L’homme à la tête de compteur. (1)

Hervé Lénervé

Je me suis levé ce matin avec la tête comme un compteur. J’avais fait la foire la veille, donc rien d’étonnant à cela.

Comme à l'accoutumé, je passais acheter du pain frais pour le p'tit-dèj. Les piétons que je croisais riaient sous cape, je vérifiais que j'avais bien fermé ma braguette, car d'un naturel étourdi, cela m'était déjà arrivé par le passé et j'avais terminé ma journée au poste pour exhibition sur la voie publique. En effet, comme ce n'était vraiment pas mon jour, j'avais omis le caleçon aussi.

Bon, rentré à la maison, je passe à la salle de bain pour voir ce qui pouvait déclencher l'hilarité des chalands.

Putain ! Quel ne fut pas ma stupeur en constatant que je n'avais pas la tête comme un compteur, mais que j'avais réellement une tête de compteur.

Deux cadrans en guise d'yeux avec des chiffres qui défilaient dedans. Cela me donna le vertige et je dus m'évanouir un instant.

Quand je repris le compte de ma vie, je tentai de rationaliser le processus. On fait tous cela. En détaillant mon compteur, avec qu'une connaissance commune en la matière, je constatai que mon compteur n'était pas de la dernière génération électronique, c'était un vieux machin mécanique avec des rouleaux de chiffres qui tournaient sur eux-même. Etais-je tête de compteur électrique, d'eau, de gaz ? Aucune idée, il n'y avait pas d'unité inscrite pour m'aider.

Pourtant, à force de réfléchir et par un calcul fastidieux, j'en déduisis que l'œil de droite qui évoluait dans un  ordre croissant était mon âge en minutes, il affichait 34 689 600. Si vous êtes fortiches en arithmétique, vous pouvez trouver l'âge du capitaine. L'œil de gauche allait décroissant, je ne m'attardai pas trop sur cette découverte, qui veut connaître, à la minute près, son obsolescence biologique ?

Malheureusement, le cerveau est chiant et moi qui n'ai aucune mémoire des chiffres, infoutu de me rappeler, ne serait-ce que mon numéro de téléphone, j'avais dans ma tête de compteur, le chiffre fatidique de 262 800 inscrit à l'encre indélébile. Si vous êtes fortiches en arithmétique, vous pouvez savoir quand j'arrêterais de vous saouler de mes textes débiles.

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