Cette nouvelle opinion sans avis pour qui les combats se font en se tournant les pouces et en 140 caractères maximum.
Partage, Like, RT, Fav : la veille des conscients.
« Contre la surveillance généralisé mise en place par le gouvernement. Si vous tenais encore à votre liberté, liker et partager en masse ».
Bordel, ca n'a pas traîné : il est pas 10h matin que déjà les premiers miasmes mécaniques d'un web sans filet viennent pourrir devant mon écran. Je ne sais pas ce qui me débecte le plus à cet instant présent : les fautes d'orthographes, l'intitulé lui-même, l'appel à mobilisation ou encore le fait qu'il me soit imposé par l'un de mes contacts, qu'on feindra de considérer comme un ami. Sans doute un peu de tout cela…
La timeline Facebook n'a pas plus de temps et d'élégance qu'un chalutier en haute mer : elle remonte machinalement toute les espèces des bas-fonds pour n'en retenir que quelques spécimens comestibles. Et notre ami de s'improviser capitaine d'un navire sans phare éclairé, baladé par les ressacs d'une agitation de surface qui me filent la nausée. Sans même poursuivre la navigation, je ne sais que trop bien à qui j'ai affaire une fois de plus : des indignés. Oui mais pas n'importe lesquels : les indignés connectés.
Anonyme connu de tous, l'indigné connecté est un profil aussi courant que fuyant, puisqu'il semble échapper aux nomenclatures officielles. Citoyens surinformés, engagés volontaires d'un corps vaguement renseigné, pâtre d'une transhumance désorganisée, il est avant tout un révolté de l'instant. L'instant d'un partage Facebook, d'un tweet, d'une photo Instagram…mais surtout d'instants volés : à savoir les nôtres, vulnérables lecteurs de pensées mort-nées. Le voici donc en train de plâtrer à grande hâte sa dernière mosaïque d'idées reçues avec le sentiment accompli de nous sensibiliser à une juste cause. Quelle cause au juste ? En fait, il s'en fout un peu : celle du moment, celle qui apparait dans les notifs Facebook, qui remonte dans les trending topics, celle que l'on partage au bureau pour évacuer l'inconfort d'une conversation Météo France à la pause cloppe, ou qu'on glisse entre deux conso à crédit au comptoir du dernier bar à la mode pour se donner plus de contenance que le chemise Celio sur ses épaules.
On trouve donc chez l'indigné connecté tout un panel de « grands combats du quotidien », prêts à l'emploi, souvent à usage unique et aussi efficaces qu'une charte éthique à la FIFA. Morceaux subis de ce grand foutoir : dénoncer la campagne de la SPA qui ne met en scène aucune minorité ethnique ou sexuelle, interpeller un élu pour la mauvaise gestion de son compte Twitter, faire des remontrances sur post-it aux terroristes ayant kidnappé de jeunes étudiantes, critiquer les programmes d'une chaîne télé qui parasitent les pubs, filmer sa glacière pour sensibiliser à une maladie grave, créer un schisme idéologique sans précédent concernant la couleur d'une robe, et bien sûr, s'indigner contre la dernière Une du Point.
Bref, de tout et de rien. A l'image des auteurs et de leur relais, des indignés de facto, qu'on sait en réalité bien plus prompts à battre le clavier que le pavé pour s'engager dans un véritable mouvement de société. Rares sont les rassemblements populaires auxquels ils prennent réellement part : devant l'Apple Store au moment de la sortie du dernier Iphone, sur la terrasse d'un café proposant free wifi et cocktails surtaxés ou sur les plateaux télé des nouveaux chantres de la désobéissance civile, petits journaux et chroniqueurs du banal, qui substituent le montage à l'information et les tribunes décalées au contexte replacé. En somme, de hauts lieux de joutes intestinales qui n'ont du cercle de militants que l'odeur et non la profondeur et dans lesquels chacun tente, sans succès, de laisser sa trace sur des esprits absorbés.
Car manifestement, dénoncer l'injustice sur Twitter c'est manquer singulièrement de caractère et lever le pouce sur Facebook semble toujours plus facile que de prendre le risque de finir les poignets menottés.
Malgré l'envie de distribuer des tartes IRL devant ces partages URL, je jette un dernier coup d'œil à mon écran : des twittos proposent d' « unfollow en masse » Véronique Genest coupable d'un nouveau dérapage de fond.
Trop tard : pour certains les cerveaux ne suivent déjà plus…
Belle chronique sur le marketing de l'indignation... vraiment bravo !
· Il y a plus de 9 ans ·anton-ar-kamm
merci :-)
· Il y a plus de 9 ans ·scotch
Vous avez visé et touché ces esclaves de l'événement avec beaucoup de justesse ! J'aime beaucoup l'expression : "dénoncer l'injustice sur Twitter c'est manquer singulièrement de caractère et lever le pouce sur Facebook semble toujours plus facile que de prendre le risque de finir les poignets menottés."
· Il y a plus de 9 ans ·Bonne chance pour le concours !
tabellion
merci à vous. Je vois que nous avons choisi presque le même sujet ;-)
· Il y a plus de 9 ans ·bonne chance également
scotch
très bon, très juste.
· Il y a plus de 9 ans ·Nicolas Juliam
Excellent, j'adore le ton !!
· Il y a plus de 9 ans ·marielesmots
merci à vous
· Il y a plus de 9 ans ·scotch
Bravo Scotch pour cet élan de lucidité stylisé.
· Il y a plus de 9 ans ·Jean Patrick Chatel
Merci à vous et bonne chance pour le concours ;-)
· Il y a plus de 9 ans ·scotch
les commentaires sur Fb: http://welovewords.comhttp://welovewords.com/blog/portrait-dauteur-number-17-decouvrez-romain-scozzaro?fb_action_ids=10204397834010407&fb_action_types=og.comments
· Il y a plus de 9 ans ·ecriteuse
le lien, à l'image de vos textes, ne mène à rien.
· Il y a plus de 9 ans ·Merci quand même pour votre participation
scotch
:)
· Il y a plus de 9 ans ·ecriteuse
Il faut mieux être indigné que désespéré....Il faut mieux être modeste que trop leste et ce sur le dos de certains qui osent...Ne pas faire d'amalgames et insulter par derrière...sans rien faire. Si les cerveaux ne suivent plus...TANT MIEUX....trop de scotch donne la gueule de bois....
· Il y a plus de 9 ans ·ecriteuse
Dans le scotch il y a souvent plus d'un degré.
· Il y a plus de 9 ans ·Comme dans ce texte dont, comme le rappelle le concours auquel il répond, c'est l'objet.
Je préfère la gueule aux langues de bois : ca laisse moins d'écharde sur cul de la naïveté qu'elles caressent
scotch
Bravo quel style.....mais tjrs en pseudo...Quand à la naïveté, je la préfère à l'aigreur.....Quoique la lucidité n'a rien de naïf...et puis Le scotch est à consommer avec modération:) sinon quel manque de lucidité.....
· Il y a plus de 9 ans ·ecriteuse
l'aigreur me semble plutôt de ton côté à vrai dire : cette croisade lancée à mon égard parce que j'ai bénéficié d'une ITV malgré ma récente arrivée...
· Il y a plus de 9 ans ·Y a beaucoup d'auteurs et de créations ici : à défaut de taffer les tiennes, je te suggère de ne pas perdre de temps à lire et commenter celles que tu n'aimes pas.
Bon courage pour la suite
scotch
Ces indignés me font penser aux révoltés du Bounty qui, confortablement installés sur leur île enchantée, prirent le parti de la mutinerie dès que le vent tourna et qu’il leur fallut renoncer à leur paradis idyllique. Sauf qu’eux ne manquaient pas de caractère pour clamer leur indignité, qu’ils n’étaient pas des suiveurs mais des meneurs, et qu’en tout état de cause, puisqu’ils n’avaient que la leur à défendre, ils prirent des risques inconsidérés au péril de leur vie, au gré des ressacs et des vagues scélérates. Qui aujourd’hui est prêt à se tenir droit devant une cohorte de chars pour dénoncer une injustice ou combattre une ’’noble’’ cause’’ ? C’est tellement plus simple en tirant des rafales de mots sur son clavier et en se cachant derrière un avatar.
· Il y a plus de 9 ans ·Les temps ont changé, nous sommes tous devenus un peu plus « écran » !
En tant que non follower digitalement déconnecté, je repars dans ma tanière.
Et bravo pour votre billet.
erge
merci, et beau parallèle.
· Il y a plus de 9 ans ·On voit en effet beaucoup de lanceurs d'alertes mais très peu d'engagés volontaires.
Mais surtout des pompiers improvisés qui sortent la lance pour éteindre des feux de paille lorsque le foyer brûle encore.
Mais moi-même tirant des rafales de mots derrière un avatar, j'ai parfois peur de reproduire ce triste schéma ;-)
scotch
Le monde change et nous devon s changer avec. Mais plutôt qu'à suivre comme des moutons, agissons comme des zèbres. Ce ce que dit Alexandre. Jardin pas Le Grand. Bien que le nôtre (de jardin) ait une taille respectable.
· Il y a plus de 9 ans ·erge
cultivé notre Jardin ;-)
· Il y a plus de 9 ans ·scotch