Les masques - 2. Mike (2)

octobell

Aiden n’eut aucun mal à reconnaître l’escalier « façon princesses Disney » qu’avait mentionné Mike, puisque celui-ci s’imposait pratiquement dans tout le hall. Il resta à l’admirer un instant, et dans un geste qui tenait plus du réflexe qu’autre chose, porta son objectif à son œil et prit les marches en photo. Il tourna sur lui-même, tentant de se souvenir des explications brouillonnes de Mike. Il s’avança jusqu’à la fameuse double porte en bois massif évoquée, mais fut arrêté dans sa course par une voix qu’il l’interpela.

« Eh toi ! »

Aiden se figea immédiatement, levant les yeux vers le balcon, d’où partait la voix. Le garçon à bouclettes surgissait de l’intérieur des couloirs, en compagnie de Kate et de la fille aux tatouages et au chapeau. Aiden revint sur ses pas, rangeant discrètement le couteau dans sa poche. Le garçon à bouclettes commençait déjà à descendre les imposantes marches.

« C’est quoi ton nom déjà ?

- Aiden… Répondit celui-ci pour la millième fois en levant les yeux au ciel. Vous devriez retourner au salon vite fait, il y a eu un petit problème.

- Un petit problème ? S’alarma Kate. Tout le monde va bien ?

- On peut pas dire ça, non, répondit Aiden avec franchise. Mike s’est fait attraper lui aussi, et il était avec Briana. On ne sait pas ce qu’elle est devenue, alors je suis parti à sa recherche.

- C’est lesquels ceux-là déjà ? Interrogea le garçon à bouclettes.

- Je viens avec toi ! S’exclama Kate avec fermeté. Aiden ouvrit la bouche pour riposter, mais cela semblait franchement inutile. Et puis au fond, Ira avait raison… Tout seul, c’était peut-être plus risqué. Il lorgna les deux autres.

- Sans façon, moi je retourne au salon. » Répondit la fille au chapeau de sa voix grave, manifestement peu concernée par le sort de Briana. Le garçon à bouclettes sembla hésiter un instant, lui aussi.

- Je viens avec vous ! » Se décida-t-il finalement. « T’sauras retrouver le chemin du salon, hein Malek ? » Se moqua-t-il gentiment.

La fille au chapeau lui adressa un regard dont Aiden n’aurait pas aimé être la cible, et sans se fatiguer à lui répondre, descendit quatre à quatre les dernières marches en ignorant Aiden lorsqu’elle passa à côté de lui. Aiden reporta son regard sur les deux autres et leur adressa un bref sourire.

« C’était par là ! » Indiqua-t-il en montrant le renfoncement à droite des escaliers. Kate et le garçon à bouclette le rejoignirent et ils commencèrent leur exploration.

***

Mike retroussa du nez en reniflant. Ca le démangeait. Il secoua la tête dans tous les sens, cherchant mécaniquement à ramener sa main à son visage. C’était toujours comme ça ! Toujours quand il avait un carton encombrant entre les bras ou les mains dans la glaise que son nez le démangeait. Comme un fait exprès. Il se contorsionna pour essayer d’atteindre l’épaulette de son armure, mais c’était vain.

Il poussa un cri rageur, perturbé par cette foutue démangeaison.

« Mike, ça va ? Jaillit aussitôt la voix alertée de Gemma, et Mike se rembrunit.

- Non ! Protesta-t-il vivement. J’en peux plus d’être dans ce truc ! C’est impossible ! Je veux sortir ! »

Dans une énième tentative, il essaya de se délivrer du carcan, mais le résultat ne fut pas plus probant que toutes les autres fois. Il poussa un soupir d’accablement mêlé d’énervement. Il fallait qu’il pense à autre chose.

« Comment va Nat ? Grogna-t-il de mauvaise humeur.

Gemma ne répondit pas tout de suite, et il l’imagina en train de contempler l’écran de l’autre prisonnier.

- Il… Il ne va pas très bien. » Avoua-t-elle au bout de quelques secondes. Il l’entendit renifler. Elle pleurait. Mike se demanda ce qui avait pu lui arriver depuis son enfermement, mais il n’osa pas poser la question à la jeune femme. Peut-être avaient-ils appris ce que l’homme masqué avait inoculé à l’australien. Et peut-être était-ce une très mauvaise nouvelle.

- Surfing Boy ? » Entendit-il cette fois, de la part d’Ira. « Comment tu te sens ? » Mike se demanda brièvement si c’était lui qu’il surnommait de cette manière, mais avant qu’il n’ait pu réagir, le jeune homme reprit : « Ok… Démangeaisons, problèmes de respiration ? »

Dans la cellule de Mike, seul le silence répondit au garçon aux yeux bleus. Puis la voix de Gemma le brisa, demandant tout haut l’interrogation que Mike se faisait tout bas :

« T’es médecin, Ira ?

Celui-ci ricana vaguement.

« Pas tout à fait. Je suis en dernière année d’études de psychiatrie avant de commencer mon internat. Mais bon, ils nous font potasser tu sais, alors je connais un peu le truc. Jamais j’aurais imaginé utiliser un jour mes connaissances sur la peste. Sérieux, ça existe plus ce truc là ! Une dose d’antibios et on n’en parle plus. Mais là y’a rien ! On est paumé je sais pas où au milieu de nulle part, et je doute qu’ils nous laissent sortir pour aller à la pharmacie d’à côté. P’tain de connards ! » Explosa-t-il en donnant un coup de pied dans le moniteur.

Gemma eut un léger mouvement de recul, mais ne s’offusqua pas vraiment de la réaction d’Ira. Elle comprenait sa frustration. Elle-même se sentait déjà particulièrement impuissante, mais si lui en plus avait la solution en tête et qu’il ne pouvait pas l’exploiter, ça devait être encore pire. Surtout s’il suffisait d’une pharmacie. Elle sursauta vivement, levant un regard brillant sur Ira.

« Peut-être qu’il y en a une dans le manoir ! Après tout, on ne sait pas. Toutes les maisons ont leur petite pharmacie dans la salle-de-bain. Pourquoi pas celle-ci ? Si ça se trouve, ils nous laissent l’opportunité de sauver Nat. Après tout, ils ont laissé la porte ouverte, c’est qu’ils veulent bien qu’on les retrouve non ?

- On ne sait pas ce qu’ils veulent… » Répondit sombrement Ira avant de quitter la salle du moniteur et rejoindre le salon. Haussant les sourcils, étonné, il s’arrêta brusquement, lorsqu’en levant la tête, il vit Briana en face de lui, les cheveux décoiffés, les yeux écarquillés, à la limite du burn-out. Perplexe, le regard d’Ira se posa sur Stan, qui n’avait pas eu le bon ton de les avertir de son arrivée dans la pièce. Ira serra les poings, contenant autant que possible cette envie qu’il avait de lui casser la gueule.

« Ca fait combien de temps que t’es revenue ? Demanda-t-il à Briana, préférant reporter son attention sur elle. Elle en valait plus la peine. Hagarde, la jeune femme leva un regard totalement perdu sur lui, comme s’il venait de lui faire un compte-rendu de la bourse en laotien.

- Elle va nous exploser entre les pattes, railla Stan, forçant Ira à échanger un regard avec lui. » A vrai dire, il n’en pensait pas moins. Briana, quant à elle, ne semblait plus les voir. Marmonnant des paroles incompréhensibles dans sa barbe, elle se mit à fouiller autour d’elle avait frénésie, semblant chercher quelque chose par terre. Ses yeux éc              arquillés lui donnaient l’air un peu fou. Elle se précipita à genoux vers le centre de la pièce, et tâtonna fébrilement sur le tapis, sous le regard ahuri des deux garçons.

« Eh Mafiosa ! Qu’est-ce qui te prend ? Qu’est-ce qui s’est passé là-bas ? Questionna Ira.

- Une trappe ! Répliqua-t-elle, fébrile. Il y a sûrement une trappe !

- Une trappe ? Mais de quoi tu parles ?

- Nat ! ll ne s’est pas envolé en un claquement de doigts ! Il est sûrement passé par quelque part. Peut-être qu’il y a un mécanisme, comme celui que tu as enclenché avec la bibliothèque. Tu vois ce que je veux dire ?

- Oui, mais qui l’aurait…

- Peut-être qu’en allant tous par là-bas, on a marché sur quelque chose ou je-ne-sais quoi.

Elle s’arrêta brièvement dans son mouvement, et bondit sur ses pieds, pour commencer à arpenter la pièce de long en large, sous le regard impuissant d’Ira.

- C’est que c’est pas con hein… Dit Stan, qui réfléchissait de son côté. Ira, dans un grand geste, renversa la tête en arrière, avant de se planter sèchement devant lui, les mains appuyées sur le dossier de la chaise. Son visage était si proche de celui de Stan que celui-ci pouvait voir toutes les variations de ses yeux qui se glaçaient, tout prêts à le fusiller.

- Arrête ton manège maintenant, et dis-moi ce que tu sais, articula-t-il lentement. Dis-moi si tu sais au moins quelque chose ! Est-ce que t’as vu Nat disparaître ou pas ?

Stan, agacé par cette énième tentative, balança sa tête sur le côté, puis affronta férocement le regard d’Ira, un mince sourire carnassier au coin des lèvres. Il savait qu’ainsi il provoquait la colère du jeune homme, et il s’en délectait. Il aurait probablement agi bien différemment s’ils avaient décidé de le détacher en même temps que les autres. Mais maintenant, c’était bien fait pour eux, ils pouvaient toujours courir pour qu’il leur dise quoi que ce soit. Il n’ouvrit même pas la bouche pour respirer.

Dans un grognement rageur, Ira leva le poing, mais maintint sa position, le bras en arrière, sans se résoudre à l’abattre sur Stan. Ses lèvres se retroussèrent dans une imperceptible grimace, et il s’écarta vivement de Stan, qui souffla de soulagement. Lorsqu’il repassa à côté de Briana, il eut un instant de flottement, mais d’un vague geste de la main, balaya l’idée de la soutenir, et s’en retourna dans la salle du moniteur pour reprendre sa discussion avec les prisonniers.  Stan, la tête baissée, le suivit d’un regard en coin pendant les courtes secondes où il resta dans son champ de vision. Il ne pouvait s’empêcher de penser qu’un psychiatre – même étudiant – au sein du groupe, c’était quand même un sacré coup de bol, dans un sens. Il doutait que ce soit vraiment dû au hasard. Le menton baissé, son regard se leva pour parcourir le petit salon des yeux d’un air suspicieux. A la recherche d’une caméra qui les filmerait dans leur agonie, eux aussi. Ses interrogations s’interrompirent aussitôt lorsque son regard tomba sur Briana, et il esquissa un sourire railleur. Mais alors qu’il ouvrait la bouche pour lui faire une réflexion, il fut arrêté par des exclamations venant de la salle du moniteur. Etonné, il se pencha en avant pour tenter de voir quelque chose, mais rien n’avait bougé depuis la dernière fois qu’il avait essayé. Il était désespérément incapable de voir ce qu’il pouvait se passer dans l’autre pièce.

« Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Beugla-t-il en l’air sans s’attendre à recevoir de quelconque réponse, puisqu’ils ne lui en avaient jamais fourni jusqu’ici. Briana s’avança jusqu’au pas de la séparation des deux salles, appuyant doucement la main sur le coin de la bibliothèque, faible pilier contre la sensation imminente qu’elle allait s’écrouler.

- Il y a un troisième prisonnier, annonça-t-elle d’une voix blanche.

- Qui ? S’écria Stan. 

- La fille aux tatouages. » Répondit Briana sans lâcher les écrans du regard. 

  • le mystère est de plus en plus dense, je dirai à couper au couteau... puisqu'il n'y en qu'un pour tous! Un peu d'humour, ça fait retomber la pression de la lecture!!! La suite... CDC

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Yoda 24 04 09 002 92

    yoda

  • Ah je suis comme Christine, je sais pas quoi dire à part que ton style est toujours aussi passionnant, haletant, je suis à fooooond !!! :))

    · Il y a plus de 10 ans ·
    20130820 153607 20130820153847362 (2)

    rafistoleuse

  • Pareil que Christine ! Que dire d'autre que bravo, génial et la suiiite !
    Bon travail sur l'ambiance qui joue merveilleusement sur tension accrue - détente par l'humour ! Tu joues à merveille avec nos nerfs ! Et le pire, Octobell, c'est qu'on en redemande !

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Avatar loup 54

    matt-anasazi

  • Merci Christine :) Et bientôt, la suite, bientôt ^^

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Logo bord liques petit 195

    octobell

  • un par un ils se font avoir, et le suspens augmente. c'est vraiment tres bon je sais je dis toujours la meme chose mais quoi dire d'autre. bon la suite c'est pour quand????hein!!! c'est pour quand???

    · Il y a plus de 10 ans ·
    521754 611151695579056 1514444333 n

    christinej

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