Les salles d’attente.

Hervé Lénervé

Attendre, c’est plus long que de ne rien attendre.

« Ô temps suspend ton vol… » Combien de fois, avons-nous demandé au temps de s'arrêter, sans qu'il daigne nous écouter ? Pour qu'un plaisir continue encore.  Pour qu'un Amour dure l'éternité.

Le temps ne se stoppe pas facilement, il existe un temps pourtant où il se pose, c'est celui de l'attente.

Nous sommes quatre dans cette salle d'attente à attendre notre tour. Nous ne nous connaissons pas, nous ne nous parlons pas, chacun en soi, nous attendons. Nous ne sommes qu'attente. Point d'heure de rendez-vous, ici, quel sera le prochain ? Personne ne le sait. Lui, l'autre, moi, personne ne sait. Ils viennent comme ils l'entendent, quand ils peuvent, quand ils veulent, leur planning, leur logique, leurs impératifs de travail, nous l'ignorons.

Ils viennent, ils disent du doigt, toi, vient et toi y va… Des bruits, des cris, puis plus rien, l'attente du suivant reprend.

L'attente tue. Quand c'est ton tour, tu rentres dans l'action et le temps, pour long qu'il soit, est un temps vécu.

L'attente de ma torture me torture. L'attente de ma mort, me tue.

Mont Valérien, février 44, dehors, il neige. Nous étions quatre, à attendre, j'étais un, du groupe Manouchian, à attendre dans l'absence du temps, l'heure de mon exécution. « Ô temps suspend ton vole… ».

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