Olivia

nyckie-alause

— Non… Je ne sais pas… Hier ?… Non !

Il regrette que les téléphones ne soient plus à clapet. le sien il l'aurait fait claquer sèchement avant de le fourrer dans sa poche.

— C'était Marie ?

— Non non, le boulot… 

Le bruit qu'il aurait aimer faire lui manque alors comme un animal il gratte le sol sans s'en rendre vraiment compte, le boulot, le boulot… 

— Marie ? redemande-t-elle.

— Mais non ! Qu'est-ce que tu imagines ? 

— Rien, mais tes chaussures sont en train de se recouvrir de poussière, et c'est un signe.

Elle les désigne d'un signe moqueur et lui les frotte derrière ses mollets salissant ses jambes de pantalon.

— Non, reprend-il, non… enfin si, c'était Marie.

— Tu m'avais dit que les choses étaient réglées entre vous non ?

— Oui, enfin non, disons presque… Mais c'est le problème du chien. Moi, ce clebs, je n'en voulais pas, c'est elle qui a insisté et comme toujours j'ai fini par céder. Alors il y a ce qui est réglé et ce qui ne l'est pas. Enfin y'a ce chien…

Olivia pense « Je ne sais pas ce qui m'arrive mais cela me divertit de le  mettre mal à l'aise. Il finit ses phrases par des points de suspension avec un souffle qui s'amenuise. J'affiche un sourire mais mon visage se fendille. »

— Hier ?

— Ben hier, elle pensait que je sortirais le chien…

— Tu peux essayer de terminer tes phrases ? Moi je m'en moque de ce chien et aussi de ta Marie. Et si tu dois passer ton temps au téléphone quand nous sommes ensemble ce n'est pas la peine de nous voir. Si je décidais de m'intéresser à un chien, ici dans ce parc je n'aurais que l'embarras du choix !

Elle fait mine de partir quand il la rattrape par la manche « Excuse-moi ». Elle se tourne le regarde dans les yeux et lui, Pierre, la trouve belle quand elle est en colère, émouvante.

— Marchons un peu, j'ai encore du temps.

Que faire sinon la suivre ? Ce n'est pas comme s'il avait une proposition à lui faire. Avant de plonger son téléphone dans la poche de son pardessus il aurait dû en couper la sonnerie car au bout de quelques pas, quand enfin elle se rassérène, la doublure frémit, vibre et Pierre, doit lui lâcher la main pour le museler, sans le sortir.

Olivia pense « L'exaspération me gagne, la colère me ronge, la jalousie m'obsède, un mauvais choix, tant pis pour moi. »

— Règle tes trucs et surtout, quoi qu'il arrive, garde bien tes mains dans tes poches. Tes mains, tes poches, ton chien, ta Marie, tes histoires… 

— Ecoute…

— Et aussi, et surtout tes points de suspension !

— Quels points ? Quels points de suspension ? Tu veux dire…

— Exactement cela. Tu recommences ! Tu ne finis jamais, ni tes phrases, ni tes trucs, ni tes histoires. Tu laisses entendre…

— Non…

— Si …

Elle s'écarte, se retourne, regarde alentour et voit un homme qui marche.

— Monsieur, je crois que nous avions rendez-vous, non ? 

— Heu… mademoiselle, je ne pense pas vous connaître. Je promène mon chien et je n'attends rien.

— Il est beau votre chien. Il a l'air gentil.

— Marius…

— Olivia. C'est joli comme nom Marius, ça vous va très bien.

Il rit et dit que non, ça ne va pas du tout « je m'appelle Charles et Marius c'est le chien, le chien de ma voisine et ce chien on ne va pas le tuer mais il est super bête. Il ne lève jamais la tête. Son museau est à ras du sol car ses pattes sont trop courtes. Il cherche à s'enfuir sans arrêt. Il est sale et je dois vous avouer qu'en plus de tout, il n'est pas sympathique. Mais ma voisine…

Encore un qui laisse ses phrases en suspend se dit Olivia, ce n'est pas mon jour ou bien ce sont les hommes… et son esprit vagabonde au gré de ses propres points de suspension. Elle regarde Marius qui vient de s'enfuir, Charles désabusé qui sort un sifflet de sa poche et s'époumone vainement, la laisse qui traine derrière l'animal, qui s'accroche à la grille d'une fontaine, le chien qui couine et se couche dans la boue.

Elle voit Pierre qui descend l'allée et qui lui fait un signe, de loin. 

Trois possibilités, trois choix, trois signes. « Je libère Marius. Je me rapproche de Pierre. Je fais plus ample connaissance avec Charles »

Le chien se roule dans la terre humide et commence à ronger sa laisse.

Charles remet le sifflet dans sa poche et remonte l'allée.

Pierre qui avait remis les mains dans ses poches ressort le téléphone qui sonne à nouveau : Non… Je ne sais pas… Demain ?… Non plus !

Le chien libéré saute sur Pierre 

— Au pied sale cabot ! Couché Marius !

— Tiens, bonjour Pierre. 

— Charles… 

Définitivement, Olivia préfère traverser la pelouse pour rejoindre le chemin du bas…


  • Olivia a fait le bon choix. Quoi de plus énervant que quelqu'un qui utilise à outrance les points de suspension, que ce soit à l'oral comme à l'écrit ? ………………………………………………………………………………………………
    Au moins, elle a su mettre un point final !

    · Il y a environ 4 ans ·
    Coquelicots

    Sy Lou

  • Jolie chute ! C'est vrai, les points de suspension, c'est tentant quand on écrit, mais, oui, c'est la facilité car cela demande au lecteur de répondre !
    J'ai l'impression que la littérature jusqu'à fin XIXe siècle, ne s'en servait pas ?

    · Il y a environ 4 ans ·
    Oiseau... 300

    astrov

  • c'est de juste un poème qui de justice vaut beaucoup….l'or dans le vermeil

    · Il y a environ 4 ans ·
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    flodeau

    • c'est joli comme commentaire. Merci

      · Il y a environ 4 ans ·
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      nyckie-alause

  • un sacré talent de pub relation ! LOL
    Bravo !

    · Il y a environ 4 ans ·
    Autoportrait(small carr%c3%a9)

    Gabriel Meunier

  • Qui n'est pas en suspension... bravo

    · Il y a environ 4 ans ·
    One day  one cutie   23 mademoiselle jeanne by davidraphet d957ehy

    vividecateri

    • Merci Vivi. Au fait, qui les trouve les mots de contrainte ?

      · Il y a environ 4 ans ·
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      nyckie-alause

    • YL5 il faut regarder la contrainte avec la tête barbue et crépue qu'il pose tous les jours sous son nom.

      · Il y a environ 4 ans ·
      One day  one cutie   23 mademoiselle jeanne by davidraphet d957ehy

      vividecateri

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