Le monde à l'imparfait

Susanne Derève

à qui n'aime pas que j'écrive à l'imparfait ...


J'ai ouvert grand les fenêtres ce matin

C'était un  soleil d'hiver sec et froid

avec un reste de gelée blanche  

qui me brûlait les doigts

 

J'ai battu les tapis

et  lavé les rideaux 

la lumière ruisselait à flots    

ricochait sur les murs et les toits

 

J'attendrai

que tu viennes effacer mes petits désespoirs

et si tu ne viens pas

je les astiquerai je les ferai reluire

avec le crin usé de ma brosse à mémoire

 

Je boucherai les trous béants

j'effacerai les silences

j'écrirai au présent

 

la chanson  de l'absence

et je te l'enverrai nouée de jolis rubans

dans du papier glacé

 

Je préfère le monde (à l') imparfait




Illustration : photo Jamie Baldridge

 

 

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