Nécrologies

Eva Scardapelle

nouvelle pour le concours "meurtre mystérieux à Manhattan"

— Quoi de neuf ? Bâilla le lieutenant Carter, en se servant un café. Ton avis sur ta première nuit new yorkaise ? La France te manque déjà ?

— Je suis fan de la rubrique nécrologique, répondit Prades en feuilletant son journal. Faut que je me fasse soigner, je sais.

— T’as cru que tu venais pour les vacances ? Railla Carter, tout en lui lançant sa veste. Allons-y !

Sur le trajet, Carter lui fit le topo. Un ouvrier, Tony Kempsisky, avait été retrouvé mort deux mois auparavant, sur le chantier de la Seven World Trade Center. Il était tombé du 14ème étage, alors qu’il soudait deux poutres métalliques. Le mousqueton du harnais de Tony n'avait pas été retrouvé et son chef était formel : son employé ne contournait aucune règle de sécurité.

Une autopsie avait été pratiquée, révélant de légères griffures sur le cou ainsi que des résidus de colle autour de la bouche. Kempsisky, marié à Lena depuis 15 ans, père de trois enfants avait été assassiné. Il n'avait pas d'ennemi, ne trempait dans aucun trafic, travaillait six jours sur sept. Le couple filait le parfait amour, sortait peu et envisageait un quatrième enfant.

De tous ces éléments, Prades n'en ressortait rien. Mais quelque chose le perturbait. Il parcourut le rapport remis par son ami.

— Fais demi-tour....tout de suite ! Retournons chez toi !

Carter braqua à fond. Arrivé sur les lieux, Prades se précipita sur le journal. Son regard s’arrêta sur ces quelques lignes :

                        Mrs Sarah Kempsisky,
                        Mrs Lena Kempsisky et ses enfants :

                     Une messe sera célébrée en mémoire de

                                       Mr Joe Kempsisky

                              le dimanche 14 juillet 2003

                           à 16h en l'église de St Martin

               les pompiers de New York rendront hommage

              à leur regretté collègue, décédé accidentellement

                                        le 14 juillet 2002.

 

Il alluma une cigarette.

— Tu savais que le père de Tony était pompier titulaire ?

— Oui bien sûr. Mais quel rapport ? Fit Carter, perplexe.

— Ecoute, dépose-moi chez Lena Kempsiski. J'ai quelque chose à vérifier.

Prades sonna à la porte de la veuve Kempsisky. Cette dernière l'invita à rentrer. Il écouta avec attention le récit des évènements. Peu après les attentats du 11 septembre 2001, Tony et son père avaient passé la majeure partie de leur temps ensemble. Ils ne se quittaient que pour dormir. Son beau-père était perpétuellement anxieux. Mais qui, ayant vécu une journée comme celle-ci au coeur des flammes et au milieu des débris, n'aurait pas paru éreinté, affaibli et désemparé ?

A la mort de son père, Tony avait bénéficié d'un arrêt de travail de quatre mois, sous tranquillisants. Il maintenait que son père avait été assassiné. Mais, à chaque fois qu’on le questionnait à ce sujet, il s'enfermait dans le mutisme. Il entrouvrait plusieurs fois par jour les rideaux du salon pour contrôler les allées et venues dans leur rue.  Il avait repris le travail sous la pression financière,  les créanciers commençant à s'impatienter. La vie avait repris son cours mais tout avait changé.

Lena se leva et ouvrit le tiroir du buffet, tendit une micro carte SD à Prades.

— J'ai retrouvé ceci dans la poche intérieure de son blouson...après...

—Oui...fit Prades en saisissant le petit objet. J'ai une dernière question, Mme Kempsisky...Savez-vous à quel bâtiment du WTC, le père de Tony a-t-il été affecté le jour des attentats ?

Lena répondit sans hésitation.

— Au WTC 7. Il y a travaillé la majeure partie de la journée. Vous savez, cette journée a été vraiment terrible pour nous tous...

— Je n'en doute pas. Ecoutez, je vais regarder tout cela et je reviens vers vous, d'accord ? Je vous remercie pour votre accueil et votre temps, en cette période douloureuse...

Prades héla un taxi, s'engouffra sans tarder dans la berline.

— Au commissariat de la 66ème s'il vous plait, indiqua Prades. Il sortit son smartphone et y inséra la carte, comportant des centaines de fichiers de la C.I.A. D'un doigt hésitant, il en ouvrit un. Son visage se décomposait au fil de sa lecture. Il en ouvrit des dizaines, l'un après l'autre. Il se laissa choir contre le dossier du siège. Tout lui paraissait clair à présent : la mort de Joe, celle de Tony...combien d'autres, d'ailleurs ?

— On y est monsieur. Trente-deux dollars, s'il vous plait.

Prades régla le chauffeur et repoussa la portière. Il n'eut pas le temps de ranger son smartphone. Une camionnette le heurta de plein fouet et le traina sur plusieurs mètres. Un homme en sortit, écrabouilla le téléphone sur la chaussée et se précipita vers le corps de l’inspecteur.

  • J'aime beaucoup, on rentre petit à petit dans ce que tu veux nous faire entendre, bonne chance à toi

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Tim burton alice in wonderland chatty flowers

    pulsationsimaginatives

    • merci beaucoup pour ta lecture et ton com Clémentine !

      · Il y a plus de 10 ans ·
      W5   copie ret

      Eva Scardapelle

  • On est tenu en haleine, c'est sûr... j'aime beaucoup!

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Default user

    loupi

  • Pas mal du tout.
    Le format réduit du texte nous laisse sur notre faim. Malheureusement, difficile de développer plus certains aspects.
    En tout cas, ça me plait bien. Bien joué.

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Francois merlin   bob sinclar

    wen

    • figure-toi que le texte initial fait 9800 signes...tu imagines comment j'ai dû "ratiboiser" hier soir :D
      merci à toi pour ton passage ici. Au plaisir de te lire...

      · Il y a plus de 10 ans ·
      W5   copie ret

      Eva Scardapelle

  • bien ficelé, bonne chance pour le concours

    · Il y a plus de 10 ans ·
    5023283 7500212

    hvm

    • merci Thierry, bonne chance à toi également !
      (je vais te lire de ce pas ! )

      · Il y a plus de 10 ans ·
      W5   copie ret

      Eva Scardapelle

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