Les enquêtes d’Hercule Foireaux (2)

Hervé Lénervé

Voici de retour, notre privé toujours aussi perspicace à ses heures de sobriété. Oui, jamais, je sais !

Le privé Hercule Foireux, attendait les pieds sur son bureau les deux mains derrière la nuque, à l'américaine, quoi ! Les clients de passage se faisaient chiches, ces temps-ci. On toqua à sa porte, la sonnette ne sonnait plus les arrivées, ni les départs non plus, d'ailleurs.

-         Oui ! attendez une minute, je suis occupé.

Une tête apparue dans l'entrebâillement de la porte.

-         Oui ! Entrez ! Quand la tête est passée, le reste passe… enfin en général, mon Général !

L'homme était corpulent, il dut ouvrir en grand, oui, disons qu'il était obèsissime par euphémisme.

-         Prenez deux sièges ! Je suis à vous tout de suite. « Grand serpent d'Afrique en trois lettres ??? »

L'homme était bien habillé, du sur-mesure, par obligation assurément ?

-         Je vous écoute, monsieur, monsieur ?

-         Hervé Lénervé, voilà ce qui m'amène. Je suis un homme qui aime bien savoir les choses, je n'aime pas rester dans l'incertitude et je préfère accepter le pire plutôt que le mal…de l'ignorance.

-         Oui ! Je vous écoute ! Soyez bref mon temps est compté.

-         Seriez-vous gravement malade ?

-         Non, non ! Je vous écoute, allez ! 

-         Voilà, depuis quelque temps, mon épouse a un comportement étrange. J'ai totalement confiance en elle, bien sûr, mais comme je vous le disais, je préfère toujours connaître la vérité. Aussi, j'aimerai que vous la preniez en filature.

-         Pas de problème, c'est mon job ! Ecrivez les coordonnés de votre dame, donnez-moi une photo récente et revenez me voir dans une semaine. Vous saurez toute la vérité crue !

-         A la bonne heure, voilà, ce que j'aime entendre dire. Je ne vais pas abuser davantage de votre temps précieux. Dans une semaine, donc, monsieur Foireux.

Une semaine plus tard. (c'est ça, qui est bien avec la fiction, on n'est pas obligé d'attendre, dans une impatience de curiosité obsédante, que les jours s'égrènent sur le grand sablier cosmique du cadran solaire de notre calendrier calendaire.)

-         Monsieur Lénervé, je vous attendais, mon enquête est bouclée.

-         Tant mieux ! tant mieux ! Je vais enfin savoir, plutôt que de me torturer les sangs ! (Par cohérence, je laisse le temps de la réalité à mes personnages, ça fait plus crédible.)

-         Lundi, premier jour de filature, votre femme n'est pas sortie de chez elle.

-         De chez moi !

-         Ne m'interrompez pas, s'il vous plait ! Mardi, votre dame est passée chez son coiffeur, elle a acheté un collier en passant devant une bijouterie puis elle est rentrée chez elle.

-         Chez moi ! Vous connaissez le prix du collier ?

-         Ne m'interrompez pas, Non, je ne connais pas le prix. Mercredi, je vous passe les détails, rien que du banal. Jeudi, par contre, elle est entrée dans un café et s'est assise d'emblée à une table où un homme y était déjà.

-         Qu'avez-vous donc fait ?

-         Ne m'interrompez pas, S.V.P. ! je suis entré dans le café, le même bien sûr, je me suis assis à une table proche, mais ils parlaient si bas, que je n'ai rien pu entendre. Ah, j'ai pris un Bourbon, pour mon défraiement.

-         Merde ! Toujours cette putain d'incertitude ! Vous auriez pu prendre un café !

-         Ne m'interrom…  Votre dame souriait et lui, il souriait aussi, enfin, ils souriaient tous les deux, finalement. Ensuite, ils sont sortis, je leur ai emboité le pas. Dans la rue, ils se sont dirigés vers l'hôtel de la Poste en se tenant par le bras, ils y sont entrés.

-         Merde ! Qu'avez-vous fait, alors ?

-       Ne m'interuptez pas! Je suis entré dans l'hôtel derrière eux, pardi, puis j'ai réussi à obtenir une chambre mitoyenne à la leur. Il y avait une porte communicante entre les deux chambres, j'ai regardé par le trou de la serrure.

-         Astucieux, on sent là, toutes les ficelles de la profession ! Qu'avez-vous vu, vite, je veux savoir !

-         Ecoutez, j'ai vu l'homme se mettre nu et votre dame, l'imiter dans le même élan. Jolie poulette, ma foi en foie gras !

-         Merde ! Et ensuite ?

 

-         Ecoutez, ils se sont glissés tous les deux dans un lit… mais le même, quand même, d'ailleurs il n'y en avait qu'un. De lit et pas très grand de surcroit, le genre une place numérotée.

-         Merde et remerde ! Et Après ?

-         Ecoutez, après, ils ont éteint la lumière, fondu au noir et je n'y vis plus goutte, dommage, j'aurais bien aimé voir !

Dommage en effet ! Toujours CETTE PUTAIN D'INCERTITUDE !

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