Souffler un peu

dreamcatcher

Photographie: Harry Fayt

Les trois belles entrent dans la pièce.

Leur petit sourire gêné me fait du bien. Je sais qu'elles veulent pleurer, leurs yeux brillent. J'aimerai pleurer, moi aussi. Mais la toux me reprend et me brise les poumons.

Je ne sais pas quoi leur dire. Je voudrais qu'elles sourient. Qu'elles vivent. Mais je sens leurs joues froides et leurs mains tremblantes, je sens qu'une partie d'elles s'éteint avec moi. 

Ma bouche voudrait cracher mais je m'accroche. Mon regard dérive sur la perfusion. Le leur s'efface devant mes joues creusées. La petite se tourne vers un drôle d'objet...

Les blouses blanches me l'ont apporté pour travailler mon souffle. Il s'agit d'un petit tube avec une bille bleue à soulever. Au fil des jours, malgré mes efforts, la petite bille ne monte vraiment pas très haut. 

Je regarde la croix sur le mur. Ça me fait rire. Et ça me fait mal. Les petites gouttes ne descendent pas assez vite. La douleur s'empare de moi tout entier. J'ai beaucoup de mal à le cacher aux filles. 

Le soir tombe, mes princesses s'en vont. Ma femme chérie et ma fille les suivent en me disant au revoir. Elles reviendront demain. Si je suis là. 

La morphine pénètre mes veines à chaque seconde mais je ne sens pas son effet. Il suffirait d'appuyer sur un bouton. Il suffirait de quelques gouttes de plus. 

Juste quelques gouttes de plus... pour souffler un peu.

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