Le blues du dictateur
chevalduvent
Un arbre. La mélodie des feuilles désinhibées par le vent. A l’horizon, le soleil en demi-cercle à hauteur d’homme. Mes yeux trébuchent sur les hanches d’une passante et mon cœur prend l’ascenseur. Ma vision du Salut. La troisième cette semaine. Inspirée des 24 photographies du système que mon regard use à coup de fantasmes. Je n’ai pas subi d’électrocution pour violation de l’article 7 prohibant l’accès à toute forme de pensée abstraite car je suis à l’origine de ce châtiment. A l’origine de chaque mot figurant dans le Règlement Universel. J’ai tous les droits.
Aujourd’hui j’ai décidé de partir. Au sens lugubre du terme. Je ne sais qui je suis ni me suit, j’ignore le point de départ. Le final m’appartient.
Au commencement, ma tête reposait sur un livre d’instructions dont la grossesse couvait trois injonctions : « 1. Restez connecté 2. Rédigez le Règlement Universel – le RU (voir indications manuel 87B) 3. Pilotez le système ». Mon premier réflexe: honorer la fuite dans son habit le plus impulsif. Dans cette pièce blanche comme un linceul divin, aucune porte. Au bout des 6 premières minutes – dixit l’horloge numérique rouge sang dévoilant le chiffre 6 précédé de 7 zéros – mon cœur cognait avec la force d’un canon, balançant des projectiles sur la paroi de ma poitrine. Ma respiration, haletante, ainsi qu’une fatigue digne des préludes de l’inconscience trahissaient une anomalie. Je m’évanouissais. L’instinct aidant, je compris rapidement que la sonde que j’avais arrachée dans l’agitation devait réintégrer la chair de mon avant-bras. « Restez connecté », c’était pourtant écrit.
J’avais failli perdre la vie en enfreignant la première règle. J’honorai la seconde sans hésitation et rédigeai le RU muni du manuel 87B, un livre d’histoire. Décharné, les quelques explications qu’il contenait tenaient dans 6 paragraphes, tous garnis d’un titre. Un sommaire aurait ressemblé à ceci : « La Première Guerre Mondiale. La seconde. Le 11 septembre. La rupture. Le nouveau monde. Le règne de l’individualité ». Puis une myriade de feuilles vierges. Jusqu’à son terme où des indications se déroulaient en quelques mots : « contrôler », « observer l’ordre », « répression ».
Point 3 : l’ordinateur révélait approximativement 23 milliards de profils, en attente d’instructions. Rapidement, j’envoyai les miennes en prenant soin d’appliquer les châtiments inhérents aux transgressions, actionnant les commandes qui réveillent les flux et parviennent aux « connectés ». Je pilotai le monde. Longtemps. Sans me poser de questions. Pour éviter la mort ?
Jusqu’à cette vision. Le besoin de croire à une autre vie. Un peu de courage et je serai libre. Déconnecté.
Votre personnage se prépare à la déconnexion. A la lumière de l’écran, les yeux de Charlie, injectés de sang. Une fenêtre apparaît dans le coin supérieur droit. Une question s’insinue: « Suppression du dictateur 1. Etes-vous sûr ? ». Les boutons OUI et NON clignotent en alternance. Charlie hésite.
Charlie ne devrait pas hésiter... ;-) vision apocalyptique qui fait froid dans le dos! Bravo!
· Il y a presque 13 ans ·Elsa Saint Hilaire
collé à l'écran, la vue porte beaucoup moins loin, connecté au poteau de l'anti liberté le pouvoir de l'ordi remplace les coutumes ancestrales, mais l'asservissement reste le même, texte un peu confus avec des trouvailles intérressantes ,bravo
· Il y a presque 13 ans ·franek
Les résultats ne sont pas encore sortis ... Merci Colette, merci Lisa pour vos précieux commentaires qui font du bien.
· Il y a presque 13 ans ·chevalduvent
Merci beaucoup destructor ;-)
· Il y a presque 13 ans ·chevalduvent