Nouvelles d'un roman

Stéphan Mary

Posez vous au bord de la mer, Regardez la, écoutez la attentivement. Sentez ses flots continus vous murmurer à l’oreille qu’il est temps de prendre du recul sur votre vie, que vos émotions, vos sens, ne sont pas complètement vides de sens.

Acceptez son message quand les vagues viennent mourir doucement à vos pieds, à l’ombre des pins, dans l’écrin du chant des cigales. Ne laissez pas l’angoisse vous saisir mais si l’envie vous prend, ne retenez pas vos larmes. Elles se joindront instinctivement au salin de la création.

Rentrez chez vous et informez votre douce moitié que vous aller partir quelques jours mais attention : soyez convaincu ! Il est indispensable que la sincérité du moment soit à l’image de votre besoin : prendre du recul. Partir quelques jours parce que vous avez mal dans vos tripes, que votre survie vous crie, vous hurle dans les oreilles internes, qu’il est temps que le bateau quitte son point d’ancrage.

« Oh peut-être et sans doute pas longtemps !», juste le temps d’une pause entre travail ou recherche d’emploi, famille, belle famille, enfants, chien, chat, factures, poisson rouge et eau du bocal à changer, obligations, devoirs, responsabilités, fatigue, stress, non désirs (y compris de votre moitié), envies de hurler longtemps réfrénées bref : osez, partez.

Allez vous poser ailleurs mais pas n’importe où, pas n’importe comment. Remontez cet infime lien qui vous conduit quelque part, qui vous amène à votre quelque part. Où que vous soyez, il ne faut pas que ce soit une fuite du connu pour l’inconnu, trop facile.

Une fois sur place, posez vous une seule question : comment ? En êtes vous arrivé là ! Non pas pourquoi mais comment ! Allez chercher la ou les réponses. N’hésitez pas à interroger votre passé, même s’il rit, s’il pleure, qu’il crie ou qu’il se taise, Interrogez le !

Dans ce méandre Kafkaïen de questions sans réponses, une nouvelle réalité, nouvelle jeunesse, s’avance vers vous. Elle est jolie, féminine, souriante, un peu roublarde aussi. Regardez la fondre sur vous, vous êtes la proie idéale. Elle vous sourit, vous séduit, vous donne envie. Oubliez vous et prenez un deuxième risque, celui de la recevoir telle qu’elle s’offre. Faîtes le en toute simplicité. Elle vous dira de toute façon que c’est vous qui l’avez séduite. Elle vous l’affirmera, effrontément convaincue d’elle-même mais peu importe. Elle a une dizaine d’années de moins que vous et ça…. Cela vous remet sur les rails. Elle vous apparaîtra de fait, avec une fraîcheur à laquelle vous ne songiez plus, à laquelle vous aviez renoncé en enterrant il y a fort longtemps votre propre sentiment de séduction.

Laissez vous embarquer dans son voyage, son appétit de vivre. Même si elle est en désespérance, elle l’est moins que vous. Acceptez le dernier verre qu’elle vous propose chez elle. Ne mettez surtout pas sous cloche vos désirs et votre émotion. Ne lui offrez pas la surface plane et polie que vous octroie la différence d’âge mais soyez sincèrement et attentivement vous-même. Ne lui faites pas jouer un rôle, elle a suffisamment de travail avec le sien. Ne vous embarrassez pas de fioritures, allez à l’essentiel.

Aimez la pour elle, pour l’instant de plénitude qu’elle vous offre, avec ou sans retenue, avec pureté. N’oubliez pas que quelque soit son âge, elle est plus jeune et sa jeunesse est un océan qui vous enlacera dans les béatitudes éthérées de l’instant présent. Soyez prévenant, attentionné, délicat. Laissez vous aller à ne plus être que vous, en toute humilité, très simplement. N’ourdissez pas de sombres complots de possession, de fausse tranquillité, de projection dans le futur. N’ourdissez pas, Soyez.

Arrivé là bien sûr vous êtes en danger ! La nuit aura été très belle car inattendue et inhabituelle. Vous vous serez revus. Vous aurez eu la décence de lui expliquer, toutefois sans entrer dans les détails, la particularité de ce moment privilégié venu s’inscrire comme une bulle d’air dans votre démarche de remise en question.

Le danger deviendra perceptible à l’instant où votre nouvelle réalité vous demandera de vous intéresser à elle. Qu’est ce à dire ? Qu’elle a ses propres réalités, ses exigences ; qu’elle tient à ce que vous la respectiez dans ses moindres recoins, là où elle cache les détails. C’est un moment étrange sur lequel vous n’aurez pas de prise, pas de maîtrise. A ce stade vous ne maîtrisez d’ailleurs plus grand-chose : la domination de vous-même ; votre sang froid ; « la maîtrise du danger » ! Vous souriez n’est ce pas ? Combien de fois cela vous est il arrivé ? Une ? Plusieurs ? Une multitude de fois…

Au loin quelqu’un s’essaie à torturer un clavier de piano et à lire, mais à l’envers, une petite cantate, une mélodie toute légère massacrée par les marteaux qui assomment les touches. Le ciel se grise, se dégrise de trop de soleil ; les nuages plombés d’encre perlée de larmes grises dévalent les sillons de la vieillesse, s’incrustent en flots continus dans les rigoles âgées de la maturité.

Puis le morceau se délie, se déplie. Les doigts courent sur le clavier, caressent les noires et les blanches. Les pédales vibrent à l’unisson, résonnent, encordent. La musicalité devient sonore, audible, « j’entends bien » pensez vous.

« Moderato Cantabile » murmure une petite voix intérieure, « moderato… ».

Donnez rendez vous à votre nouvelle réalité, au bord du fleuve c’est bien. Elle viendra ou ne viendra pas.

C’est un canari domestique dont la cage reste ouverte.

Aurez vous le courage de partir ? De revenir aux sources ?

Synopsis :

En 2050, la Terre a perdu près des deux tiers de toute vie. Dans un effort considérable, les pays les plus riches développent des technologies incroyables et peuplent l’espace pour sauver l’humanité de sa folie destructrice.

A l’aube de l’an 2300, Jeanne Piaget responsable d’un service d’agents spéciaux travaillant pour le compte de l’Agence Inter Gouvernementale qui gère plusieurs espaces temps, est chargée d’enquêter sur une attaque des serveurs informatiques de l’agence. Son enquête lui révèle des textes écrits par des personnes de son entourage qui ont en commun de vouloir fuir quelque chose. Pour son mari, il s’agit d’échapper à une forte dépression qui l’a immobilisé avant leur rencontre (Le canari) ; Une mère tente de se sauver d’une vieillesse inéluctable par une mort programmée ; Une étrange tueuse à gage fuit un passé trouble ; Son premier adjoint voudrait se défaire d’un rapport malsain avec sa femme.

De plus, Jeanne se trouve confrontée à un événement d’une gravité sans précédent : Tuteur, le grand penseur de l’univers, est mort et elle doit peut-être être l’élue pour prendre sa succession par interim. Plusieurs fois confrontée à l’expérience de la mort, elle découvre une nouvelle peur : le Rien. Mais le rien, le néant, est-il un simple échappatoire ou une fuite définitive ?

Tous ces destins mêlant le passé et le présent vont se croiser dans une étonnante convergence où sauver l’univers de la folie des hommes laisse présager un avenir singulier pour le futur de l’humanité. Face à un régime de gouvernance autocratique, des résistants tentent de tout faire pour que l’Homme retrouve son libre arbitre et sa part d’universalité. Sont ils à la base de l’attaque des ordinateurs qui risque de paralyser l’univers ? Sont ils dans la fuite de la réalité de la survivance humaine qui, par cette seule motivation essentielle, impose des lois et des règles dont il ne faut déroger sous aucun prétexte ?

A sa grande surprise, Jeanne tombe amoureuse. Aura-t-elle le courage de céder ou celui de fuir une nouvelle histoire qui la bouleverse pour préserver son couple ?

A travers une intrigue qui mêle enquête gouvernementale, destins croisés et interrogation sur l’avenir de l’homme dans un futur pas si lointain, la fuite semble le dénominateur commun. Mais vraie fuite ou prise de conscience individuelle et collective ? Jeanne Piaget devra faire face à cette angoissante question avant de trouver une réponse très… personnelle.

  • J'ai suivi les lignes comme le fil de l'eau ! Très captivant et ces interrogations sont très justes...Je vais voter...

    · Il y a environ 12 ans ·
    Ma photo

    theoreme

  • oh ! c'est magnifique. Écrit avec beaucoup de poésie. C'est vivant, vibrant, vivifiant.... j'aime beaucoup cet éveil à ce qu'il se passe, cette écoute de l'instant présent. Merci.

    · Il y a environ 12 ans ·
    120x140 image01 droides 92

    bleuterre

  • Plein de finesse et de charme ! La deuxième partie me laisse plus perplexe.
    En attendant, je pars à la mer ! Au moins pour la journée, mais on verra...

    · Il y a environ 12 ans ·
    Bosch bulle fleur400

    hermanoide

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