime. Je ne t'ai pas approchée d'assez près. J'ai eu la grande chance de te rencontrer. J'aurais voulu avoir la vie entière pour apprendre à te connaître de plus en plus...
Une sorte de pudeur. Le respect de ta vie si remplie. Comme si nous avions toute la vie devant nous pour nous connaître davantage et nous rapprocher toujours encore. Voilà... 

Où seras-tu quand tu ne seras plus là? La question me taraude. 

Tu seras dans nos mémoires. 

Tu survivras dans tes enfants.

Tu seras dans mon violon. 

Tu seras dans les poupées russes que tu m'as confectionnées que je chérirai encore davantage. 

Tu seras dans le ciel du Mexique. 

Tu seras partout dans le coeur de tous ceux qui t'aiment et attendent ton départ le coeur chaviré. 

On dispersera tes cendres. 

On te dira adieu. Sophie....

Après l'adieu tu seras là, Sophie. 

Encore. 

Toujours. 


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