L’honneur des hommes (2)

Hervé Lénervé

Je ne reviendrai pas sur le concept flou de l’honneur, déjà traité, donc rentrons directement, sans palabre inutile, dans le vif du sujet, le gras du bide des sujets s’affrontant.

Nous avions déjà vu le duel au pistolet qui se jouait à deux.

A présent, nous aborderons le duel, dit à l'épée, car il se pratique avec des épées. Oui, il ne faut pas demander trop de subtilités à des gus qui se déplacent pour se tuer, aussi.

Tout comme pour le duel au pistolet, il faut être deux. Moins, on a l'air con, plus, c'est une baston, (Pas traitée dans ce traité).

Par contre, contrairement au duel au pistolet, les belligérants ne se positionnent pas à dix pas. A moins d'avoir des épées de cinq pas et demi, peu pratiques à porter à la ceinture pour frimer en se pavanant dans les salons mondains. Gare à la vaisselle fine et aux vases précieux.

Précisons pour être puriste et tatillons que le duel à l'épée se pratique, en fait, avec des fleurets, mais l'intituler « duel aux fleurets » faisait trop bluette. Néanmoins, le règlement le stipule strictement, seuls les fleurets sont autorisés. Pas la peine de se pointer avec des hallebardes, des sabres laser, des enclumes, c'est interdit !

Contrairement au tir au pistolet, où on pouvait toujours compter sur une chance aléatoirement hasardeuse pour faire mouche sans savoir tirer, le fleuret n'admet pas la médiocrité, « à la fin de l'envoi, je mouche ! » Celui qui n'a jamais pratiqué l'escrime pare avec un certain handicap certain. Là, il lui faudra une chance miraculeuse pour que son adversaire meure d'un infarctus foudroyant, d'une rupture d'anévrisme, d'une piqure de vipère, d'une distraction à un croisement de train, juste avant de croiser le fer. Même si les causes de trépas sont multiples, la probabilité qu'une seule arrive à la bonne heure reste de l'ordre du peanuts dans la courbe de Gausse.

C'est un peu comme, dans un autre registre, espérer contacter une intelligence extra-terrestre supérieure sans combiner la distance avec le temps. La distance qui sépare deux planètes susceptibles de développer une vie avec le temps d'évolution de cette vie pour aboutir à une civilisation aussi savante que la nôtre et posséder une technologie moderne comme le Minitel. Mais ne nous égarons pas dans les galaxies où le duel à l'épée se pratique assez peu pour cause de ringardise.

Donc sur Terre. Les deux protagonistes se mesurent, justement, pieds à terre, pas de chevaux, pas d'éléphants, pas d'autruche ou autres montures. Comme interdiction formelle de monter dans les arbres ou de s'envoler dans le ciel, c'est prohibé par le règlement officiel de la fédération des gentlemen en dentelles.

Oui, pour être un duelliste distingué, il faut revêtir une ample chemise à jabot, blanche lavée et repassée, style bucherons canadiens (vendue d'occasion sur eBay) qui est du plus bel effet quand elle se macule de sang bleu.

Voilà en gros les règles de base.

Maintenant pour ceux qui trouveraient ces affrontements trop efféminés, prout-prout ma chère, il y a toujours le bon gros duel médiéval en armure de ferraille avec casse-têtes et boucliers. Une vraie boucherie à l'ancienne où tous les coups sont permis, même l'utilisation de la catapulte. Pour peu que les armes utilisées soient toutes estampillées par le bureau de certification des combats chevaleresques à terre ou à cheval, mais toujours sur Terre.

Voilà, vous savez tout, vous pouvez maintenant partir discuter avec votre con de voisin au sujet de son coq de merde qui fait chier tout le patelin.

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