Si vous avez du temps à perdre.

Hervé Lénervé

Je rencontre l’ami d’enfance de mon pote que j’ai vu quelquefois.

Je revenais d'un resto bien arrosé avec mon fils, l'ami en question m'embrasse. On doit bien se connaître alors, car je ne suis pas un homme facile, je ne me laisse pas embrasser par n'importe qui, à part par les filles, mais elles, elles embrassent vraiment n'importe qui.

Nous descendons dans notre repère et pendant que je sers des bières.

-         Bernard !

-         Pardon ?

-         Depuis tout à l'heure je recherchais ton prénom. C'est Bernard !

-         Quelle mémoire ! Bien que, moi, ce soit Williams !

-         T'es sûr ?

-         Assurément !

-         Mais tu ne t'appelais pas Bernard, avant ?

-         D'aussi loin que je me souvienne, non ! Je me suis toujours appelé Williams. En fait, ce sont mes parents qui m'ont donné ce nom à ma naissance, car ils aimaient bien les poires Williams.

-         J'ai dû confondre avec un autre fruit, alors.

-         Certainement ! Les pommes Bernard, peut-être ?

-         Excuse-moi, mais j'ai mangé avec mon fils à midi, on a un peu forcé sur le vin.

-         Ecoute, moi je t'ai toujours vu comme ça, donc je pensais que c'était ton état normal.

-         Non, non, d'habitude, je mets des chaussures aux pieds, je me demande où j'ai bien pu les perdre.

-         On a dû te les voler, c'est courant !

-         Pas pratique pour courir, en attendant. De toute façon, ce devait être un pickpocket adroit, car je ne mets jamais mes pompes dans mes poches.

-         Le vol à la tire se pratique de plus en plus. Moi je me suis fait tirer ma tire sur l'autoroute à 130 km/h et je n'ai rien vu.

-         C'est du car jacking. Ah, ils sont balèze les voleurs, aujourd'hui. Tiens t'es gaucher ?

-         Non, je tiens mon verre de la main gauche, car je me suis fait vacciné contre la grippe au bras droit, tout à l'heure.

-         J'aimerais le faire aussi, mais j'ai la flemme d'aller dans un centre médical.

-         Pas la peine, tu vas au bar tabac, maintenant, avec la feuille de la sécu et le patron te fait l'injection derrière le comptoir entre deux Ricards.

-         C'est pratique !

-         Oui c'est pour généraliser la vaccination.

-         C'est une bonne idée de vulgarisation, en effet.

-         Ils voulaient l'étendre aux églises, mais ils ont renoncé, pas assez de clients. Autrement, tu peux le faire dans les pharmacies aussi.

-         Moi, je n'oserai pas en pharmacie, trop de stock, ils doivent te refiler les vieux médocs. Je vais attendre que ça arrive en libre-service dans les sex-shops. Heureux de t'avoir revu, je dois rentrer à présent. Salut Williams, comme la poire !

-         Salut Hervé comme rien.

Signaler ce texte