Place de la gare

Anne Vigneau

Evocation d'un souvenir

Le soir , douceur du temps, de l'instant .

Une petite fille est sur les genoux de son père, à la terrasse du café de la gare . Il la fait sauter , sautiller, gentiment en lui murmurant des paroles de comptines.

La belle-mère est là, mais elle ne dit rien, ne fait rien, une statue vivante.

La petite se prend au jeu : jouer avec un homme, son père, c'est tellement rare ! C'est la première fois. Ou bien son souvenir a disparu. Ou bien , elle était trop petite ? Pourtant, elle a des souvenirs de son premier baiser,  donné à sa nounou, des souvenirs d'un pont gardé par les allemands, sur la limite de la zone libre, à côté de Castillon . Elle devait avoir trois ou quatre ans.

Mais là, elle ne se rend pas compte : son père, oui, elle en a un, elle aussi, son père, donc est venu la voir  !  Il a eu envie ? Il fallait le faire ?

Son père est venu  : ils ont mangé au café de la gare, ce soir-là, elle a joué avec lui ! Elle était rieuse, à six ans, sur les genoux de son père qui est venu d'Afrique pour la voir ! ! Il avait ses deux mois de congé et il lui donnait une demi-journée ! Mais la petite ne se rendait pas compte, toute au plaisir que son papa la touche, lui parle, soit gentil.

Elle a éclaté de rire : une chatouille, peut-être ?  Et à ce moment-là, sa mère est arrivée . Visage fermé. Echange de paroles sèches entre les ex-époux.

Et retour à pied vers la maison, la rue étroite, puis le boulevard Jean d'Amour, comme elle disait.

La mère marchait vite, comme dans l'urgence et ce fut le déferlement de paroles dures et sévères parce que la petite avait joué, elle s'était amusée, son père allait la prendre et l 'emmener loin, etc.  Les cris, les pleurs, les injonctions à ne plus recommencer, les hurlements, la peur, la douleur .


Le prochain rendez-vous avec son père sera en août de l'année suivante, elle aura sept ans, elle passera une demi-journée sans aucun souvenir, sans rires, pour faire plaisir à sa maman.


  • Merci beaucoup Martine ! oui! je ferai, en urgence, quand ça viendra, plus que la peinture....

    · Il y a plus de 8 ans ·
    Dsc00294

    Anne Vigneau

  • A travers votre texte, l'on sent tout le désarroi de cette petite qui subit la séparation, le déchirement entre ses parents. Il en est ainsi pour beaucoup de familles, malheureusement ! Une belle écriture, croyez-moi !
    Mais pourquoi chercher à être une spécialiste, moi j'écris en suivant mes émotions, le reste m'importe peu ! Je n'aime pas les règles.

    · Il y a plus de 8 ans ·
    Louve blanche

    Louve

  • très bien rendu cet instant d'amour, en grande liberté, cette joie naturelle qu'on va hélas t'interdire. Bravo pour l'écriture, belle.

    · Il y a plus de 8 ans ·
    Bbjeune021redimensionne

    elisabetha

  • Merci beaucoup de ces conseils ! ce sera dans ma prochaine vie, pour sûr !

    · Il y a presque 9 ans ·
    Dsc00294

    Anne Vigneau

  • un bon écrivain transforme son histoire en fiction, cela lui permet de conter son expérience au travers de personnages auxquels il donne des psychologies et c'est là que le conte commence, faire parler les personnes entre elles; alors continuez et nous verrons une histoire naître vraiment.

    · Il y a presque 9 ans ·
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    Pawel Reklewski

  • Merci beaucoup, Frédéric . Je ne suis pas une spécialiste de l'écriture, c'est mon premier texte .

    · Il y a presque 9 ans ·
    Dsc00294

    Anne Vigneau

  • Ce genre de souvenir est souvent le point de départ d'une nouvelle ou d'un roman, car l'émotion est là, dès son évocation, vive comme née du jour même.
    Merci pour le partage.

    · Il y a presque 9 ans ·
    Un inconnu v%c3%aatu de noir qui me ressemblait comme un fr%c3%a8re

    Frédéric Clément

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