le maçon sicillien

anakronique

Le vieux maçon sicilien

Confutatis Maledictis … Quand le maçon va à un enterrement il regarde immanquablement les pierres. Le petit curé déjà bedonnant dans son habit d'argent et d'ébène, a beau s'agiter avec son encensoir en tous sens pour attirer l'attention sur le catafalque a ses pieds, rien n'y fait, le maçon regarde les courbes millénaires des cailloux de la collégiale, où son frère le vieux bâtisseur Sicilien paraît endormi dans sa couverture de soie blanche, allonger la, dans ses simples habits de tous les jours, malgré son âme pratiquement dans l'autre monde, lui aussi épie l'azure de moellons dentelés au-dessus de sa tête avec un regret certain !!!

Et ils sont un bon nombre dans cette église, les yeux rivés au ciel à admirer la clef de voute, à scruter le moindre défaut dans la taille de ce bloc jaune, que les connaisseurs appellent « la pierre du soleil », les défauts ils connaissent, quand la journée finissante, la main fatigue, le marteau dérape, il n'y a pas de cadeau, et ils sont un bon nombre dans cette église a voir le faut aplomb flagrant de cette colonne de droite écrasée par le poids du temps, mais à part la fratrie, qui le verra, a trente mètres de haut le clergé et aveugle, et les frères le comprennent bien, eux qui partagent la douleur de la taille, rien n'est gratuits, mais quel bonheur a regardé en fin de jour, un arrondie qui viendra s'ajuster parfaitement au travail de la veille, la souffrance disparaît instantanément pour faire place à la fierté, au bonheur du bel ouvrage !!!

Du soleil... il y en avait justement en ce milieu d'apprêt midi, il inondait de sa lumière tout ce bestiaire fantastique de saints du jour sculptés de main de maitre par d'illustres inconnues, il inondait de sa lumière tous ces artisans venus serrer une dernière poignée à un ami si cher, l'honorer et l'accompagner jusqu'au purgatoire des mains calleuses, là où l'on met les constructeurs de cathédrales !!!

Et dans l'histoire que restera-t-il du Sicilien : peut-être dans quelques centaines d'années, un apprenti entrera dans une chapelle, feras le tour, regarderas le calcaire du haut de sa jeunesse, le caressera de ses mains rugueuses, et repartiras sans même un regard pour l'acrobate cloué sur sa croix dorée, en se disant : « ce maçon sicilien... il était sacrément bon » !!!

  • Mais l'apprenti trouvera peut-être, en caressant la pierre, le nom de celui qui a donné toute son âme et sa sueur pour construire son chef - d'œuvre !
    Bravo pour ce texte !

    · Il y a plus de 4 ans ·
    Louve blanche

    Louve

  • Texte magnifique! Joli clin d'oeil à tous ces poètes sculpteurs qui ont su faire parler les pierres! merci Lyselotte et bravo à l'auteur!

    · Il y a presque 12 ans ·
    Lisbonne 27 29 juillet 2010 028

    Frédéric Cogno

  • L'ouvrage d'art qui nous touches au delà des siècles ! Beau texte sur ces sculpteurs de pierres.
    Merci du partage Lyselotte.

    · Il y a presque 12 ans ·
    Version 4

    nilo

  • J'aime beaucoup aussi l'apparence rusticité des phrases polies au travail bien fait...

    · Il y a presque 12 ans ·
    D9c7802e0eae80da795440eabd05ae17

    lyselotte

Signaler ce texte