Strip-panthère rose do Brasil

djoolee

Parigote de naissance, j'en ai usé, des semelles, sur ses trottoirs empreints de vie, de folie, et de larmes aussi...

A l'abri des regards, j'aimais observer la vie qui suivait son cours au long de ma rue, accoudée à ma fenêtre.

J'y ai vu des myriades de magie blanche ou noire, de l'amour, de la nostalgie, dépeints dans les démarches et les allures... Je me souviens d'une nuit enragée où je vis un homme en poursuivre un autre, couteau de boucher à la main, en hurlant, "j'vais t'tuer!, j'vais t'tuer!!!"

Au bout de la rue, il y a le Moulin Rouge et la Locomotive, dite la Loco, fameuse boite du quartier. Les touristes jouent gaiement à la Marylin de 7 ans de réflexion, en posant sur le rond-point qui souffle incessamment l'air des entrailles du métropolitain. Heureux sont à Pigalle, ceux qui viennent à Paris!

C'était il y a douze ans, pendant la coupe du monde de football où l'on fût les champions, on fût les champions, on fût, on fût, on fût les champions, et où certains eurent peut-être une overdose de Gloria Gaynor et son "I will survive".

J'avais la vingtaine insouciante et le goût des aventures humaines. Cette fois là, je ne jouais pas à la commère du haut du balcon, non, je suivais comme beaucoup les événements footballistiques de notre équipe black-blanc-beur, United Colors of Ballon Rond, à la télévision.

Quand je commençais à entendre le son chaud et attirant de cuivres épicés... Des notes de rumba par ci, des rythmes de samba par là. Un son "live and direct", tout droit sorti de la rue.

Passionnée de musique que je suis, je ne pouvais évidemment pas ne pas aller jeter un oeil à la fenêtre pour voir d'où cette mélodie sensuelle s'échappait.

J'ouvre donc la fenêtre, et laisse mes oreilles guider mes yeux. Et là, en face, au 2ème étage, quelle belle surprise! Au moins deux ou trois jeunes hommes brésiliens, saxo et trompette à la main, me lancent un bonjour en m'offrant leur plus beau sourire. Titillée par la curiosité de cette vision musico-tropicale, je leur demande spontanément si je peux m'inviter dans leur chambre. Un spectacle vivant vaut bien toutes les télés!

Je me retrouve donc dans leur chambre, juste en face de chez moi, et rien que ça, c'est très amusant!

Et là, il n'y avait pas deux ou trois hommes, mais plutôt une bonne dizaine, tous plus beaux les uns que les autres! Une batucada venue de Penambuco pour faire vibrer les foules européennes aux rythmes des percussions et des cuivres endiablés... Suis-je au paradis, me dis-je, sourire aux lèvres! Non seulement de biens jolis corps bronzés et bien entretenus, mais aussi des âmes très accueillantes, souriantes, marrantes!

On blague sur la coupe du monde, se pronostiquant mutuellement des 3-0 pour la finale, en faveur de nos équipes respectives. C'est l'été, il fait chaud, on est jeune, on est beau, et la grande cascade des hormones s'écoule dans tous nos corps!

Ces messieurs sont musiciens, et puisque l'on s'amuse bien, pourquoi ne me feraient-ils pas un petit strip-tease en musique? La proposition fait sourire et aussitôt, quelques-uns se mettent à jouer l'air de la panthère rose version tropicale, et d'autres commencent à s'effeuiller...

C'est la première fois que j'assiste à un strip-tease et là, il est donné rien que pour moi, je suis aux anges! Ils me donnent même des reals à glisser dans leur slip!

On a beaucoup ri et on est devenu amis. L'un d'entre eux m'a séduite, impossible de résister à ce charme voluptueux do Brasil! Quelques nuits torrides, des moments de tendresse et de rires...

Mais très vite, la troupe devait repartir, de Paris direction l'Italie. Je les aurai bien suivi, mais leur ai finalement dit adieu, du soleil plein les yeux...

Mais le monde est petit et il aime toujours à nous le rappeler de façon surprenante.

Quelques semaines plus tard, je sors du métro, et là, ô surprise de joie, qui vois-je en grimpant les escaliers? Ma batucada pernambuquienne! La coupe du monde était passée, je me moque gentiment, ils rient jaune. Je suis ravie de les revoir, moi qui pensais qu'ils n'étaient déjà plus qu'un souvenir chaud et sensuel à bercer.

Je retrouve mon amoureux, je découvre la feijoada...

Je ne crois pas que de cette année 98, je sois plus marquée par le million et demi de français qui défilèrent aux Champs-Elysées pour fêter la victoire, que par cette aventure magique et éphémère, au coeur du 18ème arrondissement, avec ces troubadours tropicaux!

Signaler ce texte