Métamorphose

Et brusquement, je devins oiseau.

Un duvet blanc se forma à la lisière de ma colonne vertébrale. De lourdes plumes grises poignèrent à la surface de la peau, leur extrémité rouge de mon sang. Mon épiderme se couvrit de coton froid, terne et douloureux. Mes ongles se changèrent en serres élimées, tranchantes comme des rasoirs.

Une odeur de pluie m'enveloppa brutalement. J'étais cet oiseau de mauvais augure, sombre, glacé, que je voyais depuis ma fenêtre chaque matin. Il m'observait de son petit oeil vide et noir, semblait expectorer des injures par son petit bec gris. Je le regardais sans vraiment le voir, effrayée peut-être par toute cette noirceur. C'était comme si ses ailes avaient été cousues de goudron, de pétrole sur sa peau. Un liquide noir coulait dans ses veines, une épine empoisonnée.

Je suis devenue la haine, la froideur, la colère et le malheur.

Mon enveloppe humaine respire la déliquescence ; des lambeaux de chair opale s'accrochent à la ramure des arbres que je frôle. Je suis une ruine.

Je pleure mes souvenirs et ma beauté. Ma beauté et son souvenir.

Je suis oiseau.