Maman

Dis moi pourquoi c'est si dur de se détacher l'une de l'autre. Pourquoi l'on pleure en pensant à la semaine rude qui va s'écouler, lentement. Nous ne serons pas ensemble. Reliées par le coeur, la pensée, mais si loin physiquement que ma poitrine me brûle rien que d'y penser. Il fait beau dehors mais la pluie s'écoule dans mon corps.

En un mois, je ne te verrais que deux semaines. en deux mois, je ne t'en verrais qu'un. En douze, seulement six. En deux ans, juste un. En dix ans, rien que cinq. Toujours la moitié. Le calcul est vite fait et m'effraie. Quand tu me dépose devant l'appartement de papa, que tu descends mon sac et que tu m'enlaces, je ne peux retenir mes larmes. Je t'aime à en crever. Tu le sais non? Peut-être que je ne te le dis pas assez. Une relation aussi fusionnelle entre mère et fille, entre génitrice et enfant, c'est rare et exceptionnel. A tes yeux je suis un poussin, ton petit bébé que tu aimes enlacer devant la télé, sur le canapé. Comme si rien ne pouvait nous atteindre. Aux miens, tu apparait comme une fée lumineuse où j'aime me blottir, protégée de tout. Une bombe pourrait éclater, la terre pourrait être décimée et toute la population humaine anéantie, on resterait collées, ensemble. A jamais.

C'est dur d'être ainsi séparé. Tu me dis que l'on va s'habituer, que bientôt, on en rigolera, de nos moments de sensiblerie digne d'un film à la guimauve. Mais dans combien de temps? Un an? Un mois? C'est trop long. J'ai le temps de verser un ou deux torrents d'eau salée.

Tu me rassures et me murmure que même avec la morve au nez et les yeux rouges, je suis la plus belle. J'en doute. C'est sûr tu n'es pas objective. Je reste ton chaton, ta lutine. Je suis la lumière de ta vie. La seule l'unique. (oui on a jeté le frangin dans un ravin pour que je sois la seule et l'unique véritablement... Bon pas vraiment, mais faisons comme ci.)

Tu mérites d'être heureuse. Et tu me manques. J'aimerai ouvrir ma fenêtre et hurler ton nom, pour que tu viennes comme par magie. Tu es une fée après tout!

Je te le dit haut et fort, et je n'ai pas honte de ces mots qui sortiront de mes doigts : Maman, je t'aime. A la folie. Plus que tout.