Le stéréotype et le fantasme du plombier

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La semaine avait plutôt bien commencée, avec un taux d’actions « à tendance boulet » se résumant à l’énorme brulure rouge du fer laissée sur mon bras et un verre de cassé. Jusque là rien d’inhabituel pour moi, qui suis, il faut le dire, pour les choses du quotidien, d’une maladresse folle (et c’est très handicapant).


Bref, en ce mercredi matin, « fraichement » réveillée, je me précipite dans la salle de bain, comme toute fille un minimum superficielle qui doit procéder à un ravalement de façade avant de pointer son nez en cours. En entrant dans la pièce, j’ai le plaisir de marcher dans une flaque. Premier point anormal. Face à moi, le placard situé sous le lavabo laisse échapper des filets d’eau. Selon moi, c’est le robinet qui occupe cette fonction. Second point anormal.


Quinze minute plus tard, la fameuse vanne rouge d’arrivée de l’eau est fermée, je me dis que les carreaux de ma salle de bain seront bien lavés au vu de la marre qui a finalement pris place, et je cherche désespérément le numéro d’un plombier.


Ce qui est bien avec les plombiers c’est qu’ils sont beaucoup. Et au final, je retombe en enfance, avec mon doigt pointé sur cette liste interminable des professionnels du tuyau, chantonnant les paroles « ce sera toi qui j’appellerai pour me sauver ». Pof : M. Fernand, plombier-zingueur. Et c’est parti, j’appelle. Une voix qui me parait jeune me répond « je viens dans deux heures ».


Le stéréotype du plombier, c’est celui qu’on voit dans les films. Un homme, la cinquantaine, de préférence très poilu et suintant la transpiration, se rendant de clients en clients dans une vieille camionnette au moteur hurlant et à la carrosserie rouillée. Quand vous lui ouvrez la porte, ce brave stéréotype vous sourit, et vous pouvez alors admirer, coincé entre ses dents, un bout de salade du sandwich du midi, dévoré dans ladite camionnette. L’homme bedonnant aux baskets boueuses franchit ensuite la porte et se dirige vers vos tuyaux et robinets rebelles. Tellement rebelles, que pour en tirer quelque chose, l’individu doit alors entreprendre une série de contorsions pour lesquelles son pantalon n’est généralement pas préparé. A ce moment là, apothéose de la réparation, vous voyez alors un sourire se dessiner sur le fessier de monsieur : inutile de procéder à la raie sur image !


Voilà le stéréotype du plombier, c’est le genre de réflexion qu’ont mes amis quand je demande « tu ne connaitrais pas un plombier ? ». Un copain m’a aussi sorti une histoire de plombier pervers, mais c’est indécent…


M. Fernand est bien arrivé, deux heures plus tard, tuant ainsi ce mythe dont souffrent tous les collègues de Mario et Luigi.
En ouvrant la porte, point de salade. Non pas parce qu’il ne sourit pas, mais juste parce que ses dents sont blanches à en faire pâlir les draps d’une jeune pucelle ! Il entre et se dirige vers la salle de bain. Le bellâtre brun à la peau mate se penche alors vers le problème. Inutile de vous préciser que son pantalon a assuré comme une bête et que cette fois-ci je hurlais intérieurement pour avoir l’arrêt sur image. Après un examen minutieux, il se redresse, plonge ses yeux verts dans les miens et me dit : « Je vais devoir vous refaire toute la tuyauterie ». À ce moment-là, YouPorn s’est littéralement lancé dans ma tête (oui messieurs, les filles aussi ont des pensées sordides). J’essaye tristement de récupérer mes esprits, d’arrêter de m’imaginer accrochée à ce rideau de douche, et conclus sur le fait que le professionnalisme de cet entrepreneur n’est pas à remettre en doute, et que la seule interaction physique qu’il aura sera avec l’amalgame de cuivre, laiton, PVC et autres matériaux chanceux de ma salle de bain.


Le plombier est bien équipé, n’y voyez pas là une allusion « dirty », il avait tout ce qu'il fallait sous la main pour réparer la chose. Après avoir passé une heure à l’admirer jouer de la clé à molette et autres outils inconnus, il me brise le cœur en me disant que la fuite est réparée.


Je le raccompagne vers la sortie, m’appuie sur la porte et je me sens littéralement dégouliner contre le chambranle qui n’en demandait pas tant. Du stéréotype, je suis donc passée au fantasme du plombier. À présent, je réfléchis sérieusement à un sabotage de mon cumulus afin que M. Fernand vienne me montrer toute l’étendue de ses talents…

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