Spirite

Hervé Lénervé

J’aime bien me mettre nu devant mon clavier, sans une idée en tête, comme d’hab. quoi !

Premièrement, j'expire longuement en me vidant la tête de toutes pensées, même des bonnes. De toute façon bonnes ou mauvaises, ça tombe bien, j'n'en avais pas ! Y'a de la place là-dedans, on n'entend que le vent qui joue aux courants d'air, l'air de rien. Si l'air de quelque chose, quand même, il joue au tennis avec lui-même. Eh, il est rapide l'air, il voyage à la vitesse du vent quand y'en a. Mais ça ne suffit pas et y'a toujours trop de place, il faudrait qu'il joue au foot, mais même pour l'air, ça fait beaucoup de joueurs à inspirer, mine de rien, d'autant plus qu'il parait que chez les professionnels, ce ne sont pas des lumières. Enfin bref, moi ce que j'en dis, je ne suis pas professionnel, pas joueur vétéran, pas ballon et j'n'aime pas le foot... alors !  

Justement, alors, d'où peuvent bien sortir tous ces mots que vous lisez en ce moment sans différé ? Assurément pas de moi, ça c'est sûr, je vous le promets ! Je suis vierge d'idées, j'n'risque pas d'enfanter quoi que ce soit que ce fut ou l'inverse.

On va dire que ça parle, il se peut que ce soit la voix de mes ancêtres qui soufflent à mes doigts fiévreux leur droit légitime à s'exprimer par mon clavier miraculeux (c'est pour la rime, quoique j'aurais pu mettre « crasseux » aussi et je n'aurais pas menti).

Putain, mais je suis un spirite, moi ! Je suis le médium sans esprit des esprits sans vie.

Le problème, c'est que je ne connais pas mes ascendants, jamais eu la curiosité de me renseigner. Remarquez que vu, ce que je lis de leurs écrits sous mon nom (c'est un palindrome, je précise pour ceux qui ne maîtrise pas encore totalement la paléontologie), j'ai bien fait, il n'y avait que de grands malades dans ma famille, ou quoi !

Roland Barthes, un des derniers grands intellectuels de ce Monde, mais avec une sale gueule, quand même, dit... Ah, il est mort lui aussi, c'est pour ça qu'il ne disait plus rien, alors !

Enfin, avant de mourir il disait : « AREUFFEuuureufff... » Non, un peu avant alors, il disait : « D'où parles-tu, toi ? » Ça vous parle, ça ? Moi, en tout cas, ça me va et j'aurais pu lui répondre à l'aise dans mes sabots, s'il avait fait l'effort de me le demander : « Certainement pas de moi !» j'ai une pensée atavique, ce qui me dispense d'en avoir une propre à moi-même. Donc, vous ne pouvez en aucun cas, me critiquer sur mes sales pensées sadicoperverses, je n'y suis pour rien, ce sont mes ascendants, comme dirait Hollande. Je suis l'innocence incarnée, sans aucun soupçon de présomption de culpabilité, ni de cors aux pieds.

Si tu n'as rien compris à ce qu'ils  viennent d'écrire mes aïeux, alors, dis-toi bien, qu'on est deux, mon vieux. C'est toujours mieux de ne pas se sentir seul dans ce vaste Monde.

Pour finir en finale fatale, si les morts parlaient, ça radoterait ferme dans les cimetières.

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