Les enquêtes d’Hercule Foireaux (20)

Hercule reçoit à son agence une belle cliente. La femme est élégante, elle a de bonnes manières, cela se voit dans son maintien. Elle sent la bourgeoise du début de la fragrance de son parfum subtil au bout de ses ongles manucurés. Elle semble incongrue dans le bureau minable d'Hercule, où la vétusté du mobilier kitch souligne le contraste de goûts et de genres. Elle est légèrement hautaine la belle mondaine.

-         Bonjour, belle petite madame, dites-moi tout, je vous écoute et je vous regarde, aussi.

-         Monsieur Foireaux, je me suis décidé, après moult hésitations, à venir requérir votre soutien.

-         C'est vrai, que l'on vient souvent me quérir pour ça !

-         J'ai été spoliée et les policiers ne veulent pas prendre ma plainte en considération.

-         Que vous a-t-on volé, petite madame ?

-         Un sein !

-         Pardon ?

-         Le droit !

-         Oui, je vois !

-         Non, vous ne voyez rien, c'est une prothèse !

-         Au temps pour moi ! Dites-moi, tout, petite damoiselle !

-         Je ne prends jamais les transports en commun, c'est d'un commun ! Or, pas plus tard qu'hier, ne trouvant pas de taxis disponible pour me prendre, j'ai osé le Métropolitain qui m'a prise par surprise. Car à peine installée dans une rame, qu'un individu, que je ne recommanderais à personne, m'a frôlé. J'ai senti sa main calleuse sur mon corsage de soie, un geste obscène et répugnant, une horreur ! Mais je ne me suis aperçue du larcin que bien plus tard. Chez moi, dans mon boudoir, il m'avait dérobé le sein droit.

-         Mais que peut-il faire avec un seul sein ? Il aurait pris la paire, non ?

-         Je ne connais rien au marché des seins d'occasions ! Le fait est que les policiers doutent de ma sincérité.

-         Vous leurs avez montré le manque de l'absent ?

-         Oui, bien sûr ! Et ils m'ont répondu que rien ne leur permettait de voir qu'il y en ait eu un, avant.

-         Pourquoi ne pas leur avoir montré votre sein restant ?

-         C'était gênant, comprenez-vous ? Mais devant leur mauvaise foi manifeste, j'ai remisé, par devers moi, mes scrupules pusillanimes et j'ai dévoilé mon intimité nue.

-         Alors ?

-         Ils m'ont dit : « Vous voyez qu'il n'était pas bien loin ! » Les goujats, vous dis-je ! 

-         En effet ! Votre histoire de sein fauché, m'a touché ! Je vais mener mon enquête, petite belle madamoiselle et je vous dirai ce qu'il en est de ce malfrat piqueur de seins au singulier, ce qui ne l'est guère… singulier, dans le peu de temps qu'il nous ait alloué !

-         Combien nous reste-t-il, encore, inspecteur ?

-         Attendez, je regarde… On est à la deuxième page, si vous laissez tomber votre langage ampoulé, on peut finir dans les temps requis.

-         Ok ! Vas-y,  poulet, magne-toi !

***

Une minute plus tard. Hercule a magné dur !

***

-         Ça y est, je l'ai piqué votre piqueur de sein singulier ! Regardez est-ce que vous reconnaissez le vôtre, dans son panier de recèle de la cueillette d'hier ?

-         Ventre Saint Bleu ! C'est lui, le Blanc Métallisé Nacré, là, vous dis-je !

-         D'accord ! Prenez-le, ça fera trois mille-cinq cents Œufs !

-         C'est cher !

-         Non ! Ils sont tout frais, c'est le prix !

-         Merci monsieur Foireaux ! Je ne serai jamais assez reconnaissante pour vous dire tout ce que vous avez pu faire pour ma prestance…

-         Laisse tomber poulette ! Remet ton nichon de Sainte que personne ni touche et on couche tout de suite ! Autrement on dépasse le cota d'attention et on fait chier tout le monde, moi le premier !

Moralité, mesdames de la haute, évitez de prendre le Métropolisson.