Capucine #11 - Les Moleskines - Dans Paris
dyonisos
Carnet de voyage numéro onze – Porte des Lilas #11Capucine
J'ai brisé Capucine à la porte des Lilas. Sans préméditation. Sans considération botanique. Les mots sortaient de moi, voraces, ils mangeaient le cœur de Capucine. Face à moi, une jeune fille en fleurs et en pleurs. « Je ne t'aime pas ». La possibilité des mots. La capacité des mots à faire mal, à meurtrir profondément et à laisser des cicatrices qui ont peine à se refermer.
Elle irradiait de la colère de ceux qu'on abandonne. Avec quelques mots, je barrais la route au futur qu'elle s'était inventée avec moi. Dans ma tête, rien. Dans mon cœur, rien. Juste le besoin raisonnable d'abandonner Capucine. Non pas que je l'aimais pas, mais plutôt que je ne l'avais jamais aimé. Trop égoïste et trop accablé pour accompagner quelqu'un, je n'avais que faire de ses supplications. Capucine était belle, Capucine était éduquée. Pétillante, sensible, maternelle et sensuelle. Je n'en avais rien à foutre. Insensiblement, je la regardais déverser ses mots vengeurs : aucun ne pouvait m'atteindre, j'étais déjà loin d'elle et j'avais comme armure l'indifférence. En quelques mois, Capucine avait enveloppé autour de moi des fantasmes, des envies, des désirs et des projets. Je le savais. Je n'avais rien dit. Elle s'était plongée en moi, sans se prémunir, sans se protéger. J'avais encouragé son naufrage en me taisant, en la regardant faire.
Je savais qu'elle était parfaite. Je déteste la perfection : j'ai trop besoin des aspérités qui façonnent l'autre et sa perfection me renvoyait sans cesse à mes défauts. J'ai laissé Capucine au bord de mon chemin, sans me retourner. En rentrant dans le métro, j'ai monté le volume de mon iPod. Je n'ai jamais revu Capucine.
A suivre
Carnet de voyage numéro douze – République #12AnouarEstUneBombe
Pour le onzième feuillet, je vais laisser une petite trace quand même. C'est très agréable à lire, un peu de tout et rien, pas mal d'errance, une certaine perdition qu'on retrace dans plusieurs carnets, ou qui semble du moins flotter au-dessus. Il y a un regard et c'est en cela aussi que je m'abstiens de commenter, un regard c'est personnel, ça se laisse s'exprimer. Ce qui me retiens et capte mon attention, c'est vraiment l'écriture, maîtrisée, avec un ton pertinent, un ton qui convainc. Ces carnets, c'est ce que je lis de plus réjouissant en ce moment ici, donc vous m'excuserez pour la spéléologie, parce que je vois que les premiers datent d'un an, mais je vais poursuivre, j'en garde un peu sous le coude, à parcourir au fil des jours à venir.
· Il y a presque 11 ans ·Bravo en tout cas et merci pour ce partage, très chouette.
hel
Merci Hel pour tes lectures, tes coups de coeur disséminés sur les carnets et pour ce commentaire lui aussi très agréable à lire :)
· Il y a presque 11 ans ·dyonisos
Merci François. Ravi de vous découvrir également.
· Il y a plus de 12 ans ·dyonisos
Très agréable de vous lire et de vous découvrir,
· Il y a plus de 12 ans ·Bien à vous François.
François Demaret
Merci TUG, Koukie, Joëlle et Reve.
· Il y a plus de 12 ans ·Elvire, la suite des carnets ne te contredira pas...
dyonisos
il parait qu'on vit la prochaine "histoire d'amour" dans la peau du précédent ...
· Il y a plus de 12 ans ·Elvire Volta
excellent ... cdc
· Il y a plus de 12 ans ·reverrance
J'aime beaucoup ce texte..Parce que c'est triste?
· Il y a plus de 12 ans ·the-ultimate-gibbon
Merci Fafa!
· Il y a plus de 12 ans ·Merci Bleuterre! Le narrateur, c'est un peu, beaucoup de moi..
dyonisos
le style est très bon, toujours, beaucoup de cynisme dans ce narrateur désabusé.
· Il y a plus de 12 ans ·bleuterre