LES CROCS DE LA NUIT
Maud Garnier
Qu'est-ce qu'il y a derrière cette porte métallique munie d'un volant de fer et d'un hublot ? Je ne sais plus comment je me suis retrouvé dans ce boyau cylindrique en métal ?
Galvanisé par la lettre d'un éditeur qui accepte de publier mon manuscrit avec des droits d'auteur pharaoniques, je me suis dit que j'allais fêter ça. La soirée est douce, je décide d'aller boire un verre avec ma petite amie, Marjorie, Marjolie comme j'aime à l'appeler.
— Je suis fière de toi, et certaine de ton talent, mais je suis de garde à l'hôpital cette nuit, on remet ça à demain mon chéri ?
Un peu désappointé, mais refusant d'attendre jusque-là, j'enfile mon blouson et prend la porte. Je ne veux pas aller dans l'estaminet ou Marjolie et moi avons nos habitudes, pas sans elle. J'avais remarqué dans une impasse de mon quartier, une pancarte fléchant la direction du « bar de la porte close ».
— Drôle de nom !
Intrigué, je me suis dirigé par-là, jusqu'à me retrouver devant une « porte close » ferrée avec de gros clous, sur le côté, une cloche et une touche que je presse.
— La cloche est là pour la déco, me dis-je,
alors que celle-ci émet un son grave et lugubre comme un glas, puis la porte s'ouvre en grinçant
— pas très engageant ce bar.
J'avance la tête et vois des clients installés sur des tabourets ou attablés. Un peu rassuré j'ose passer le pas de la porte. Je me dirige vers une table libre et regarde autour de moi. Juste un verre puis je rentrerai me coucher. Le cafetier me hèle depuis le comptoir.
— Ce sera quoi ?
— Un whisky, merci
Je jette des regards autour de moi. Le décor est étonnant, on se croirait dans le sous-marin de de Némo. Les autres clients ne sont pas causant. Soudain une jeune femme apparait à mes côtés un verre à la main.
— Voici votre whisky, je suis Siréna, à votre service.
— Le décor de votre bar est particulier, on se croirait dans un sous-marin de Jules Verne.
— C'est parce que nous sommes dans un sous-marin !
— Oui, c'est ça, et nous sommes en cale sèche.
— Croyez-vous ? Buvez votre whisky !
Je trempe mes lèvres, avale une gorgée d'alcool, puis, tout semble flou.
J'ai l'impression d'avoir les pieds dans l'eau. Les autres clients se tournent vers moi avec des rictus grimaçants, leurs dents, tels des crocs, brillent dans l'ombre.
Il me semble être cloué au sol, incapable de me lever.
— Qu'est-ce que vous avez mis dans mon verre ?
— Calmez-vous, nous allons faire un petit voyage, vous devriez dormir un peu.
— Je ne veux pas dormir, pourquoi ne puis-je pas me lever ?
— Parce que vous êtes attaché !
— Quoi ?
Baissant les yeux je vois mes chevilles fixées au pied de la chaise
— Mais pourquoi ? Qu'est-ce qui se passe ?
Je me rappelle que Siréna entonne un chant, puis c'est le trou noir.
Je me réveille, seul, frigorifié, dans ce boyau sombre que j'ai arpenté jusqu'à cette porte métallique. Je m'approche lentement et jette un œil à travers le hublot et reste ébahi. Siréna nage avec ses comparses devant le hublot, leurs nageoires formant des arabesques. Un des siréniens vient coller son visage muni de dents comme celle des piranhas contre le hublot.
Je sursaute et recule
— C'est quoi, ce truc de dingue ?
Je vois le volant qui tourne doucement. Je sens l'eau monter le long de mes mollets. Pas d'issue par ici, je retourne sur mes pas en courant, à l'extrémité du boyau, une autre porte métallique, pas de hublot sur celle-ci. Je tourne le volant, vais-je être noyé sous les flots de trombes d'eau, puis dévoré par les créatures aquatiques ? Je n'ai pas le choix et j'accélère mes gestes, alors que l'eau continue de monter. La porte s'ouvre, j'entre et la referme aussitôt derrière moi.
Là aussi il fait sombre, j'avance précautionneusement. Soudain je réalise que la scène précédente ne m'est pas inconnue, je l'ai déjà expérimentée dans l'écriture de mon manuscrit ! Je sais ce qui se passe ensuite, c'est mon esprit malade qui a écrit cette histoire ! Le héros en avançant va se retrouver face à d'autres créatures maléfiques. Alors que j'entends un grognement sur le côté de la pièce, je tente une fuite illusoire, des crocs pointus déchirent ma chair, je me débats, et une autre porte s'ouvre.
Deux infirmiers essaient de me maitriser, ils parviennent à me sangler sur un lit. Où est passée la bête immonde qui m'arrachait des lambeaux de chair ?
— Tu n'as pas pris tes médicaments aujourd'hui ! Tu sais pourtant que tes cauchemars reviennent te hanter et te poursuive.
C'est alors, que devant mes yeux médusés, Marjolie entre puis elle me fait une injection.
— Là, ça va aller !
Avant de sombrer de nouveau dans les affres d'une nuit cauchemardesque, je vois, sur la table de nuit un ouvrage posé. Le titre du livre « les crocs de la nuit », le nom de l'auteur est le mien.
Bonjour
· Il y a environ 4 ans ·J'ai lu avec plaisir votre texte, troublant voyage sous-marin
Vous m'avez embarqué
Marjolie (traîtresse), pas de médicaments aujourd'hui, pas d'injections, je te les laisse ; ça va te décoincer
Sous-marin, en plongée partons loin loin
vers des mondes inconnus, que seule Maud va nous faire découvrir
Amitiés
My Martin
merci beaucoup pour la lecture et ce charmant commentaire :-)) vous pouvez encore découvrir plein de voyages ou de poèmes un peu coquins sur ma page ;-)) bises amicales
· Il y a environ 4 ans ·Maud Garnier
alô toi, j'aime cette écriture fluide et l'utilisation de plusieurs mots tranchants (sanglé, Galvanisé, pharaoniques) tu as incontestablement le talent de raconter avec moultes détails, à faire frémir le (lapin-à-lunette-rose). Un récit que tu devrais proposer à short, il serait accepter pour sure.
· Il y a plus de 4 ans ·Naturellement, on s'accroche à la finale mais le chemin pour y arriver se tisse. de main de maître. On s'attarde à regarder ces sirènes voltiger. Prisonnière, de l'eau envahissante, des portes et des portes (Kafkaïennes). Si bien écrit ce texte autant dans "l'écriture que dans l'intention en n'oubliant pas l'intrigue" Majolie se faufile dans l'absence pour mieux se présenter à l'aboutissement. Je me retrouve assez bien dans tes mots¨^^ Une bise et un coup de ♡
suemai
C'est un texte écrit en une soirée pour la matinale de short qui devait faire peur... et parler d'une porte... pas repêché par le jury mais j'ai l'habitude...
· Il y a plus de 4 ans ·Maud Garnier
merde, qu'il est con ce jury - j'en ai aussi l'habitude xx
· Il y a plus de 4 ans ·suemai
chouette !
· Il y a plus de 4 ans ·rechab
Merci ;-)
· Il y a plus de 4 ans ·Maud Garnier
J'adore ton histoire !!! Je l'ai lue avec précipitation pour découvrir la fin, mais je vais la relire maintenant plus posément.
· Il y a plus de 4 ans ·Sy Lou
Merci beaucoup Sy. Plein de Bisous ♡
· Il y a plus de 4 ans ·Maud Garnier
De trop écrire t'a monté à la tête !!
· Il y a plus de 4 ans ·Une histoire bien ficelée qui fait peur !!
Louve
C'était le but ! Mais je doute qül'il fasse vraiment peur ;-))
· Il y a plus de 4 ans ·Maud Garnier
un beau texte shortien ;)))
· Il y a plus de 4 ans ·Patrick Gonzalez
Merci poète ! Des bises
· Il y a plus de 4 ans ·Maud Garnier
Bien vu ! J'aime beaucoup la chute !
· Il y a plus de 4 ans ·ade
Un texte écrit pour une matinale de short en temps limité sur un sujet donné au dernier moment et la remise dans la nuit quelques heures.plus tard... un texte qui devait faire peur ;-))
· Il y a plus de 4 ans ·Maud Garnier