Moi, mes rêves et Lili à Wellington

ironist-lady

C'était censé être des vacances de rêve, dans un endroit magique. C'était sans compter sur Lili.

Enfin j'allais vivre l'expérience dont j'avais toujours rêvé. À moi la Terre du Milieu, les Orques et les Hobbits. À moi les Elfes. Le Gouffre de Elm. À moi… l'horreur. Je venais à peine de mettre les pieds dans ce qui aurait dû être mon paradis sur Terre. C'était sans compter sur Lili. Cette peste avait décidé de briser mes vacances. Assis par terre contre le mur face à elle, je tremblais en maintenant mes genoux contre moi.

Voilà où j'en étais après des mois et des mois de sacrifice et surtout de toutes ces heures supplémentaires accumulées. À la base, ça n'a pas l'air si dramatique. Après tout, qui n'avait pas travaillé parfois plus tard que prévu ? Mais combien avait une version en chair et en os de la Reine Rouge comme patronne ? En plus que d'être soupe au lait, elle avait tendance à être bipolaire me criant dessus avec des « Zach, mais qu'est-ce que je vais faire de vous ? » et la seconde d'après louant mes services. Allez comprendre.

J'avais donc bien mérité ces vacances dans l'une des plus belles îles du monde, l'endroit où ma saga préférée avait été tourné. Plus qu'une expérience cinématographique et littéraire c'était pour moi l'occasion de m'offrir une belle aventure. Refusant catégoriquement un hôtel où je n'aurai rien à faire grâce aux personnels et aux femmes de chambre, j'avais loué une maison dans les bois. Ça existait. Je me rappelle de ma surprise en la trouvant sur un site de location. Ayant grandi dans un appartement je n'avais jamais connu la belle maison avec la barrière blanche et la cabane en haut de l'arbre pour jouer et se détendre. C'était donc comme un rêve d'enfant devenu réalité.

Celle-ci était parfaite. Spacieuse, elle avait deux belles chambres. Une cuisine tout équipée. Un beau séjour. Une terrasse immense d'où je pourrais savourer un bon thé tout en regardant le coucher du soleil. Le tout avec une magnifique vue sur la baie.

J'avais tout préparé. Les lieux à visiter. Les vêtements selon le temps. Le parcours à suivre. Les routes à prendre. Tout tout tout. Il n'y avait donc aucune raison pour que ce voyage se passe mal. J'étais prêt à tout affronter. Enfin tout… sauf Lili.

Immense elle avait décidé de s'installer dans la maison pendant mon absence prenant l'absence de locataires pour une invitation pour prendre ses quartiers et pouvoir faire sa petite vie tranquillement. Personne ne lui avait dit que je comptais arriver. Et maintenant que j'étais là, elle semblait ne pas être décidée à partir. Pourtant je lui avais dit…enfin bégayé qu'elle devait s'en aller. Je l'avais même supplié. Mais ma requête et mes larmes n'avaient rien fait. Elle était toujours là sur le mur face à moi.

J'avais passé presque toute ma vie en ville. Mes rares expériences avec la nature se résumaient à quelques jours à la montagne dans un chalet lors d'une classe de neige et aux jardins publics. Autant dire que j'avais une relation très distante avec les Arachnés. D'accord soyons francs j'étais terrorisé. Apeuré. Terrifié. Bref, j'étais un vrai arachnophobe.

Me voilà seulement 1h après mon arrivée, dans ce qui avait été mon pays de rêve, face à une immense araignée. Ses huit grandes pattes bien allongées le long du mur où elle s'accrochait fièrement. Immobile elle avait l'air d'avoir pris son aise, comme si elle était chez elle. Lili ne semblait pas prête à bouger ne serait-ce que d'un millimètre. Oui j'avais décidé de l'appeler Lili parce que c'était un prénom assez beau, assez apaisant. Beaucoup mieux que grosse bête poilue avec des dizaines d'yeux et des pattes immenses et qui n'aura aucun mal à me sauter dessus pour me tuer.

Après plusieurs longues minutes à se toiser mutuellement, je me suis dit que si j'avais pu affronter la Reine rouge pendant tous ces mois je n'allais pas me laisser faire par une bestiole. Non mais. Toujours en longeant le mur je me relevais, inspirais un bon goût et…parti en courant – et en hurlant – jusqu'à la porte d'entrée. Dévalant les marches quatre à quatre j'arrivai miraculeusement sans encombre en bas mais en m'étant largement fait remarquer.

Le voisin d'à côté se mis à rire alors que je tentais encore de reprendre mon souffle. Voyant ma tête il comprit tout de suite et se moqua de mon petit côté Américain des villes. Il me donna une tape sur l'épaule avant de monter dans la maison pour s'occuper de Lili. Il avait l'habitude, me disait-il. Je l'observai de loin amener cette intruse hors de chez moi et sachant la peur que j'en avais pris soin de la conduire à des centaines de mètres. Lorsqu'il revint il me sourit et me proposa une bière pour me remettre de mes émotions.

« Merci, » lui dis-je en tentant de me calmer.

« Pas de problème. Ce n'est rien ça. On en reparlera quand vous rencontrerez Bruce, » plaisanta-t-il en se dirigeant vers sa porte d'entrée.

Ces vacances allaient être longues.

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