Nos Ecchymoses
enzogrimaldi7
Au bout du petit matin, l'extrême, trompeuse désolée escarre sur la blessure des eaux ; les martyrs qui ne témoignent pas ; les fleurs du sang qui se fanent et s'éparpillent dans le vent inutile comme des cris de perroquets babillards ; une vieille vie menteusement souriante, ses lèvres ouvertes d'angoisses désaffectées ; une vieille misère pourrissant sous le soleil, silencieusement ; un vieux silence crevant de pustules tièdes, l'affreuse inanité de notre raison d'être. Aimé Césaire. Cahier d'un retour au pays natal.
Ainsi va la vie. Pour certains, une succession d'épreuves, pour d'autres, un défilé de mode. Fortunes, infortunes. Pour toi tout a commencé lors de cet hiver brumeux où des actes malveillants t'ont réduite à néant. Un père alcooliquement irresponsable ou irresponsablement alcoolique. Des mains un peu trop baladeuses, le tour est joué.
Pour cet autre, son erreur fut de faire un peu trop confiance au curé du village que l'on croyait bienveillant. Hélas il cachait sous sa soutane un instrument d'ordinaire inoffensif, ce jour là redoutable.
Ces deux petits frères écoutaient Al Jarreau dans le même Walkman et montaient un peu plus le son pour couvrir les cris stridents de haine que poussaient leur mère contre leur père qui n'avait de tord que celui d'être pugnace.
Main dans la main ils revenaient chaque soir de l'école ne sachant trop ce qu'ils allaient trouver chez eux: l'un ou l'autre des parents évanoui ou portant les stigmates d'un énième affrontement, pourquoi pas l'un des deux gisant. Les yeux définitivement clos.
Les journées passaient donc, la boule au ventre, dans la peur du lendemain et de la prochaine incartade déclenchée par la paranoïa d'une mère aux abois et l'entêtement d'un père soucieux de sauver les apparences: dix-huit ans de guerre civile à domicile.
Ils avaient la sensation de vivre quelque-chose d'exceptionnellement grave qui les distinguait de leurs semblables, du moins de ceux pour qui c'était un fleuve tranquille.
Ils ne savaient pas encore qu'ils allaient passer le restant de leur vie à tenter de résoudre une insoluble équation: on ne guérit jamais de certaines blessures encore moins de celles contractées lors de l'enfance, on fait avec.
Aucune bananeraie contaminée, aucun accident d'avion, aucun drame ici ou là ne peut aider à effacer ni même relativiser nos peines, tout juste nous aident elles à comprendre la détresse des autres.
D'autant plus que ces mêmes douleurs se réveillent à chaque fois que l'on se confronte à l'avortement de nos projets, et dans le cimetière de nos rêves enfouis, il y a les cadavres de nos échecs.
Nos chagrins nous sculptent. Ils déterminent nos pas, nos choix, nos envies, nos préférences. Ils sont nos limites. Nous n'avons cessé d'essayer de les dépasser au prix d'un épuisement latent, constant, handicapant mais parfois transcendant.
La transcendance, voilà l'unique ressort à ce qui nous plaque au sol. On ne compte plus les chefs d'oeuvres musicaux et autres réalisés dans la douleur. Les jours où, artistes ou simples quidams, trouvent l'inspiration nécessaire pour toucher les étoiles.
Il y a aussi le souffle du vent du petit matin, au parfum de liberté, celui qui attise les braises de nos ambitions jamais éteintes. Il porte un message ancestral où figurent les espoirs sacrés de générations d'hommes et de femmes promis à l'oubli et dont l'abnégation survit encore grâce à leur résilience.
Et grâce à l'amour. Cet ultime antidote, ce baume éclatant de douceur et de tendresse. Adrénaline régénérante, élixir magique. L'amour pardonne tout, peut tout. C'est un pays merveilleux et dangereux à la fois, où l'on meurt et ressucite toujours.
J'ai aimé ma ville. J'ai aimé la Lybie, l'Isère. J'ai aimé la Bretagne, le Gard. J'ai aimé la Savoie, Anduze. J'ai aimé Belfort, Aix-en-Provence. J'ai aimé La Réunion, Bouc-Bel-Air. J'ai aimé Grenade, Madrid. J'ai aimé Toulouse, Bordeaux. J'ai aimé Paris, Taïwan. J'ai aimé Annecy, Valence. J'ai aimé Southampton, Winchester. J'ai aimé Le Pakistan, l'Irlande. J'ai aimé Versailles, le Pays de Galles.
2018
Peinture: Nudes with cigarettes and alcohol. Giaco
https://www.instazu.com/profile/giacoartanddesign
Musique: Al Jarreau, We got by
https://youtu.be/UD5oCUqrvMk
Outrageante injustice
· Il y a presque 2 ans ·Poison de construction
Cocon du foyer plus dangereux que le monde
Leçons dans la souffrance
Renforcement dans la solitude
D'une enfance brisée
Fterò Asterioù
Ça vous parle? :-)
· Il y a presque 2 ans ·enzogrimaldi7
Elle était jeune
· Il y a presque 2 ans ·Fragile
Elle était sa petite fille
Il était sombre
Triste
Perdu dans la famille
Elle avait peur
Seule
Plongée dans cette noirceur
Est-ce qu’elle a compris
Les conséquences sur elle
Déroulant son esprit
Il était fou
Cruel
L’âme anéantie
Par ses infâmes penchants
À contrôler sa vie
Son corps et son esprit
Il l’a brisée en elle
Innommable infamie
Alors qu’elle ne souhaitait
Que découvrir la vie
Il a déshonoré son âme
Outragé sa vie
Par ses infâmes envies
Il a cassé son être
Conservant le paraître
Cacher les faits subits
Ses silencieux oublis
Enfance volée
Innocence mutilée
Par ses affreux projets
Quel est cet homme brisé
Marionnette manipulée
Par ses folies cachées
Reflet dans le miroir
Conscience réactivée
Se demandant comment
Tout cela a commencé
Sombres destins liés
Karma à épurer
Que lui a-t-il volé
À part sa dignité
Cela en vaut-il la chandelle
Serait-ce une bagatelle
Simple leçon de vie
C’est à coup de burin
Que l’on taille une pierre
Afin de révéler
Son trésor caché
Était-il son sculpteur
Lorsqu’elle voyait
Un abuseur
L’a-t-il révélée
Lorsqu’elle pensait brûler
Doit-elle le remercier
Chagrinière
Si cette fille est une pierre
Qu’y a-t-il en son cœur
Seulement de la noirceur
Quelqu’un l’y a-t-il mis
Simple expérience de vie
La responsabilité
Est-elle partagée
Ce n’est pas sa faute
Il n’était que l’hôte
D’une sombre énergie
Bien plus grande que lui
Fterò Asterioù
❤️
· Il y a presque 2 ans ·enzogrimaldi7
L'amour oui. Mais être bien aimé et mon malmené, mal aimé...
· Il y a plus de 3 ans ·sophiea
Don't we all want this?
· Il y a plus de 3 ans ·enzogrimaldi7
vous terminez tout de même sur une note optimiste, vieillir c'est éprouver tout à la fois le bonheur et la douleur
· Il y a plus de 6 ans ·Susanne Derève
Bien dit. Voilà, au moins, l'un des avantages de vieillir: les douleurs du passé semblent moins pénibles à supporter.
· Il y a plus de 6 ans ·enzogrimaldi7
"Il y a aussi le souffle du vent du petit matin, au parfum de liberté, celui qui attise les braises de nos ambitions jamais éteintes. Il porte un message ancestral où figurent les espoirs sacrés de générations d'hommes et de femmes promis à l'oubli et dont l'abnégation survit encore grâce à leur résilience." Mazette ! :o) Bravo, c’est très beau ça. Je ne suis pas très bavard mais j'aime me faire happer par ce genre de texte.
· Il y a plus de 6 ans ·daniel-m
Merci pour votre généreuse contribution. Votre perspicace, espiègle et malicieuse perception est utile en ces temps de réflexion convenue et sans génie.
· Il y a plus de 6 ans ·enzogrimaldi7
La transcendance ou résilience, comme l'appelle et la définit Boris Cyrulnik ?
· Il y a plus de 6 ans ·Sy Lou
Tout à fait. Dans la résilience il y a ''résister'', ''surmonter'' et ''rebondir''. Il faut aussi y ajouter, à mon sens, ''accepter'' ou ''accueillir''. Il faut résister pour ne pas abandonner mais il faut accueillir, accepter ce qui nous arrive (et non le nier , car le déni entraîne des blocages). Cest la deuxième étape ( après la résistance). Vient ensuite le moment de surmonter puis de rebondir. Résilience veut dire tout cela.
· Il y a plus de 6 ans ·enzogrimaldi7
C'est une excellente définition plus explicite que celle de Cyrulnik.
· Il y a plus de 6 ans ·Sy Lou
Loin de moi l'idée de me comparer au célèbre neuro psychiatre, mais on dit souvent que l'expérience vaut mieux que la théorie.
· Il y a plus de 6 ans ·enzogrimaldi7
J avais bien compris :))
· Il y a plus de 6 ans ·Et justement, ton texte transpire le vécu.
Sy Lou